Retour

imprimer l'article Imprimer

BONNES PRATIQUES - SÉCURITÉ

EPI Des consignes plus précises

La vigne - n°201502 - février 2015 - page 14

Le port d'équipements de protection individuelle est indispensable pour vous préserver des risques de contamination. Pour les nouveaux produits, à la demande de l'Anses, les firmes donnent désormais des consignes spécifiques.
POUR CHAQUE PRODUIT NOUVELLEMENT HOMOLOGUÉ, l'opérateur sait désormais quels équipements porter pour chaque tâche. Le port du masque n'est pas systématique, tout dépend de la toxicité du produit utilisé. © P. ROY

POUR CHAQUE PRODUIT NOUVELLEMENT HOMOLOGUÉ, l'opérateur sait désormais quels équipements porter pour chaque tâche. Le port du masque n'est pas systématique, tout dépend de la toxicité du produit utilisé. © P. ROY

Depuis fin 2013, l'homologation des nouveaux produits est assortie de consignes plus précises sur les équipements de protection individuelle (EPI) qu'il faut porter lorsqu'on les manipule. On sait désormais pour chacun d'entre eux quels types de gants, combinaison, protection faciale ou oculaire il faut mettre pour être bien protégé lors de la préparation de la bouillie, du traitement (selon que l'on dispose ou pas d'un tracteur avec cabine), puis au moment du lavage du pulvérisateur. Ces informations sont précisées sur les étiquettes des nouveaux produits et dans la base de données e-Phy du ministère de l'Agriculture, qui recense tous les produits homologués. Ceux qui ont récemment fait l'objet d'une extension d'usage ou d'un réexamen par l'Anses portent, eux aussi, ces nouvelles préconisations.

Auparavant, seuls la MSA et l'UIPP (Union des industries de la protection des plantes) délivraient des recommandations sur les EPI. Elles étaient générales, quel que soit le produit. Dans la base e-Phy, elles sont désormais spécifiques à chaque produit. Ce changement émane du ministère de l'Agriculture. Depuis avril 2013, l'Anses (Agence de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail) demande aux firmes phytosanitaires d'inclure dans leur dossier de demande de mise en marché, des consignes sur les EPI qu'elles estiment appropriés pour le produit concerné. L'agence examine ensuite la validité de ces préconisations sur la base de résultats d'essais et de modèles. À partir de là, elle rend un avis qui est validé ou pas par le ministère de l'Agriculture.

Les nouvelles consignes diffèrent donc d'un produit à un autre. Et même entre deux produits qui ont le même classement toxicologique. Par exemple, pour le fongicide Luna Sensation (Bayer Cropscience), lancé en 2014 et classé nocif, il est noté sur l'étiquette que l'utilisateur doit porter, pendant la préparation de la bouillie et le nettoyage externe du pulvérisateur, des gants de type nitrile (norme EN 374-3), une combinaison de travail en coton et polyester (35 %/65 %) de 230 g/m² de grammage au moins avec traitement déperlant, et un tablier à manches longues de catégorie III type 3. Lors du traitement, si l'application est réalisée avec un tracteur sans cabine, la firme ne recommande que le port de gants et d'une combinaison. À aucun moment, elle ne préconise de porter un masque. En revanche, pour un autre fongicide classé nocif, le Cabrio Top (BASF Agro), en plus des gants, de la combinaison et du tablier, pendant la préparation de la bouillie, l'utilisateur doit aussi porter des lunettes de sécurité et des bottes. En cas d'application sans cabine, il doit être protégé par des gants, une combinaison, des lunettes et des bottes.

Ces divergences dans les recommandations sont liées au type de formulation (granulés dispersibles dans l'eau pour Cabrio, suspension concentrée pour Luna) et aux risques inérants à la composition des produits, lesquels renferment des matières actives bien différentes.

Parfois, les consignes peuvent surprendre. C'est le cas pour Esquive, un produit de biocontrôle non classé, distribué par Bayer. Son étiquette précise, entre autres, qu'il faut porter des gants, une combinaison, une blouse par-dessus la combinaison, des lunettes de sécurité, des bottes et un demi-masque filtrant pendant la préparation de la bouillie. « Cette préparation est une poudre mouillable et contient du trichoderma atroviride. Elle peut entraîner une réaction de sensibilisation », justifie l'Anses.

Ces nouvelles consignes vont-elles inciter les viticulteurs à mieux se protéger ? « Ils restent beaucoup de progrès à faire en terme de port des EPI dans les exploitations, reconnaît Benjamin Alban, conseiller viticole à la chambre d'agriculture de Saône-et-Loire. Les nouvelles recommandations sont donc une bonne chose car elles sont plus précises, mais je pense que les vignerons qui se protègent habituellement ont une procédure unique et ne vont pas regarder les préconisations en détail selon chaque produit. »

De leur côté, les conseillers en prévention de la MSA militent toujours pour une protection maximale. Bruno Farthouat, conseiller à la MSA Charentes, préconise ainsi « une protection globale quel que soit le produit, avec gants, combinaison, tablier, bottes et masque obligatoire pendant la préparation de la bouillie, et gants, combinaison, bottes et masque pour l'application sans cabine ». Outre les masques, il existe aussi des cagoules ventilées avec un système de filtration, qui sont plus agréables à porter que le masque intégral.

Même discours à l'UIPP. Le Guide bonnes pratiques phytosanitaires en viticulture - Sécurité des utilisateurs, issu du projet Safe Use Initiative, préconise lors de la préparation de la bouillie de porter une combinaison de travail, un tablier, des bottes, des gants, « un écran facial ou des lunettes de sécurité et, si nécessaire, en fonction des phrases de risques des produits, un EPI pour les voies respiratoires ». Si le traitement est réalisé avec un tracteur sans cabine, ce que le guide déconseille, le vigneron doit être équipé de gants, bottes, combinaison de catégorie III type 5/6 (et non d'une combinaison de travail), et masque intégral ou cagoule ventilée.

Pour l'heure, il n'existe donc pas de recommandations uniques entre la MSA, les pouvoirs publics et l'UIPP. Mais cela devrait bientôt changer. « Nous travaillons avec l'Anses et les services de l'État sur la clarification des préconisations et leur normalisation, indique Julien Durand-Réville, responsable de la santé à l'UIPP. L'idée est aussi de confronter les recommandations aux réalités du terrain pour améliorer les choses. » En tout état de cause, ne négligez pas le port des EPI. N'oubliez pas, en tant qu'employeur, qu'il est de votre responsabilité de fournir à vos salariés les équipements nécessaires, et de veiller à ce qu'ils les portent.

L'infographie de la page suivante indique les normes auxquelles doivent répondre les EPI.

Encore beaucoup d'efforts à fournir

L'Anses a rendu un avis en octobre dernier sur les équipements de protection individuelle pour les produits phyto. L'agence a enquêté auprès de plus de 1 400 agriculteurs, dont 400 viticulteurs, afin de voir quels équipements de protection ils portent lors des différentes phases de manipulation des produits phyto : préparation de la bouillie, traitement (avec ou sans cabine), nettoyage du pulvérisateur. Premier constat : les opérateurs ne portent pas systématiquement d'EPI. De plus, lorsqu'ils en mettent, 88 % d'entre eux portent un vêtement de travail plutôt qu'une combinaison de catégorie III. Les raisons ? Le vêtement de travail est plus confortable que les équipements normalisés de protection cutanée. Et plus la combinaison est étanche à l'eau et à l'air, moins les agriculteurs portent ce type d'équipement en raison de son inconfort thermique.

Selon l'Anses, « le recours à ces vêtements de travail comme moyen de protection nécessite la validation de normes sur la base desquelles la performance de ces vêtements pourra être certifiée ».

Autre constat : seuls 48 % des agriculteurs sondés déclarent nettoyer régulièrement leur protection et parmi les 57 % utilisant des combinaisons à usage unique, très peu les jettent en fin de journée. L'Anses observe que les agriculteurs sont plus conscients qu'auparavant de la nécessité de se protéger, notamment grâce au Certiphyto, mais souligne qu'il « reste encore d'importants efforts à accomplir ».

Cet article fait partie du dossier

Consultez les autres articles du dossier :

L'essentiel de l'offre

Voir aussi :