Dans les Côtes du Rhône, le contrat nouvelle embauche rencontre un franc succès. En revanche, il n'intéresse pas les Champenois. Leur syndicat les incite à se méfier de l'apparente facilité avec laquelle l'employeur peut rompre ce contrat.
'Lorsqu'un employeur veut embaucher en dehors du cadre saisonnier, nous lui proposons automatiquement un contrat nouvelle embauche (CNE), explique Valérie Olivari, du Syndicat général des vignerons des Côtes du Rhône. Il n'offre que des avantages, mis à part l'indemnité de rupture de 8 %. ' Il a sécurisé les viticulteurs qui avaient besoin de main-d'oeuvre. Depuis la création du contrat, en août cette année, Valérie Olivari en a rédigé une dizaine pour l'embauche d'ouvriers viticoles dans le Vaucluse. Elle n'a plus préparé le moindre contrat à durée indéterminée classique (CDI).
Dans le Gard, le nouveau contrat semble encore plus positif. Au centre de gestion agréé de ce département, Nicole Legac estime qu'il exerce un effet de levier sur l'emploi : ' Entre septembre et novembre, nous avons fait plus de contrats de travail que les années précédentes à la même époque. ' Ils ont servi à recruter des secrétaires, des employés de caveaux de vente et des ouvriers agricoles.
En ces temps de crise, les CDI apparaissent trop risqués aux employeurs. De plus, dans le Gard, ils sont assortis d'une courte période d'essai : un mois pour un ouvrier exécutant. Pour beaucoup de viticulteurs, c'est insuffisant.
Avec le CNE, ils pensent avoir deux ans devant eux. En effet, pendant les deux années qui suivent la signature du contrat, ils peuvent à tout moment y mettre fin par une lettre avec accusé de réception. Ils n'ont pas à justifier leur décision, ni à organiser un entretien de licenciement avec le salarié. Mais Nicole Legac met en garde : ' L'apparente simplicité de rupture du contrat nouvelle embauche ne les dispense pas de préparer un dossier sur lequel ils s'appuieront en cas de contentieux. '
Au Syndicat général des vignerons de Champagne, Janick Léger appelle aussi à la prudence. ' Dans l'esprit des gens, le CNE est un contrat de travail avec une période d'essai de deux ans. Ils se disent : c'est merveilleux, on va tester le salarié sur toute une campagne, voir comment il taille, puis comment il conduit l'enjambeur. Mais c'est faux. ' Une circulaire ministérielle du 25 août interdit d'assortir le CNE d'une période d'essai. ' C'est un contrat de consolidation ', explique Janick Léger. Le gouvernement donne deux ans aux petites entreprises pour viabiliser les postes qu'elles créent.
' Le CNE dispense de respecter la procédure habituelle de licenciement uniquement dans le cadre d'un motif économique ', poursuit Janick Léger. En Champagne, les entreprises ne risquent pas d'avoir à prendre ce genre de mesure. De ce fait, le nouveau contrat s'avère moins intéressant que le CDI, qui est assorti d'une période d'essai de trois mois pour un ouvrier qualifié et de six mois pour un ouvrier hautement qualifié.
Après une rupture de CNE, rien n'empêche le salarié de demander des explications, ni d'aller devant les prud'hommes. Si le motif est économique, les choses sont claires. Il n'aura que l'indemnité de 8 %. Si le motif est disciplinaire, elles le sont également. En aucun cas, on ne peut se contenter d'une lettre avec accusé de réception. Il faut absolument respecter la procédure usuelle prévue par le code du travail (article L 122-40).
Sur son site internet, le ministère du Travail prévient qu'il y a d'autres limites aux possibilités de rompre un CNE. La rupture ne peut pas être discriminatoire. Cela signifie qu'elle ne peut pas être motivée par ' l'état de santé, les moeurs, la race, le sexe ou la participation à une grève ' du salarié. Elle ne peut pas non plus se résumer à un abus de droit. En clair, il est interdit de se séparer de quelqu'un, juste avant la fin des deux ans, pour la seule raison d'éviter de l'embaucher définitivement.