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DOSSIER - ŒNOTOURISME : Les régions vont de l'avant

BERGERAC La diversité paie

Colette Goinere - La vigne - n°227 - janvier 2011 - page 50

Les domaines et caves de Bergerac proposent toutes sortes d'animations pour faire découvrir leurs vins et leur ancrage dans leur terroir. Avec toujours beaucoup de simplicité.

Des casse-croûtes vignerons, des randonnées pédagogiques, des concerts dans les châteaux : il y en a pour tous les goûts à Bergerac. « La notoriété de nos vins n'est pas forte. Mais les vignerons ont compris que le consommateur était demandeur de produits du terroir, de patrimoine, de culture et de tourisme », rappelle David Fourtout, à la tête du vignoble des Verdots, à Conne-de-Labarde (Dordogne).

Venant de Saint-Emilion, sa famille a consenti d'importants efforts pour créer cette exploitation à Bergerac. Elle a dû creuser dans la roche pour établir une cave de vieillissement. Au cours de ce lourd chantier, elle a découvert la rivière souterraine dénommée le Verdot qui a donné son nom à l'exploitation. Désormais, on peut la voir et l'entendre couler lorsqu'on visite le chai.

Au-dessus de la cave s'élève un bâtiment flanqué de deux tours. L'une d'entre elles abrite des chambres d'hôtes. Tous les étés, deux fois par semaine, pour 5 € par personne, c'est casse-croûte entre 11 et 13 heures. Visite du chai, dégustation des vins accompagnés de pâtés maison, de boudins et de fromages de chèvres. Un moment de découverte des saveurs de la région.

Au château Haut Garrigue, à Saussignac, Caroline et Sean Feely ont opté pour les « tapas périgourdines » : magrets séchés, truite fumée et fromages accompagnent la dégustation de cinq vins de la propriété. Une formule à 40 € par touriste qui inclut, pendant trois heures, une bonne dose de formation. « Nous recevons des Anglais et des Américains qui ont besoin des explications sur la complexité des vins français. » Cette année, 70 étrangers ont suivi sa formation.

L'équipe de rugby est un vecteur d'image

Reste que l'œnotourisme n'est pas juteux à tous les coups. L'opération « Les sentiers du vin bio » menée par Caroline Feely et deux autres viticulteurs, va s'arrêter. Ils proposaient aux visiteurs de démarrer du château Haut Garrigue pour serpenter dans les vignes sur 6 km afin de rejoindre les deux autres propriétés, de déguster les vins et de piqueniquer en cours de route. La promenade terminée, ils les ramenaient à leur point de départ, le tout pour 6 € par personne. A ce tarif-là, l'opération n'était n'est pas rentable. Caroline Feely a revu le concept. Version plus modeste : une promenade de 20 minutes dans son vignoble, suivie d'une dégustation de deux vins. C'est gratuit et ça marche. « Les Français sont surpris par la qualité des Bergerac. C'est une vraie découverte pour eux par rapport aux Bordeaux. »

A Thénac, Thierry Piazzetta, du domaine Les Brandeaux, joue l'œnotourisme avec le ballon ovale. Ce viticulteur est président du Rugby club des vignerons et amis des vins de Bergerac, dénommé « Le XV de la grappe » : des joueurs amateurs et un noyau de sympathisants qui n'oublient jamais d'emmener des bouteilles lors d'un match. A l'issue de chaque partie, ils proposent une dégustation gratuite de leurs vins aux spectateurs. En juin, ils tiennent une bodega dans le vieux Bergerac. « Notre équipe de rugby est un vecteur d'image et permet une vraie reconnaissance de nos vins », répète Thierry Piazetta.

A la cave de Monbazillac, on fait de l 'œnotourisme , depuis les années soixante, date à laquelle cette coopérative rachète le château du village et ses vignes. Depuis, il ne désemplit pas. 50 000 visiteurs cette année. Et les bouteilles de Monbazillac partent comme des petits pains dans la boutique attenante. « Depuis dix ans, les ventes de la cave augmentent de 3 à 5% par an grâce aux efforts faits dans l'œnotourisme », souligne Gilles Bartoszek, directeur de la cave.

Toutes ces animations et ces caves ouvertes sont recensées par le nouveau site internet vins-bergerac.fr. Elles figurent aussi sur la carte de la route des vins (140 viticulteurs dont 7 caves coopératives), réalisée par l'interprofession et diffusée à 80 000 exemplaires dans les offices de tourisme et dans le réseau Destination vignoble.

Malgré cela, il y a encore du chemin à faire. « Nous devons coller davantage aux attentes des touristes qui veulent partager, découvrir, apprendre », estime Vincent Bergeon, directeur du CIVRB. Un cabinet planche sur une idée pour étoffer l'offre de la maison des vins de Bergerac avec une nouvelle thématique différente de la viticulture. Autre projet : renforcer les liens avec les appellations voisines de Duras et Cahors afin de fluidifier les flux de touristes en Quercy et Périgord. Bref, être concurrents mais complémentaires.

50 000

50 000 visiteurs payants par an pour le château de Monbazillac. Cette demeure seigneuriale de la Renaissance est la cave la plus visitée de la région. Cet été, 500 enfants ont suivi une séance d'initiation aux métiers et au cycle de la vigne pendant que leurs parents visitaient le château.

Le Point de vue de

Jean-Paul Landat, domaine du Siorac à Saint-Aubin-de-Cadelech (Dordogne), 27 ha en AOC Bergerac et Côtes-de-Bergerac, blancs, rosés, blancs secs, rouges, moelleux

« J'insiste sur l'alchimie entre la terre, la plante et l'intervention de l'homme »

Son offre

« De mi-juillet à mi-septembre, nous proposons les mardi matin et jeudi après-midi, la découverte de notre métier et notre terre. Tout commence par une balade dans nos champs de céréales. Puis nous déambulons entre les rangs de vigne. Les touristes anglo-saxons posent des questions techniques, les Français s'intéressent à l'environnement. Sur les parcelles de Sauvignon, je les invite à observer les grappes trapues. J'évoque l'effeuillage, le choix de la date de récolte. Nous traversons le village de Saint-Aubin-de-Cadelech. Nous repartons dans nos vignes qui donnent des blancs moelleux. Les rangs sont enherbés. J'insiste sur l'importance du travail du sol et sur cette alchimie entre la terre, la plante et l'intervention de l'homme. Retour au domaine. Direction : le chai. J'explique la fermentation, la macération. Un petit tour dans la partie expédition avec l'étiquetage. Enfin, dégustation dans notre salle d'accueil où nous exposons les produits du GIE que nous avons créé en 1986 avec cinq producteurs : foie gras, pruneaux, noix, viande de porc et poulet. J'offre l'apéritif. Chacun peut manger une tartine de rillettes de canard avec notre Bergerac blanc. »

Son organisation

C'est Jean-Paul Landat qui accueille les visiteurs. Il fait connaître ses demi-journées découvertes, grâce aux mailings adressés à ses clients, aux offices de tourisme et par le réseau Destination vignoble. « Notre salle d'accueil est dotée d'un bar et d'une boutique. Le tout sur 200 m2. Sur les présentoirs, chaque bouteille est accompagnée d'une fiche descriptive indiquant le cépage, l'accord mets et vins et la durée de conservation. Pour tout achat réalisé après la visite découverte, nous offrons 5 % de remise. Nous maintenons cette offre pendant quinze jours, si le touriste revient acheter l'un des produits de notre GIE. A la fin de la dégustation, j'invite chaque visiteur à déposer un bulletin avec son nom et ses coordonnés dans une urne pour participer à une tombola. C'est une façon d'alimenter notre fichier. De même, nous offrons aux hébergeurs locaux, qui sont dans un rayon de 15 km, des demi-bouteilles de notre domaine, qu'ils mettent sur la table de leur gîte. »

Ses résultats

« En moyenne, nous recevons une dizaine de touristes par demi-journée, auxquels je demande 2 € par personne. C'est de l'investissement en temps. Je fais de la pédagogie. L'œnotourisme nous permet de maintenir notre fichier Cela compense la volatilité des clients. »

L'essentiel de l'offre

Voir aussi :