Retour

imprimer l'article Imprimer

GUIDE PHYTOS - ENVIRONNEMENT

Produits alternatifs Un marché de niche

La vigne - n°201602 - février 2016 - page 10

Les ventes de produits dits « alternatifs » restent marginales. Mais elles progressent.
DE PLUS EN PLUS DE VIGNERONS EN VITICULTURE RAISONNÉE recherchent des produits alternatifs respectueux de l'environnement, de leur santé et de celle de leurs salariés. © C. WATIER

DE PLUS EN PLUS DE VIGNERONS EN VITICULTURE RAISONNÉE recherchent des produits alternatifs respectueux de l'environnement, de leur santé et de celle de leurs salariés. © C. WATIER

Les fongicides alternatifs représentent aujourd'hui un marché de niche. Du moins pour le moment. « Ce type de produits concerne 10 à 15 % de nos ventes. Mais ils progressent dans un contexte de restriction des produits conventionnels », commente Yves Meschberger, d'Alsace Appro. « Ce sont des solutions montantes qui trouvent leur place dans les programmes, avec un accompagnement technique », estime pour sa part Éric Capredon, expert technique vigne chez Euralis. Ce que confirme David Ray, d'Ecovigne : « De plus en plus de vignerons en viticulture raisonnée recherchent des produits alternatifs respectueux de l'environnement, de leur santé et de celle de leurs salariés ». Effectivement, certaines solutions séduisent. D'autres doivent encore trouver leur place. Petit tour d'horizon.

Prev-Am

Il séduit sur le terrain

Prev-Am ou Limocide, de Vivagro, se compose d'huile essentielle d'orange douce. Il est homologué contre le mildiou et l'oïdium. Lancé en 2012, ce produit de biocontrôle a fait ses preuves sur le terrain. « Je suis emballé par ses résultats, je n'ai jamais eu d'échos négatifs, indique Jean-Paul Raoux, responsable technique vigne chez Charrière Distribution, dans le Gard. Contre l'oïdium, en synergie avec le soufre, il permet d'éradiquer les premiers symptômes. »

«Le Prev-Am est aussi efficace pour brûler les spores de mildiou », ajoute Bernard Taïx, directeur technique des Établissements Magne, dans l'Hérault. C'est la raison pour laquelle Éric Capredon, expert technique vigne chez Euralis, en a vendu pas mal en 2015 « en curatif sur mildiou déclaré ».

Pour autant, les distributeurs n'en commercialisent pas des volumes importants. « Vu les résultats, on devrait en vendre davantage, mais les vignerons parviennent à contrôler l'oïdium avec seulement du soufre. Prev-Am est en outre assez cher », commente Jean-Paul Raoux. « Nos ventes de ce produit représentent environ 2 000 ha par an. Il n'existe pas de forte demande spontanée », confirme Bernard Taïx.

Chez Vivagro, on assure que les utilisations progressent. « Sur le marché français, Prev-Am est appliqué à ce jour sur environ 80 000 ha de vignes, assure Fabrice Lemarchand, le cogérant de la société. Cette année, nos volumes de ventes ont bondi de plus de 30 % par rapport à la campagne précédente. Les vignerons et les techniciens connaissent les performances de Prev-Am en curatif, mais cette année, ils l'ont aussi davantage positionné en préventif. »

Botector, Armicarb, Sérénade

Encore peu utilisés

Botector contient deux souches d'Aureobasidium pullulans, un champignon antagoniste du botrytis. Il a été lancé par De Sangosse en 2012. Cette même société a mis sur le marché en 2013 Armicarb, un produit à base de bicarbonate de potassium, autorisé contre le botrytis et l'oïdium.

De son côté Bayer commercialise Sérénade Max, un antibotrytis formulé à partir d'une souche de Bacillus subtilis. Aux dires des distributeurs, les vignerons les utilisent peu. « Nous vendons peu le Sérénade, et nous avons également peu de demandes pour Botector et Armicarb », témoigne David Ray d'Ecovigne.

Yves Meschberger, technicien chez Alsace-Appro, confirme : « Armicarb ne représente pas beaucoup de ventes chez nous. Ce produit fonctionne mais le vigneron doit savoir bien le positionner. »

En Gironde, Éric Capredon, d'Euralis, est satisfait des résultats d'Armicarb, en viticulture bio comme en conventionnelle : « il a un effet stoppant sur les premiers symptômes d'oïdium. Mais nous ne l'avons référencé que récemment. Nous préconisons aussi le Sérénade. En revanche ,nous ne proposons pas le Botector, tout simplement pour des problèmes de logistique : c'est un produit qui doit se conserver au froid ». En Indre-et-Loire, Anne-Cécile Kaspryk, de Vitivini, juge pour sa part que Botector et Armicarb « n'ont pas un bon rapport efficacité-prix, même s'ils ont leur place sur le marché des antibotrytis car ils peuvent être appliqués à la veille des vendanges ».

De Sangosse n'a pas souhaité communiquer les parts de marché de Botector et Armicarb. « Botector se développe chaque année, et Armicarb également, avec des usages qui vont encore progresser sur l'oïdium », souligne simplement Johanna Sigel, chef de marché vigne chez De Sangosse. Quant à Sérénade Max, « il est appliqué sur 2 000 à 4 000 ha selon l'année, principalement dans le mois précédant la récolte et par des vignerons conventionnels », affirme Jean-Luc Dedieu, chef de marché vigne chez Bayer.

Esquive WP

Doit encore faire ses preuves

Esquive WP a été homologué en 2009 contre l'eutypiose, puis en 2014 contre l'esca et le BDA. Il contient la souche de Trichoderma atroviride I 1237. Il est commercialisé par Bayer. « Nous en vendons de très petites quantités auprès de vignerons très touchés par les maladies du bois. Mais ses résultats ne sont pas encore probants », explique David Ray, d'Ecovigne. « Ce produit est le seul homologué contre l'esca mais il ne représente pas de gros volumes de ventes. Les vignerons sont assez dubitatifs quant à son efficacité », confie Éric Capredon, d'Euralis.

Cependant, chez Bayer, Jean-Luc Dedieu affirme que « les ventes d'Esquive ont fortement progressé depuis qu'il dispose d'une AMM sur l'ensemble des maladies du bois ».

QUOI DE NEUF ? DE NOMBREUX PROJETS EN COURS

- Sumi Agro attend l'homologation de 3 AEY, un antibotrytis à base de terpènes micro-encapsulés (géraniol, eugénol et thymol). Mais d'autres produits de biocontrôle devraient arriver prochainement sur le marché.

- De Sangosse a déposé une demande d'homologation pour un anti-oïdium alternatif.

- Koppert développe une substance à base d'huile de paraffine et précise que « les essais mis en place en vigne contre l'oïdium sont très positifs et prometteurs ».

- Vivagro travaille sur des fongicides à base d'extraits végétaux.

- Bayer a des projets sur des produits contenant des micro-organismes.

Seuls les phosphites homologués sont autorisés

Des produits à base de phosphonates sont commercialisés en tant qu'engrais foliaires. C'est illégal. Le ministère de l'Agriculture l'a rappelé en 2015. « Aucun produit à base de ce type de substance n'a été à ce jour homologué comme matière fertilisante », indique-t-il. Le ministère appelle donc à être vigilant face à des produits vendus sous la norme NFU applicable aux engrais et présentés comme protecteurs contre les maladies fongiques. Si ces produits ont des propriétés fongicides, ils sont soumis à une obligation d'autorisation de mise sur le marché (AMM). Utiliser en tant que fongicide un produit sans AMM pour traiter des végétaux est une infraction passible de 6 mois d'emprisonnement et de 150 000 euros d'amende. Les seuls fongicides à base de phosphonates homologués en vigne sont le LBG 01F34, le Mildicut et les produits à base de fosétyl-aluminium.

Cet article fait partie du dossier

Consultez les autres articles du dossier :

L'essentiel de l'offre

Voir aussi :