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Boostés par de bons chiffres, les bios s'organisent

Christelle Stef, Patrick Touchais et Michèle Trévoux - La vigne - n°228 - février 2011 - page 8

Dans le Languedoc, le CIVL cote depuis l'an passé les vins bios. Inter-Rhône va faire pareil. En Val de Loire et en Aquitaine deux interprofessions bios viennent de naître.
ANNE-LISE GOUJON, présidente de la commission viticulture au sein d'Arbio Aquitaine. « Aujourd'hui la demande de vins bios est supérieure à l'offre. Mais avec l'augmentation des surfaces en bio, si l'on veut éviter une baisse des cours, il faut se structurer », explique-t-elle. © L. WANGERMEZ

ANNE-LISE GOUJON, présidente de la commission viticulture au sein d'Arbio Aquitaine. « Aujourd'hui la demande de vins bios est supérieure à l'offre. Mais avec l'augmentation des surfaces en bio, si l'on veut éviter une baisse des cours, il faut se structurer », explique-t-elle. © L. WANGERMEZ

Mi-janvier est née l'association interprofessionnelle des vins bios du Val de Loire (AIVB-VL). Elle regroupe une trentaine d'opérateurs, majoritairement des vignerons. Deux négoces spécialisés dans le bio, Biovidis et Abionysos, figurent aussi parmi les fondateurs. La structure qui doit encore élire son bureau se veut légère. Elle sera composée de trois collèges : producteurs, metteurs en marché et distributeurs. Elle a déjà rencontré InterLoire pour « travailler ensemble ».

Premier objectif : créer un observatoire économique des vins bios de Loire. « On veut connaître les volumes et les prix du vrac en muscadet, rosé et cabernet-d'Anjou, touraine et crémant de Loire », souligne un vigneron. L'association demande à l'interprofession des vins de Loire d'identifier les transactions bios. En ajoutant une case à cocher sur les contrats, par exemple.

Nouveau contrat vrac dans la vallée du Rhône

Seconde requête, la création d'une commission paritaire bio au sein d'InterLoire. Les vignerons bios veulent rencontrer le négoce une à deux fois par an pour discuter marchés, prix, qualité… même avec les entreprises qui commercialisent uniquement quelques cuvées en bio. Dans la vallée du Rhône, les choses sont plus avancées. Fin 2010, l'interprofession a entériné un nouveau contrat pour les vins en vrac. Lors de chaque transaction, les opérateurs doivent spécifier s'ils sont en conventionnel, en bio ou en conversion.

« D'ici un mois, nous fournirons des chiffres, annonce Brice Eymard, le responsable du département économique d'Inter-Rhône. Environ 4 500 ha, soit 5,8 % du vignoble est certifié bio ou en cours de conversion. Des domaines importants et des caves coopératives arrivent sur ce marché. Le vrac se développe. Cela devient intéressant de le coter. »

L'interprofession a rodé le dispositif en 2010. Et le constat est implacable : si le côtes-du-rhône rouge conventionnel se négocie entre 100 et 110 €/hl, le bio se vend à plus de 200 €/hl.

En Aquitaine, la filière s'organise aussi. Mais la démarche est différente, car le CIVB n'a pas souhaité mettre en place une section vin bio. Face à ce refus, les opérateurs ont décidé de créer en juin 2010 une commission viticulture au sein d'Arbio, l'association interprofessionnelle des opérateurs bios de la région. Y adhèrent le syndicat des vignerons bios d'Aquitaine, cinq coopératives, six négociants et la chambre d'agriculture de Gironde.

Une charte pour un commerce gagnant-gagnant

« Nous avons créé cette section, car beaucoup de domaines se convertissent. Actuellement, il y a autant de viticulteurs certifiés bios qu'en conversion. D'ici à trois ans, le nombre de viticulteurs bios va doubler. Aujourd'hui, la demande est supérieure à l'offre. Mais si la production augmente, les cours risquent de baisser. C'est ce que nous voulons éviter », rapporte Anne-Lise Goujon, la présidente de la commission.

Les principales missions de la commission bio sont d'organiser des opérations de promotion collective et de mieux appréhender les marchés. « En lien avec l'Agence bio et les interprofessions, nous allons mettre en place des études sur les surfaces en production par appellation, les volumes mis en marché et les circuits de commercialisation », explique Anne-Lise Goujon.

« Nous allons aussi travailler à la mise en place d'une charte de commercialisation », ajoute Jérôme Cinel, le directeur d'Arbio. L'objectif ? Que les acheteurs s'engagent à offrir un prix rémunérateur aux producteurs en échange de quoi ces derniers leur garantiront un approvisionnement régulier en vins de qualité. Pour mettre en place la charte, « nous allons travailler sur les coûts de production, afin de définir des seuils à partir desquels les vignerons vivent décemment de leur métier », poursuit Jérôme Cinel.

Pour assurer ses missions, la commission peut compter sur un budget de 150 000 € pour 2011, sachant que l'Aquitaine compte 450 vignerons bios pour 5 464 ha, soit 4 % du vignoble. Ces nouvelles initiatives s'inspirent de celles nées en Languedoc-Roussillon. Premier vignoble bio de France, il fut naturellement le premier à se structurer. L'Association interprofessionnelle des vins biologiques du Languedoc-Roussillon (AIVB-LR) est née dès 1991. Fin 2009, elle comptait 164 adhérents (producteurs et metteurs en marché) représentant les trois quarts de la production régionale. Sa mission : « avoir une meilleure lisibilité et une meilleure représentativité auprès des institutions nationales », explique Cendrine Vimont, l'attachée de presse de l'association.

L'AIVB-LR défend les intérêts de la filière, assure une veille réglementaire, fait de la recherche et de l'expérimentation, suit des marchés… Depuis 1993, elle organise chaque année le Salon Millésime bio. Le succès est grandissant (voir encadré p. 8).

« Si les prix chutent, la filière ne s'en remettra pas »

Au printemps 2010, elle a contribué à la mise en place d'une section vins bios au sein du CIVL, l'interprofession des AOC du Languedoc. Cette section a trois rôles : technique, promotionnel et économique. « La filière bio représente 4 à 5 % des volumes de nos appellations, justifie Jérôme Villaret, le délégué général du CIVL. Lors des transactions en vrac, nous demandons aux opérateurs de nous préciser s'il s'agit de vin bio ou pas. Ainsi, nous sommes en mesure de fournir les volumes mis en marché et les prix moyens pratiqués. »

L'interprofession pourra intervenir en cas de déséquilibre du marché. « La filière bio est naissante. La production risque d'augmenter plus vite que la demande. Or, les coûts de production en bio sont beaucoup plus élevés qu'en conventionnel. Si les prix baissent, la filière ne s'en remettra pas », prévient Jérôme Villaret.

Après douze mois de suivi qu'en est-il ? Durant la campagne 2009-2010, l'interprofession a enregistré quarante contrats bios totalisant 6 676 hl, dont 56 % de languedoc rouge et 41 % de corbières rouge. Le prix moyen était de 136,90 €/hl, presque le double des vins conventionnels.

A mi-campagne 2010-2011, le CIVL a enregistré huit contrats bios pour un volume de 1 691 hl et un prix moyen de 129,60 €/hl. Ces chiffres, qui semblent indiquer une baisse, sont à prendre avec prudence, car tous les opérateurs n'ont pas encore le réflexe de spécifier les vins bios sur leurs contrats. Preuve qu'il reste encore du travail pour organiser la filière.

Millésime bio : l'engouement ne faiblit pas au salon spécialisé de Montpellier

 © A. REYNAUD

© A. REYNAUD

Millésime bio a eu lieu du 24 au 26 janvier à Montpellier (Hérault). Malgré l'ouverture d'un second hall, « nous avons refusé les producteurs en deuxième année de conversion. Nous devons veiller à une progression du nombre d'exposants en cohérence avec celle des visiteurs », explique Cendrine Vimont, de l'AIVB-LR, l'association organisatrice. Le salon a donc compté 560 exposants, 70 de plus que l'an dernier. La fréquentation continue aussi à croître, avec 3 200 visiteurs soit 18 % de plus que l'an dernier. Cette dynamique illustre l'engouement pour les vins bios. « Notre production en bio devrait doubler l'an prochain, témoigne, Jean-Pierre Andrillat, directeur de la cave de Villledieu, dans les Côtes-du-Rhône. Nous allons passer de 5 000 à 10 000 hl. Les conditions sont attractives pour les producteurs. En côtes-du-rhône, nous leur offrons une rémunération nette de 6 000 € l'ha contre 4 000 € pour le conventionnel. » Parallèlement, les ventes progressent sur tous les circuits : en grande distribution, dans les magasins bios, chez les cavistes et à l'export. Mais nos voisins sont sur les rangs. L'Italie compte 43 000 ha de vigne en bio. L'Espagne met les bouchées doubles. En un an, elle a porté son vignoble bio de 30 856 à 53 960 ha, devenant le premier producteur de vin bio du monde. Combien de temps la demande restera-t-elle en phase avec l'explosion de l'offre pour assurer une juste rémunération des producteurs ? La question taraude tout le milieu.

Les Vifs, fer de lance de la viticulture bio

A la fin de 2010, 22 % des adhérents aux Vignerons indépendants de France étaient certifiés bios ou en cours de conversion. Cela représente 1 310 exploitations. Les deux tiers de ces adhérents sont en conversion, c'est-à-dire engagés dans la démarche depuis moins de trois ans. Et près de la moitié (45,3 %) est située dans le quart sud-est : en Languedoc-Roussillon ou en vallée du Rhône-Provence. Voici ce que rapporte une enquête réalisée par l'observatoire national des Vignerons indépendant en novembre-décembre 2010. Le sondage révèle également que 21 % des Vignerons indépendants « non bios » envisagent de se convertir. Selon les estimations des Vifs, en 2013, près de 2000 adhérents sur 6 000 devraient donc être bios, soit un viticulteur sur trois.

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REPÈRE

L'objectif du Grenelle sera atteint

En 2009, selon l'Agence bio le vignoble français en bio ou en conversion s'étendait sur 39 000 ha, soit une hausse de 39 % par rapport à 2008 et 4,6 % du vignoble national. En 2010, les surfaces auraient encore augmenté de 30 % et elles pourraient atteindre 80 000 ha en 2012. L'objectif de 6 % de surfaces bios en 2012 donné par le Grenelle de l'environnement sera largement atteint.

L'essentiel de l'offre

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