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Les charbons sont tombés à pic

La vigne - n°182 - décembre 2006 - page 0

Pour les vendanges faites sous la pluie, l'utilisation des charbons oenologiques s'est avérée salutaire pour atténuer les mauvais goûts. Dans le Sud, ils ont été employés pour décontaminer les moûts vis-à-vis de l'ochratoxine.

Les charbons sont autorisés depuis décembre 2005 pour désodoriser et décontaminer les moûts. Heureuse coïncidence, car les vignerons en ont eu bien besoin pour le millésime 2006. L'Alsace, sévèrement touchée par les pluies durant les vendanges, y a largement fait appel pour supprimer les arômes de moisi des moûts. Une cave coopérative du Bas-Rhin a traité 80 % de ses moûts de pinot gris aux charbons. Arnaud Immelé, directeur de son laboratoire, explique : « Nous avons eu tout le panel de moisissures. Les charbons sont plus ou moins efficaces selon les types de champignons. Mais ils ont rendu de bons services. »
Les distributeurs de produits oenologiques ont été pris d'assaut lorsque les orages ont précipité la rentrée des raisins. Pascal Wagner, gérant du Laboratoire oenotechnique du vignoble, témoigne : « Les ventes de charbons ont été si fortes que nous étions en rupture de stock. » Concernant l'éventuelle réticence des vignerons face à ce type de traitement, souvent réputé lourd d'impact, Pascal Wagner explique : « Ils n'avaient pas le choix. Il fallait sauver la vendange pour que les vins soient vendables. »
Au laboratoire d'OenoFrance, à Eguisheim, Carole Lefebvre rapporte : « Nous avons vendu beaucoup de charbons pour éliminer les goûts de moisis-terreux et de champignons. Les charbons ont été insérés lors des débourbages, à des doses comprises entre 20 et 40 g/hl. Dans les cas extrêmes, deux collages ont été nécessaires. »

L'emploi des charbons n'a pas été systématique, mais s'est fait en fonction des dates de vendange, des niveaux de tri et d'équipement des caves pour apporter les raisins au pressoir.
Même si les charbons ont encore mauvaise presse auprès de certains professionnels, ils ont visiblement apporté de réels résultats dans les cas difficiles où la vendange était très altérée.
En Languedoc-Roussillon, les charbons ont permis de lutter contre l'ochratoxine. Mathieu Dubernet, du laboratoire du même nom, explique : « Après trois années d'essais sur l'efficacité des charbons vis-à-vis de l'OTA, nous avons validé nos résultats cette année dans les caves. Selon leur qualité, ils en éliminent 50 à 90 %. Une fois la contamination détectée, les caves ont traité les raisins presque systématiquement. Les parcelles concernées sont celles régulièrement atteintes, où la lutte au vignoble est insuffisante. Les lots sont isolés dès la réception et vinifiés séparément. La dose de charbons la plus utilisée est de 50 g/hl. Les charbons présentent un intérêt supplémentaire pour ces matières premières contaminées, souvent très concentrées et rustiques. Ils affinent leur structure. »
Dans les autres vignobles, les charbons ont été employés de façon plus ponctuelle : en Beaujolais contre la géosmine, en Val de Loire contre les goûts de moisi et les arômes phénolés des blancs, et parfois en Provence pour traiter les moûts de presse légèrement oxydés, issus des rosés de pressurage direct.

Le monde vinicole manque encore de recul face à l'utilisation des charbons. Des essais sont en cours pour comparer les types et déterminer les doses. « Nous allons tester l'efficacité des charbons par rapport à celle de la polyvinylpirolidone, que nous utilisons habituellement », explique Régine Dupeyron, directrice du Centre oenologique de Soussac (Gironde). Les charbons sont moins onéreux. Un avantage non négligeable par les temps qui courent.

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