MILDICUT fait l'unanimité
De l'avis des distributeurs et des conseillers viticoles, Mildicut est une vraie nouveauté. « Il va apporter un plus au niveau de la protection des grappes. Tous les distributeurs champenois l'ont référencé », annonce Marie-Laure Panon, du CIVC, l'interprofession champenoise. « Ce produit renouvelle la gamme des systémiques, car c'est le prephosphite non aluminium homologué en France. Il comprend aussi un nouveau contact, avec la cyazofamide. Il offre une grande régularité d'efficacité, car je n'ai jamais vu d'essais qui ont décroché. Et c'est une alternative aux fongicides de la famille des QoI et à celle des CAA », s'enthousiasme Thierry Favier, de la CAPL (Coopérative agricole Provence Languedoc).
Action préventive
Mildicut associe le disodium phosphonate et la cyazofamide. Le disodium phosphonate appartient à la même famille que le fosétyl-Al. C'est donc un systémique qui stimule les défenses de la plante. Et il agit aussi directement sur le mildiou en réduisant sa croissance et en inhibant la sporulation.
Mais la véritable nouveauté est la cyazofamide. C'est une matière active de contact appartenant à une nouvelle génération qui résiste mieux au lessivage. « Elle diffuse de cellule à cellule sur la feuille. Elle procure une meilleure protection qu'un folpel », indique Eric Chantelot, de la société Belchim Crop Protection. La cyazofamide est en outre la seule représentante de la famille des QiI. A ce jour, elle ne connaît aucune souche résistante sur aucune culture. Et selon la firme, il n'existe pas de résistance croisée avec les QoI. Mildicut s'emploie en encadrement de floraison, à la cadence de quatorze jours, même en cas de forte pression, selon Belchim. C'est un produit préventif. Il n'a pas d'effet de rattrapage comme le cymoxanil. Il faut donc l'appliquer avant le début des contaminations.
« C'est un vrai “quatorze jours” mais il faudra quand même se méfier en cas de forte pression, tempère Thierry Favier, qui trouve d'autres qualités au produit. Nous l'avons testé en condition réelle chez un viticulteur. Nous avons vu qu'en mélange, il ne pose pas de problème. A contrario, le fosétyl est souvent capricieux. Il ne supporte pas trop certains soufres, certains antioïdiums formulés en granulés dispersables (WG) ou concentrés solubles (SL). Il y a un ordre à respecter au moment de la mise en cuve. Ce n'est pas le cas pour Mildicut. Ce produit devrait devenir une bonne référence. Nous allons le conseiller en encadrement de floraison : juste avant ou juste après fleur, entre deux CAA. » Gérard Garnier, du négoce Fortet Dufaud, en Charente, l'a également référencé. « Je connais la cyazofamide sur pomme de terre et ça marche très bien. Sur cette culture, c'est le produit le plus haut de gamme. Cette année, nous allons l'intégrer gentiment dans nos programmes, à raison d'une seule application au stade floraison, fin floraison. Nous sommes très méfiants vis-à-vis des résistances. Nous faisons très attention, car nous ne voulons pas tuer ce nouveau produit. »
« Il réconcilie la technique et le réglementaire »
Tristan des Ordons, des Etablissements Touzan, en Gironde, l'a ajouté à sa gamme : « Car il va nous permettre de réconcilier la technique et le réglementaire. En effet, en associant Mildicut à un antioïdium à base de métrafénone, nous avons un couple de produits non classés, avec un délai de rentrée (DRE), dans les parcelles, de six heures. Nous allons le conseiller au moment des relevages et des épamprages, une période où les viticulteurs ont le plus besoin de DRE très courts, c'est-à-dire un peu avant la fleur, pendant et un peu après. Nous conseillerons une à deux applications maximales, non consécutives », précise-t-il.
La seule chose que regrettent certains distributeurs c'est le prix du Mildicut. A 51,75 €/ha en moyenne (prix donné par Belchim), cela risque d'être une barrière pour le Sud-Est.
« Si nous avons une grosse année à mildiou, les viticulteurs investiront dans ce produit haut de gamme. Une année normale, ce sera plus difficile », considère Thierry Favier. La société Belchim le sait. « Nous avons effectivement un prix élevé. Mais c'est un choix pour mettre en avant le caractère haut de gamme de ce produit », justifie Eric Chantelot.
ARCO DTI : Des avis partagés
Ce nouveau produit de BASF Agro se compose de diméthomorphe et de dithianon. « Nous avons travaillé cette association pour apporter au marché une nouvelle solution multisite afin d'améliorer la gestion des résistances », explique Catherine Gauthier, responsable marketing vigne chez BASF.
Le dithianon n'est pas une nouvelle matière active. Il est très utilisé en arboriculture pour lutter contre la tavelure. Il avait été homologué il y a quelques années contre l'excoriose et le mildiou de la vigne dans une formulation qui a disparu. « Il n'était pas très utilisé, car il ne correspondait pas au marché de l'époque », rapporte Catherine Gauthier. Là, selon BASF Arco Dti amène un plus. « C'est un produit préventif et curatif. Sa période d'application de prédilection va des grappes séparées à fin floraison. Dans tous les essais, nous avons constaté qu'il tenait bien quatorze jours, même lors des années difficiles comme 2007 ou 2008. En effet, lorsqu'on applique le produit sur les ébauches foliaires, les propriétés de diffusion du diméthomorphe et la bonne résistance au lessivage procurent une efficacité correcte jusqu'à quatorze jours. Mais en cas de forte pression ou de pousse active de la vigne, il faut resserrer la cadence », indique Catherine Gauthier.
Thierry Favier, de la CAPL, va le conseiller lors de cette campagne. « Par rapport au Panthéos (diméthomorphe + folpel), une référence du marché, c'est un vrai quatorze jours. Cette année, nous ne préconiserons que deux CAA dans les programmes : Arco Dti en fera partie. Nous le conseillerons, soit avant fleur pour nettoyer la parcelle si le viticulteur a démarré sa protection un peu tard, soit après fleur en faisant attention à la sélectivité sur raisins de table. »
Gérard Garnier, des établissements Fortet-Dufaud, est plus réservé. « Pour moi, c'est un très bon produit, mais ce n'est pas une révolution. Je ne pense pas qu'il amène un plus par rapport au pack Forum (diméthomorphe + métirame zinc) . BASF annonce que l'on peut aller jusqu'à 40 mm d'eau sans que le produit soit lessivé, mais je reste dubitatif. J'attends de voir le comportement du produit sur le terrain. Le dithianon est une matière active que l'on ne connaît pas sur vigne. Je sais qu'en arboriculture c'est un bon produit de contact, mais je reste prudent. »
Tristan des Ordons, des établissements Touzan, précise : « Même si ce produit paraît intéressant, nous ne l'avons pas référencé pour une question réglementaire. En effet, nous n'intégrons pas à notre gamme les produits dont la ZNT est supérieure à 5 m. Or, celle de Arco Dti est de 20 m. En plus, nous ne sommes pas fans des CAA. »
CAA : l'embouteillage
Fin 2009, Phyteurop a obtenu l'homologation de Valis F (valifénalate + folpel). Certis vient de lancer Vincare (benthiavalicarbe + folpel). Et, BASF, Arco Dti (voir ci-dessus). Ces trois nouveautés sont des CAA. Désormais, cinq matières actives de cette famille sont en vente, entrant dans plus d'une vingtaine d'antimildious. Or, la résistance du mildiou aux CAA a explosé. La note nationale mildiou 2010 indique : « Dans les parcelles où la résistance est fortement installée, l'efficacité des spécialités à base de CAA est directement liée à la nature et à la dose du partenaire associé. L'utilisation des produits à base de CAA doit être réduite : une à deux applications maximales par an, n on consécutives, et sauf sur attaque déclarée. »
Une bouillie bordelaise liquide
Autre nouveauté de l'année : le Cuproxat SC de Nufarm. C'est une bouillie bordelaise liquide qui titre 190 g/l de cuivre métal sous la forme de sulfate de cuivre tribasique (TBCS). Il est homologué à 3,95 l/ha sur mildiou, dose à laquelle il apporte 750 g/ha de cuivre. « Il est plus facile à doser que les autres bouillies bordelaises. Il ne bouche pas les rampes. Et il reste stable lors du stockage », argumente Simon Moyal de Nufarm. Le Cuproxat SC ne contient que de la brochantite, la forme de cuivre la plus noble de la bouillie bordelaise. Après application, il est plus rapidement disponible qu'une bouillie bordelaise classique. Mais il n'a pas l'effet de choc des hydroxydes. Prix : 23 à 25 €/ha.
Autres nouveautés
Nufarm lance la première association de zoxamide et de cuivre, avec Amaline Flow. Ce produit s'utilise en postfloraison à la dose de 2,5 l/ha, tous les dix à douze jours. Prix : 30 à 35 €/ha. Makhteshim Agan France propose Hidalgo star : 40 % de fosétyl-Al et 40 % de folpel, homologué sur mildiou à la dose de 3,75 kg/ha.
Prix : 53,25 €/ha.
Sapec Agro, le troisième opérateur du marché phytosanitaire de la péninsule ibérique s'attaque au marché français. Ce fabricant, spécialisé dans les produits génériques, démarre avec deux cuivres : Hydromicron Saldeco (cuivre de l'hydroxyde) et la bouillie bordelaise Saldeco (sulfate de cuivre).
Le Point de vue de
Bernard Molot, de l'IFV pôle Rhône-Méditerranée
« Mildicut est bien adapté aux situations à hauts risques »
« J'ai testé Mildicut en 2004,2005 et 2006 dans des essais d'efficacité où le produit est utilisé seul durant toute la campagne et dans des essais de programme. Dans ce dernier cas, on utilise le produit avec d'autres fongicides, à raison de 3 à 5 traitements par an. Dans tous les cas, je l'ai comparé à la référence CEB à la cadence de quatorze jours (Mikal : fosétyl-Al + folpel). Les tests ont été effectués sous brumisation, avec des contaminations artificielles réalisées à partir du onzième jour après le traitement précédent. C'est le moment où les produits peuvent être mis en défaut. Sur les témoins non traités les grappes étaient totalement détruites. Dans ce contexte, l'efficacité de Mildicut a été comparable voire supérieure à la référence CEB Mikal. Sa cadence de quatorze jours semble une réalité. Mildicut semble tenir, y compris en cas de forte pression, ce qui est nouveau. C'est donc un produit particulièrement adapté aux situations à hauts risques. Jusqu'à présent, on pouvait traiter à cette cadence avec certains produits, en général systémiques, quand tout allait bien. Mais il était impératif de resserrer ce rythme dès que la pression parasitaire augmentait. J'ai également testé Arco Dti de BASF en essai d'efficacité. Ce produit, utilisé à une cadence de quatorze jours, s'est révélé globalement comparable à la référence CEB Mikal. Je m'attendais à ce qu'il soit moins efficace sur feuilles, mais cela n'a pas été pas le cas, ce qui est assez surprenant puisque le diméthomorphe n'est pas un produit systémique. Si cela se confirme sur le terrain, ce produit permettrait d'avoir une protection légèrement plus longue que les autres produits de la famille des CAA. »