Chirurgien par vocation, vigneron par passion, Michel Valton plante ses premières vignes en 1986, à Jurançon. Il ne vend que des vendanges tardives. Il s'est suréquipé pour soigner ses vignes, après ses patients.
'Je voulais me faire plaisir ', affirme Michel Valton, 59 ans, chirurgien urologue à la clinique de Navarre, à Pau, et passionné de vins. Il rêvait de créer son domaine, il l'a fait. En 1981, il s'installe comme chirurgien. Parallèlement, il rachète à ses frères et ses soeurs les parts d'une propriété familiale, sans vigne, située à 12 km de la clinique, à Jurançon. Il défriche et draine les parcelles. En 1986, il plante son premier hectare : du petit manseng. En 1995, il loue puis rachète à un voisin 1 ha en AOC Jurançon et plante 1 ha supplémentaire de petit manseng.
Le domaine compte aujourd'hui 3 ha en AOC Jurançon. Il produit environ 8 500 bouteilles. ' Notre créneau est de tout vinifier en vendanges tardives, en prenant le risque d'aller jusqu'au bout malgré les aléas : la pluie, les oiseaux, la neige, le froid ', précise Michel Valton. Depuis 2001, il a aussi planté 90 ares de merlot, petit verdot et syrah. Il produit environ 1 200 bouteilles d'un vin rouge pour l'instant destiné à l'autoconsommation. Il le veut toutefois ' de qualité ', ' agréable ' et ' qu'on puisse boire sans se prendre la tête, ni sombrer dans les vins flatteurs ' .
Michel Valton a grandi dans le vignoble de Madiran. Son père, lui-même médecin, était installé à Viella, au coeur de l'AOC. ' C'est là que j'ai attrapé le virus ', précise-t-il. Et en 1968, il obtient son diplôme d'oenologie de la faculté de Bordeaux, avant de terminer ses études de médecine et chirurgie en 1980. De la culture de la vigne jusqu'à la commercialisation, il ' décide de tout '. Il ' participe à tous les travaux ', et emploie un salarié à temps partiel. Depuis peu, il ne travaille plus à la clinique que quatre jours par semaine, hormis les week-ends de garde.
' Je suis un petit dormeur et je démarre très tôt le matin ' , explique-t-il. Avant de partir à la clinique, il passe au chai et intervient si nécessaire. Le soir, en rentrant, il y jette systématiquement un oeil. Pendant les vinifications, il déguste une fois par semaine avec un oenologue. Comme il a peu de temps, il est ' suréquipé en matériel '. En 2000, il a construit un superbe chai dans le style local. Au total, il a investi 540 000 euros.
Il plante à la densité de 3 770 pieds par hectare, avec 2,70 m entre les rangs pour permettre le passage des tracteurs. Un piquet est adossé à chaque pied. Il palisse haut avec trois fils releveurs. Le porteur est à 0,75 m, les derniers releveurs à 2 m. Au mois de juin, il effeuille manuellement des deux côtés de la zone des grappes en enlevant, en même temps, les entrecoeurs.
En 2005, il a posé 24 km de filets larges de 1,2 m pour protéger la vendange des oiseaux. Il l'a fait, bien que la récolte fut extrêmement faible pour avoir été frappée par la grêle à trois reprises.
En 2002, il a démarré la conversion en viticulture biologique. Il est certifié depuis 2005. ' Il suffit de regarder les formules chimiques des produits pour comprendre qu'ils sont très toxiques et très dangereux , explique-t-il. Pour traiter la vigne, il n'y a pas besoin de tels produits. '
Le plus difficile à gérer dans le biologique, c'est l'herbe. Il s'est donc équipé de trois outils différents (intercep, rotofil, brûleur thermique) pour intervenir quelles que soient les conditions climatiques. Les vendanges ont toujours lieu après le 15 novembre. Michel Valton attend ' le créneau pour optimiser la récolte ' : un week-end sans astreinte à la clinique, précédé de trois à quatre jours sans aucune pluie.
Il recherche des vins équilibrés, concentrés, aromatiques, complexes, dotés d'une attaque vive et fraîche. Les moûts ont 20° probables et 8 g/l d'acidité totale, au minimum. Après le débourbage, ils sont mis en barriques et chauffés à 18°C, grâce à un bricolage maison : des résistances d'aquarium installées dans chaque fût.
L'élevage dure dix-huit mois sur lies. Il se fait pour un tiers en barriques neuves, pour un autre tiers en barriques d'un ou deux vins, pour le dernier tiers en cuve de fibre de verre afin de conserver des arômes de fruits et d'agrumes.
Le vin est bâtonné deux fois par semaine pour donner ' de la rondeur ', ' du gras ', ' du velouté '. Lorsqu'une barrique a un nez de réduit, il sort les lies, les travaille à part en les aérant au fouet. Après dix-huit mois d'élevage, il colle le vin à la bentonite et le met en bouteilles après une filtration sur plaques. Les étiquettes, ' bleues sur fond blanc ', se veulent ' simples et épurées '.
Michel Valton a commercialisé son premier vin en 1996. Cette année-là, il a vendu 8 000 demi-bouteilles, grâce à l'intermédiaire de François Laplace du château d'Aydie, à Madiran. En 1997, il participe à des dégustations et des fêtes locales pour se faire connaître. Le bouche à oreille fonctionne bien. ' Beaucoup de personnes qui me connaissent comme chirurgien, savent que je fais du vin et en achètent ', affirme-t-il. Il vend les deux tiers de sa production auprès de particuliers et des cavistes. Le reste est écoulé via des comités d'entreprises, notamment celui de sa clinique.
A l'avenir, il plantera encore du petit verdot, du tannat et de la syrah et élaborera peut-être un vin de pays rouge. Il supprimera les fûts de 225 l au profit de barriques de 400 l, car ils boisent trop les vins et sont plus chers. Au mois de juin 2006, il créera ' une super cuvée ' du millésime 2004, conditionnée en demi-bouteilles. Toujours pour se faire plaisir !