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L'affaire Orgel conforte l'Inao dans ses compétences

La vigne - n°179 - septembre 2006 - page 0

En 2003, l'Inao interdisait le bâchage des vignes pour lutter contre le gel. L'inventeur de ce procédé l'a attaqué devant le Conseil d'Etat. Il estimait que l'institut avait dépassé ses compétences. Il a perdu.

Quel viticulteur n'a pas redouté ou subi les gelées de printemps ? Pour s'en défendre, une entreprise avait mis au point une couverture des vignes à l'aide d'une bâche synthétique, dénommée Orgel. Son système n'empêchait pas le végétal de respirer, et isolait les bourgeons et les ébauches de grappes de l'air ambiant. Après une démonstration sur une parcelle choisie pour son exposition exceptionnelle au froid, cette société avait conclu un marché en Champagne. L'acquéreur avait installé les bâches au-dessus de ses vignes.

Dès que l'Inao en a eu connaissance, il a saisi sa commission technique. L'institut voulait connaître les conséquences possibles de ce bâchage sur la qualité des raisins et savoir si cette pratique était acceptable pour les appellations d'origine. Sur la base du rapport établi par la commission, et après avoir entendu les syndicats de producteurs et l'inventeur du système de bâchage, par délibération des 26 et 27 février 2003, l'Inao décidait que toute pratique de bâchage des vignes, lors des périodes de gel, devait être exclue pour la production des vins d'appellation. Ainsi le procédé était condamné et, du même coup, le développement de l'entreprise créatrice de la toile Orgel mis à néant.
L'industriel n'avait qu'un espoir : obtenir de la justice l'annulation de la délibération du comité de l'Inao. S'agissant de contester cette décision, il porta sa requête devant le Conseil d'Etat. Il a avancé deux arguments : le comité n'avait pas compétence pour prendre pareille délibération ; il avait entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation.
Sur le premier argument, le Conseil d'Etat fera appel aux articles L. 641-6 et R 641-55 du code rural. Le premier de ces articles énonce les missions de l'Inao. Il est écrit que l'institut propose les ' conditions de production des produits ' susceptibles de bénéficier d'une indication géographique. Il est également noté que ' le contrôle des conditions de production des produits bénéficiant d'une appellation d'origine est placé sous la responsabilité de l'Institut national des appellations d'origine '.

Le second article conforte le rôle de l'Inao, le chargeant de donner ' tous avis sur les mesures techniques utiles à l'amélioration de la production et de la qualité ' des produits sous appellation.
De ce fait, le Conseil d'Etat a jugé qu'en prenant la délibération litigieuse, le comité national de l'Inao n'a pas excédé ses compétences, car le bâchage en question est de nature à produire des conséquences sur la qualité.
Il restait l'erreur manifeste d'appréciation du système Orgel invoquée par le requérant. Sur ce point, le Conseil d'Etat relève que ce procédé a ' une influence sur le méso-climat de la vigne et modifie ainsi artificiellement et temporairement les caractéristiques fondamentales des terrains concernés '. Il ajoute qu'avec raison, le comité avait relevé, à partir des constatations techniques, que le procédé n'avait pas fait la preuve de son efficacité absolue contre le gel.
Le litige soumis au Conseil d'Etat a été tranché en l'état de la législation existante à l'époque. Depuis, les lois du 23 février 2005 et 5 janvier 2006 ont modifié les textes concernant l'Inao. Malgré cela, on peut estimer que l'arrêt du Conseil d'Etat serait le même s'il était rendu aujourd'hui.

Référence : Conseil d'Etat, 2 novembre 2005, n° 260 691, société Bouillon. Décision disponible sur le site légifrance.gouv.fr

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