A contre-courant

Les hauts fonctionnaires de la santé ont les oeillères bien en place. Il y a deux mois, le directeur général de la santé affirmait vouloir réduire la consommation des buveurs modérés. Cette fois, c'est au tour de Philippe Lamoureux, directeur général de l'INPES de se distinguer. A l'issue des Etats généraux de l'alcool, il déclare : « En dessous des seuils de consommation fixés par l'OMS, nous n'avons pas mis en évidence l'existence d'un risque pour la santé. » Quelle découverte ! L'OMS recommande aux femmes de ne pas boire plus de deux verres par jour et aux hommes, pas plus de trois. Elle a fixé ces seuils à la lecture d'une multitude d'études scientifiques concordantes : ceux qui boivent deux à trois verres par jour vivent plus vieux et en meilleure santé que les abstinents. Philippe Lamoureux n'a pas dû lire ces études, ni l'article que vient de signer Roger Corder dans Nature, l'une des plus grandes revues scientifiques mondiales. Ce cardiologue britannique affirme que ce sont bien les régimes modérément arrosés de vins rouges tanniques - particulièrement de madiran - qui protègent des maladies cardiovasculaires. Mais l'esprit français, c'est d'aller à contre-courant. Nos Autorités sanitaires le prouvent à longueur de temps. Rameront-elles encore longtemps avant d'être épuisées par l'évidence ? De leur côté, les trois principaux responsables professionnels bordelais ont rendu les rames. Ils réclament les mêmes armes que leurs concurrents, c'est-à-dire les pratiques oenologiques internationales. Ils soutiennent le projet de réforme de l'OCM proposé par la Commission de Bruxelles, parce qu'il apportera davantage de liberté. Ils renoncent aux discours passéistes et aux réflexes syndicaux habituels. Maintenant que Bordeaux est sorti du bois, le débat sur l'avenir de la filière devrait se clarifier. Il est grand temps, car nous nous lassons tous de l'opacité de la situation actuelle.