Michel Bedouet est producteur de muscadet. Il n'a pas la fibre commerciale, mais le sens du travail en équipe. C'est ainsi qu'avec dix collègues, il a préservé un marché vital.
Calculer vite une ristourne, négocier un prix... Bref, ' parler chiffres ' n'est pas la tasse de thé de Michel Bedouet. A la tête d'un domaine de 20 ha, situé sur la commune Le Pallet (Loire-Atlantique), ce vigneron indépendant se définit plutôt comme un homme de la vigne, passionné par l'aspect technique de son métier. ' Ce qui me plaît, c'est discuter avec un acheteur sur un cahier des charges pour définir la meilleure façon de travailler , explique-t-il. A ce titre, j'ai toujours considéré le négoce comme un partenaire. Ce circuit a toujours été prépondérant pour moi. ' Encore aujourd'hui, la vente directe ne représente qu'un quart des volumes commercialisés.
En 1995, Michel Bedouet décroche un contrat triennal portant sur plus de la moitié de ses surfaces. Le prix convenu est supérieur au cours moyen du vrac enregistré par l'interprofession. L'acheteur est un négociant de la région qui travaille avec Carrefour. Fin 2003, un désaccord commercial naît entre lui et l'enseigne de la grande distribution. Carrefour cesse de lui passer commande.
' Perdre ce référencement mettait en péril mon exploitation ', déclare, sans détours, notre vigneron. Il n'aurait pas été le seul sur le carreau. Dix autres collègues se seraient retrouvés dans l'impasse, travaillant comme lui avec le même négociant. Heureusement, ' l'enseigne se montrait satisfaite de nos vins, mais elle voulait contracter avec un seul interlocuteur ', explique le vigneron. Une solution s'est vite imposée : la constitution d'un GIE (Groupement d'intérêt économique). Il fut créé en 2004. Il commercialise toujours le volume commandé par Carrefour.
' Nous avons pris conseil auprès du centre de gestion, explique Michel Bedouet. Il nous a donné les statuts type. Ce n'était pas bien compliqué. Ce qui a pris le plus de temps, c'est l'établissement du réglement intérieur. Tous les adhérents doivent être vignerons indépendants, respecter la charte Terra Vitis et présenter leur vins à trois concours, au moins. ' Le GIE a aussi défini la règle de rémunération, au sujet de laquelle il préfère rester discret.
Sa constitution a permis de pérenniser un débouché commercial primordial pour ses onze participants. De plus, ses membres découvrent les avantages du travail en équipe. ' Nous avons additionné nos compétences ', résume Michel Bedouet, devenu animateur de la nouvelle structure. Et d'expliquer : ' Je ne suis pas commercial dans l'âme. Aussi, lorsque je négocie pour le GIE, je vais au rendez-vous accompagné de l'un de mes collègues, qui lui a vraiment la fibre. Moi, je suis compétent pour tout ce qui touche aux discussions techniques sur la production des vins. Mon collègue sait parfaitement jongler avec les chiffres. A nous deux, on forme un bon binôme . '
Depuis deux ans, le GIE a rodé son fonctionnement. Aussi, ses participants envisagent de passer à la vitesse supérieure et d'utiliser la structure pour prospecter des marchés à l'exportation.