Le 22 juin, Mariann Fischer Boel, commissaire européenne à l'Agriculture, présentera publiquement son projet de réforme de l'OCM. Bien avant cette date, une ébauche circulait déjà, remplie de propositions radicales.
A plusieurs reprises, Mariann Fischer Boel, commissaire européenne à l'Agriculture, a critiqué l'actuelle OCM. A ses yeux, elle entrave la compétitivité de la viticulture européenne. Elle n'empêche pas les cours de s'effondrer. Elle entretient des excédents qu'il faut éliminer à grands frais. ' L'Europe dépense 500 Meuros pour la distillation et seulement 1,4 Meuros pour la promotion ', a-t-elle déclaré le 29 mai, en marge d'un conseil informel des ministres de l'Agriculture. Ce jour-là, elle a annoncé qu'elle présenterait son projet de réforme le 22 juin.
Bien avant cette date, ses services ont fait circuler l'ébauche de son projet. Le moins que l'on puisse dire, c'est qu'il contient des propositions radicales. Ainsi, Mariann Fischer Boel propose de supprimer, dès le premier jour de la nouvelle OCM, toutes les aides à la distillation des excédents ou des prestations viniques, au stockage des vins et à l'utilisation des moûts concentrés rectifiés. Comme cette dernière mesure pénaliserait les régions méridionales, elle propose, en prime, d'interdire la chaptalisation. ' Il en résulterait des économies significatives et un accroissement des débouchés pour les moûts ', lit-on dans l'ébauche de la réforme.
La commissaire veut aussi supprimer l'interdiction des plantations nouvelles. Selon elle, cette mesure a un faible impact sur la limitation du potentiel de production alors qu'elle augmente les coûts, puisqu'il faut acheter des droits. La libéralisation du droit de plantation irait de pair avec la fin du régime d'arrachage. Elle n'entraînerait pas de dérapages dans les vignobles d'appellation ou de vins de pays, puisque les organisations professionnelles auraient le pouvoir de maîtriser les plantations nouvelles.
Quand prendrait-elle effet ? Trois options sont proposées : tout de suite, en 2010 ou en 2013. Cette dernière date semble avoir la préférence de Mariann Fischer Boel. L'Union européenne aurait alors le temps de lancer un ultime programme d'arrachage. L'objectif serait de supprimer 400 000 ha en cinq ans, avec une enveloppe de 2,4 mdeuros.
Dans son analyse de la situation de la viticulture, la commissaire mentionne les vins de table. Mais lorsqu'elle fait ses propositions, elle n'en parle plus. Selon elle, il ne devrait plus être question de VQPRD ou de vins de table. Elle propose de partager l'offre en deux grandes catégories : les vins avec indication géographique et ceux sans indication géographique. Ces derniers seraient en fait les vins de table, débarrassés de leur nom infamant, et pouvant afficher le cépage et le millésime sur les étiquettes. Avec eux, les producteurs de l'Union européenne pourraient donner la réplique aux vins de cépage des pays du Nouveau Monde. Les vins avec indication géographique seraient eux-mêmes subdivisés en deux catégories, l'une répondant à la réglementation sur les appellations d'origine protégée, l'autre à celle sur les indications géographiques de provenance.
Au rayon des pratiques oenologiques, la commissaire propose de reconnaître toutes celles déjà admises par l'OIV. Elle veut autoriser la vinification dans l'Union, de moûts importés de pays tiers et l'assemblage des vins de l'Union avec ceux des pays tiers, pratiques interdites à ce jour.
Les économies dégagées par la suppression des aides permettraient de ' mener avec vigueur une politique responsable de promotion et d'information. Toutes les possibilités offertes par la législation communautaire existante devraient être mises à profit pour mener des projets ambitieux de promotion dans les pays tiers. Des campagnes d'information sur la consommation responsable et modérée pourraient être envisagées au sein de l'Union '.
Par ailleurs, la commissaire veut réintroduire de la subsidiarité. Les Etats membres bénéficieraient d'une enveloppe qu'ils utiliseraient comme ils le souhaitent au sein d'un ensemble de possibilités : faire face à des catastrophes naturelles, couvrir les viticulteurs contre les baisses de chiffre d'affaires, payer des vendanges en vert, financer la restructuration... Ces propositions vont alimenter une multitude de discussions, jusqu'à l'adoption d'un texte définitif d'ici à la fin 2006.