Le Château Saint-Christoly, situé dans le Médoc (Gironde), est forcé de prendre en main sa commercialisation en 2004. Aujourd'hui, il vend 25 % de sa production en direct. Sandrine Etienne-Héraud a pu compter sur ses parents et sa soeur.
'Maintenant, la famille voit l'avenir avec plus de sérénité. Il y a trois ans, mes parents se sont demandés si c'était une bonne chose de nous transmettre la propriété. A l'époque, l'exploitation n'était pas un cadeau ! ' Sandrine Etienne-Héraud ne risque pas d'oublier les années 2003 et 2004.
La fille aînée du Château Saint-Christoly, 29 ha, dans le Médoc (Gironde), se souvient : ' A cette période, nous vendions 95 % de notre production au négoce en rendu mise. Sur le millésime 2002, le courtier avec lequel nous faisions affaire, nous a appliqué une baisse des prix d'environ 30 %. Mais le millésime suivant, ce fut pire. Les propositions étaient en dessous de nos coûts de production. Nous avons décidé de ne pas vendre. ' La famille Héraud se retrouve avec 200 000 bouteilles sur les bras. Grâce à un château voisin qui a le statut de négociant, elle écoule 110 000 bouteilles. C'est une opération ponctuelle. ' Nous avons eu très chaud ', confie la jeune femme. La famille tire la leçon de l'expérience.
Plus question d'attendre le passage du courtier. Sandrine prend la commercialisation en main. ' Au départ, j'y suis allée au culot. J'ai commencé par démarcher les enseignes qui nous distribuaient via le négociant ', raconte-t-elle. Pour les convaincre, elle leur propose des animations dans leurs magasins de la région. L'argument fait mouche. C'est Cathy, la cadette, qui s'y colle, une fois par mois, le week-end. ' Les deux soeurs sont complémentaires, constate Martine, la mère. Sandrine a une grande facilité de contact. Elle est très persuasive. Elle ouvre les portes. Cathy est plus terrienne. Elle s'occupe de la vinification. Elle sait parler de son métier avec passion. '
Après la grande distribution, Sandrine s'attaque aux comités d'entreprise de la région. Elle est méthodique et persévérante. ' En moyenne, il faut dix coups de fil pour un rendez-vous et dix rendez-vous pour un contrat. ' Qu'importe, elle se prend au jeu. ' J'ai découvert un nouveau métier. C'est même devenu une vraie passion. '
Parfois, la chance sourit. ' Début 2004, j'ai décroché un premier contrat avec un restaurant, juste 60 bouteilles. Mais après cela, le bouche à oreille entre sommeliers a fonctionné tout seul. Cela m'a permis d'être sur la carte d'autres établissements assez facilement . ' Reste que la plupart du temps, il faut aller chercher le client. Entre novembre et avril, Martine Héraud et sa fille Cathy participent à huit salons. ' Ce sont des petites manifestations organisées sur un week-end à moindre coût ', explique Sandrine Héraud.
En trois ans, le château s'est constitué un fichier clients de 5 000 noms. La stratégie ' tous azimuts ' de la famille est analysée régulièrement. ' Il faut toujours vérifier la rentabilité d'une action commerciale, conseille la jeune femme. Il est vrai que le fait d'être une structure familiale nous a aidés. On est tous dans le même bain et on ne compte pas nos heures. ' Aujourd'hui, près d'une bouteille sur quatre est vendue en direct, le reste au négoce rendu mise. L'objectif des Héraud est de parvenir à un équilibre 50-50 en 2010.