Du volume, beaucoup de volume, mais peu de valeur ajoutée. Voilà, en schématisant, le profil actuel de la commercialisation des vins de la vallée du Rhône. Avec près de 3,1 millions d'hl vendus au cours de la campagne 2009-2010, en hausse de 3,5 % par rapport à 2008-2009.
« Les ventes ont été supérieures à l'offre puisque la récolte 2009 s'est élevée à 2,9 millions d'hl, souligne Brice Eymard, responsable du service économique d'Inter-Rhône. Cela a permis une diminution du stock de 220 000 hl. Ce dernier s'est établi à 2,5 millions d'hl au 31 juillet 2010, soit dix mois de commercialisation. »
Les grandes surfaces d'abord
A l'origine de ce rebond, la bonne tenue des ventes en hypers et supermarchés français et le retour de la croissance à l'export après une campagne 2008-2009 en berne. Dans les grandes surfaces qui représentent 45 % des débouchés du vignoble, les vins rhodaniens enregistrent une hausse de leurs ventes de 1,3 % en volume, à 906 356 hl, et de 3,5 % en valeur, soit 360 millions d'euros durant l'année mobile arrêtée au 7 novembre 2010, selon le panel Iri.
« Certes, il s'agit de progressions mesurées, poursuit Brice Eymard. Mais elles interviennent après deux années de fortes hausses, en 2008 et 2009. Durant cette période, nous avons gagné 50 000 hl supplémentaires ! Nous sommes désormais parvenus à un palier. » Le bon rapport qualité/ prix des vins rhodaniens a conquis les consommateurs et les distributeurs.
Pour preuve, le prix moyen d'un vin de la vallée du Rhône, en hypers et supers, plafonne à 2,98 euros les 75 cl, contre 4,50 euros pour un vin de Bordeaux et 2,81 euros pour un vin du Languedoc-Roussillon. « Notre capacité à offrir des vins entre 3 et 5 euros est moindre que celle des Bordelais qui possèdent d'avantage de crus dans leur escarcelle », explique le responsable.
L'appellation régionale Côtes-du-Rhône réalise 65 % des ventes de vins rhodaniens en grande distribution (596 000 hl) contre 9 % pour les villages et 7 % pour les crus, le reste étant réalisé par les satellites (Lubéron, Ventoux, Grignan). Or, dans sa couleur phare, le rouge, elle peine à se valoriser : 42 % des vins sont vendus entre 2 et 3 euros et 35 % à moins de 2 euros.
Il est vrai que le côtes-du-rhône doit une bonne partie de son essor aux marques de distributeurs : elles réalisent 38 % des ventes en volume (12,5 % au 7 novembre 2010) à un prix moyen aux alentours de 2,54 euros les 75 cl. De plus, elles ont choisi de développer leurs MDD prioritairement en Bib de 5 litres. D'après le panel Iri, ce contenant a dépassé en volume les ventes de MDD en bouteilles.
« Le côtes-du-rhône offre à la grande distribution du volume et un excellent rapport qualité/ prix. Du fait de la baisse des cours, elle s'est approvisionnée à bas prix. Le Bib lui permet également des économies sur les achats de matières sèches, bouchons, capsules, étiquettes… », précise Brice Eymard.
Côté prix, les MDD de 5 l se positionnent aux environs de 2,51 euros les 75 cl. Avec la crise, le consommateur, en quête de bonnes affaires, est séduit. De son côté, la grande distribution réalise de très belles marges, avec des vins bon marché à l'achat et un conditionnement économique en matières sèches. Selon Inter-Rhône, en 2002 le coefficient multiplicateur appliqué par les grandes surfaces entre le cours moyen du vrac et le prix de vente en rayon était de 2,46 euros. En 2009, il a grimpé à 3,26 euros. Pour rappel, en 2002 le cours moyen de l'appellation avoisinait les 110 €/hl, en 2009 il a plongé à 80/85 €/hl. Mais depuis peu, la donne change. Les prix se relèvent sous l'effet d'une récolte et de stocks historiquement bas.
A l'export, le vignoble retrouve des couleurs. « Depuis fin 2009, la situation s'améliore », remarque Aurélien Jousse, responsable marketing et communication des vins Skalli. L'embellie tient à la baisse de l'euro par rapport au dollar et à la nécessité pour les importateurs de reconstituer leurs stocks.
Effet de curiosité en Asie
Outre-Atlantique et en Asie, les vins rhodaniens bénéficient des mêmes atouts que sur le marché français : le rapport plaisir/prix dans un contexte où les AOC tricolores sont réputées chères. Aux Etats-Unis, leur prix de vente moyen au consommateur oscille entre 10 et 15 $, quand les vins français se positionnent au-dessus de 15 à 20 $ et que le cœur du marché est entre 8 et 10 $.
« En Asie, où les classes moyennes se développent, l'effet de curiosité joue également en faveur de notre offre, estime Brice Eymard. Le profil rond, fruité et chaleureux de nos vins leur plaît. »
Pour améliorer sa notoriété dans les pays tiers, l'interprofession déploie des programmes de communication aidée par l'Europe. La dernière en date cible la Chine. Il s'agit d'une campagne destinée aux professionnels sur le thème « Les vins des côtes-du-rhône, un bonheur qui n'attend pas ». Objectif, faire émerger le vignoble dans un marché dominé par les Bordeaux (deux tiers des importations françaises). Après des années de purgatoire, les opérateurs rhodaniens espèrent voir leurs prix de vente repartir à la hausse.
Les ventes de rosés doublent en cinq ans
A l'instar de nombreuses autres appellations, les Côtes-du-Rhône cède à la mode du rosé. Les volumes échangés sur le marché du vrac sont passés de 44 000 hl en 2004-2005 à 84 000 hl en 2009-2010, quasiment le double ! Il faut dire que lors de la dernière campagne, le côtes-du-rhône rosé s'est échangé à 105 €/hl de moyenne quand le rouge affichait 10 €/hl de moins. A ce prix, il reste toujours moins cher que le côtes-deprovence rosé qui s'est vendu autour de 140 €/hl. Une fois de plus, le rapport plaisir/prix joue en faveur du côtes-du-rhône.