Grâce à ce travail, j'économise 7 000 à 8 000 euros par an
En 1999, Ivan Puech a converti ses 20 ha en viticulture biologique. Or, ' on ne peut pas faire de vin issu de viticulture bio sans utiliser de compost. C'est la base. Il améliore la vie des sols, favorise les vers de terre. Lorsque la vigne est bien nourrie, elle produit des raisins plus aromatiques, elle est moins sensible aux maladies. Le compost a également un effet mécanique, car les sols sont moins battants '.
Son objectif étant de faire des apports massifs, à raison de 20 tonnes par hectare et par an, ses besoins s'élèvent à 400 t. ' Chez un composteur classique, il faut compter, épandage compris, 30 à 40 euros/t, soit 16 000 euros/an. ' Au vu de ces calculs, Ivan Puech se lance dans la fabrication, car il a assez d'espace pour faire des plates-formes de compostage. Pour cela, il investit 150 000 F (2 287 euros) dans deux épandeurs. L'un est adapté aux grandes cultures et équipé d'une andaineuse. L'autre est un épandeur interrang, convenant aux vignes. Ivan Puech achète également une chargeuse et des tracteurs.
Ivan Puech est à proximité d'une réserve africaine qui lui fournit gratuitement le fumier des différents animaux : zèbres, lions... Il le récupère en novembre. L'opération demande beaucoup de temps. ' Le fumier, c'est du volume. On ne ramène que 40 t par jour. On y passe dix jours à deux. ' Du coup, il laisse la taille des vignes à des salariés. Aujourd'hui, il privilégie le fumier de bergerie. ' Il est moins pailleux, plus riche et plus dégradé. Je gagne du temps. ' Il le mélange avec du marc de raisin, à raison de deux tiers de fumier et un tiers de marc. Puis il le met en andains, de 2 à 2,50 m de haut et de 3 m de large. ' Il ne faut pas que les tas soient trop gros. Sinon, seul le coeur chauffe trop et la fermentation n'est pas homogène. ' Cette dernière opération dure de quinze jours à trois semaines. Ivan Puech surveille visuellement son bon déroulement et arrose le tas s'il fait trop sec. ' Lorsque le tas est mature, il change de teinte et devient couleur cigare. Des champignons apparaissent. '
Par souci d'économie, il se passe du criblage. ' Comme j'ai une matière première homogène, je ne vois pas l'intérêt de cette opération. Et puis s'il y a quelques cailloux, ce n'est pas gênant. ' En janvier-février, Ivan Puech fait analyser le compost : N, P, K, C/N, acidité, pH, oligo-éléments, pour 110 euros. ' Cela me permet de vérifier qu'il est bien mature et qu'on va l'épandre à la bonne période. Au départ, comme je tâtonnais, j'ai fait quelques erreurs et épandu du compost trop pailleux. La fermentation s'est donc poursuivie dans le sol en consommant l'azote, ce qui a nui à la vigueur de la vigne. ' Ce phénomène est connu en grandes cultures et s'appelle la ' faim d'azote ' : les micro-organismes du sol utilisent l'azote pour dégrader la paille.
L'analyse permet à Ivan Puech de raisonner la quantité de compost à apporter. ' J'épands ainsi entre 4 à 10 t/ha selon la concentration en N, P et K. ' Ivan Puech distribue d'abord le compost en bout de parcelle. Puis il le reprend en avril-mai pour l'épandre, si les conditions climatiques le permettent. A ce moment, il utilise l'épandeur interrang. ' L'inconvénient est qu'il ne va pas vite. Et comme les vignes sont en pente, il chavire. J'aimerais m'équiper d'un porteur type Pellenc, mais il risque de tasser les sols. '
Au final, cette production de 400 à 500 t de compost aura mobilisé deux personnes pendant un mois de travail. Pour amortir son matériel, Ivan Puech s'est lancé dans la prestation de service. Il travaille notamment pour Phalippou-Frayssinet et d'autres vignerons. ' Mais comme il ne s'agit pas du même type de compost, je ne leur fais pas concurrence. ' Il facture l'épandage 20 euros/t, auxquels il faut rajouter le prix de la matière première. Grâce à ce travail, il économise 7 000 à 8 000 euros/an. Une somme non négligeable en ces temps de crise.