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Sud-Ouest : face à l'adversité, les forces se regroupent

La vigne - n°172 - janvier 2006 - page 0

Le vignoble souffre de ce qui a fait sa réputation : ses rouges. Pour la première fois, en 2004-2005, Cahors a commercialisé moins de vins que Gaillac, son voisin. Seul Jurançon s'en sort grâce à ses blancs.


Outre 40 361 hl envoyés à la distillerie et un abaissement du rendement à 50 hl/ha, l'appellation Cahors réfléchit à un plan de sortie de crise. Celle-ci ne cesse de s'aggraver. Début décembre, une grande surface de la région a provoqué l'émoi avec un cahors au packaging soigné (bouteille gravée et étiquette numérotée) à... 1 euros ! De quoi traumatiser les producteurs.
Le 20 décembre, deux mesures novatrices ont été présentées à l'assemblée générale de l'interprofession. La première vise à réduire la production à 150 000 hl dès 2006, contre 187 000 hl récoltés en 2005. Cela signifie qu'il faudrait affecter 1 500 ha aux vins de table ou aux vins de pays. ' Chaque exploitation devrait consacrer 30 % de ses surfaces à ces productions. Cela passerait par un engagement de chaque viticulteur sur trois années, avec remise d'un parcellaire ', explique le président Jean-Marie Sigaud.
Autre mesure discutée : le ' blindage ' du suivi en aval de la qualité. ' Chez nous, le suivi en aval de la qualité a lieu lorsque le vin quitte le chai du producteur, sur du vrac ou juste avant la mise en bouteilles. Lorsque le vin est jugé non conforme, notre seul moyen d'action est de transmettre l'information aux Fraudes. Nous voudrions le soumettre à nouveau à l'agrément. '
Dans la déprime ambiante, la distinction du Château Lagrézette a redonné un peu de baume au coeur des producteurs de Cahors. La cuvée 2001 de la propriété d'Alain Dominique Perrin figure au classement des cent meilleurs vins au monde, selon la revue américaine Wine Spectator.

Jusqu'à présent, l'appellation Gaillac surnageait. Elle vient d'être rattrapée par la mévente. En 2004-2005, le marché du vrac a débuté à 100 euros/hl de rouge pour finir à... 76 euros au mois de juillet. ' Le décrochage s'est produit au printemps ', note Bernard Petiot, directeur du syndicat. Malgré cela, les sorties de rouges ont baissé de 8 % par rapport à 2003-2004. Toutes couleurs confondues, le vignoble maintient un volume commercialisé stable à 170 000 hl, grâce à la bonne tenue des blancs et des effervescents. La distillation a eu peu de succès : seuls 5 000 hl ont été souscrits.
Pour éviter une surproduction en 2005, un coefficient de ' régression ' est appliqué. Bernard Petiot explique : ' Notre potentiel est supérieur à la commercialisation. Pour éviter toute dérive, nous avons mis en place, voici huit ans, un système de quotas de récolte. Avant les vendanges, chaque producteur se voit attribuer un volume de vin qu'il peut vendre. C'est la moyenne de ses trois dernières années de commercialisation. Jusqu'à présent, nous rajoutions un coefficient à ce chiffre, le même pour tous, pour permettre au vignoble de se développer. Pour la première fois, en 2005, ce coefficient a été négatif, à - 5 %. '

Fin 2004, des propositions d'achat de madiran à 1 euros/l circulaient. Du jamais vu. ' N ous avons réuni les producteurs pour faire le point sur leurs stocks , se souvient André Beheity, président de la section interprofessionnelle. Au global, le volume n'était pas alarmant, mais il recouvrait des réalités d'entreprises très différentes. A l'issue de la réunion, 3 000 hl furent rachetés par une Sica à 1,30 euros/l. La quasi-totalité de ces volumes avait été écoulée à fin 2005. ' La baisse du prix du vrac stabilisée, la profession s'est attaquée à la maîtrise de son offre : 4 600 hl de madiran sont partis à la chaudière en 2005. De plus, les producteurs se sont fixé un objectif de récolte de 60 000 hl dans l'AOC. A charge pour chacun d'opter pour d'autres productions. La récolte 2005 de madiran devrait atteindre 64 000 hl, ' alors que nous avons vendu 66 000 hl lors de la campagne 2004-2005 '.
2006 s'annonce sous de meilleurs auspices : la marque collective sur laquelle l'appellation travaille depuis deux ans devrait être lancée au premier semestre.

La cave coopérative produit 95 % de l'AOC. Pierre Philippe, le nouveau directeur, fait le point : ' Les sorties de 2005 sont stables par rapport à 2004, mais les stocks à fin juillet restent importants, avec un peu plus d'un an et demi en cave. Nous avons demandé la distillation pour 25 000 hl, et avons abaissé les rendements de 15 % pour atteindre 51 hl/ha, au maximum, en dessous du rendement de base fixé par le décret. Le revenu des 300 coopérateurs va d'autant plus s'en ressentir que nous allons réinvestir au niveau commercial. '
Une nouvelle campagne de communication - dont le budget n'a pas été communiqué - est prévue pour 2006. Pour réduire ses charges, la cave a prévu huit licenciements sur les cent cinq salariés. Par ailleurs, pour 2005-2006, l'AOC a demandé à bénéficier des mesures d'arrachage.

Le total des sorties en 2004-2005 est en recul de 10 %. Les rosés ont progressé de 14 %, mais les rouges ont chuté de 20 % ! Pour éviter de surcharger le meilleur marché, la profession a décidé un blocage interprofessionnel. Hugo Cavagnac, directeur du syndicat, explique : ' Pour savoir quel volume un producteur peut mettre en marché, on fait la moyenne de ses ventes de rosés sur les trois dernières campagnes. On compare ce chiffre à ses stocks. Si ceux-ci sont supérieurs de 20 %, alors les volumes en surplus n'auront pas de certificat d'agrément. Ce système est d'autant plus dissuasif que nous appliquons la caducité de l'agrément. ' Début 2006, le conseil d'administration doit se prononcer sur l'ouverture de l'arrachage et sur un dispositif d'affectation parcellaire. A noter la bonne discipline des producteurs qui ont envoyé 11 000 hl d'AOC à la distillerie.

La coopérative, qui assure les deux tiers de la production, a vu ses sorties augmenter en 2004-2005. ' Le revenu des coopérateurs est constant ', affirme le directeur, Jean-Pierre Bize. Du côté des caves particulières, les ventes sont stables. Décembre était prometteur. Bref, Jurançon semble échapper à la crise. ' On bénéficie des avantages des marchés de niche ', explique Henri Lapouble, président des Vignerons indépendants. Et le vignoble ne cesse de faire la fête pour attirer des visiteurs. Les deux journées portes ouvertes proposées par la coopérative durant l'été rassemblent, chaque fois, près de 6 000 personnes. De leur côté, les Vignerons indépendants animent l'automne. ' Cette année, nous avons organisé une douzaine de manifestations entre les mois de septembre et décembre ', explique Cédric Laprun, animateur de la route des vins. Le tout s'est terminé le 11 décembre par une journée portes ouvertes dans les caves, avec environ 15 000 visiteurs.
La prochaine édition fêtera les 70 ans de l'AOC. Au programme : une nouvelle maison des vins.

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