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VIGNE

Phytos : les nouvelles armes pour la campagne 2011

Christelle Stef - La vigne - n°229 - mars 2011 - page 42

Plusieurs antimildious et insecticides viennent compléter l'offre en produits phytos.Voici ce qu'en pensent les conseillers viticoles et les distributeurs qui les ont déjà testés.
GRAPPE ATTAQUÉE PAR LE MILDIOU. Cette année, les viticulteurs peuvent compter sur cinq nouveaux produits pour lutter contre cette maladie. © C. STEF

GRAPPE ATTAQUÉE PAR LE MILDIOU. Cette année, les viticulteurs peuvent compter sur cinq nouveaux produits pour lutter contre cette maladie. © C. STEF

LARVE DE COCHYLIS. Avec l'eudémis, ce sont les principaux ravageurs de la vigne. Les dégâts en première génération sont uniquement quantitatifs. En deuxième et troisième génération, les vers de la grappe offrent des portes d'entrée au botrytis. © C. WATIER

LARVE DE COCHYLIS. Avec l'eudémis, ce sont les principaux ravageurs de la vigne. Les dégâts en première génération sont uniquement quantitatifs. En deuxième et troisième génération, les vers de la grappe offrent des portes d'entrée au botrytis. © C. WATIER

ANTIMILDIOUS. LBG : le premier phosphite solo homologué

Homologué en 2010, LGB ne sera vraiment lancé que cette année. C'est le premier phosphite solo homologué en tant qu'antimildiou (voir article p. 54). Les autres sont vendus comme engrais ou stimulant, bien qu'utilisés comme fongicides. LGB appartient à la même famille que le fosétyl-Al. Il peut tenir jusqu'à quatorze jours.

« Nous allons le conseiller aux viticulteurs sensibles à la protection de leurs ouvriers, car c'est un produit non classé, rapporte Thierry Favier, de la CAPL, une coopérative d'approvisionnement basée dans le Vaucluse. Nous le préconiserons du stade cinq-six feuilles étalées jusqu'à la préfloraison soit associé à un produit de contact, soit en renfort d'un pénétrant.

Dans le premier cas, nous modulerons la dose de LBG et du produit de contact associé selon la pression de mildiou et le stade de la vigne. Même chose pour le renouvellement. Dans le second cas, nous conseillerons une dose unique de LBG (entre 1,5 et 2 l/ha) associée à une pleine dose de pénétrant. »

Même approche chez Cohésis vigne, en Champagne. « C'est un produit qui trouve sa place auprès des viticulteurs sensibles à la préservation de l'environnement et de leur santé, précise Jean-Yves Boileau. Nous le positionnerons sur les deux premiers traitements antimildious en association avec du métirame-zinc ou du mancozèbe, de manière à contrôler également le brenner et le black-rot. »

En revanche, aux établissements Magne : « Nous ne l'avons pas référencé, car la firme conseille de l'appliquer à raison de 200 l/ha de bouillie, au moins. Or, nous incitons les viticulteurs à travailler en bas volume. Il nous est donc difficile de préconiser ce produit », avance Bernard Taïx, le directeur technique de ce négociant basé dans l'Hérault.

Profiler : le haut de gamme sur grappes

« J'ai vu ce produit lors d'une visite d'essai l'an passé, indique Pierre Petitot, de la chambre d'agriculture de Côte-d'Or. Il présente un bon niveau de performance sur feuilles et sur grappes. C'est une réelle nouveauté. Il contient du fosétyl-Al et du fluopicolide, une matière active issue d'une nouvelle famille chimique. C'est intéressant pour la gestion des résistances. Le fluopicolide renforce l'action du fosétyl-Al. Profiler apportera plus de sérénité aux viticulteurs lors de la période critique : l'encadrement de floraison. C'est là où il présente tout son intérêt. »

« Ce produit se comporte plutôt bien. En 2009 et 2010, nous l'avons testé dans un programme. Nous l'avons positionné soit juste avant la floraison, soit juste après. Il a été comparable au Mikal », explique Ludivine Davidou, de la chambre d'agriculture de Gironde.

Xavier Besson, chez LVVD (Loire vini viti distribution) l'a référencé. « Nous le vendons comme une assurance fleur. Il présente une haute efficacité et une bonne persistance d'action. C'est un vrai 14 jours, mais il faudra voir en conditions extrêmes. Il est complet sur grappes, sur jeunes feuilles et sur feuilles plus âgées. En 2009, dans un essai où les produits étaient appliqués tous les 14 jours, nous avons eu une forte contamination. Tous les produits ont décroché sauf Profiler. Nous allons le préconiser au stade boutons floraux séparés, là où le risque d'attaque sur grappes est le plus élevé », précise-t-il.

Mais Profiler souffre d'un handicap de taille : on ne peut l'appliquer qu'une fois tous les deux ans. « Avec une telle restriction, c'est difficile de gérer les préconisations et les stocks. Et comme il est aussi à un prix élevé, nous ne l'avons pas référencé. Si la restriction saute, il pourrait avoir une place en année à forte pression, car il est très efficace sur grappe et offre un bon profil toxicologique et écotoxicologique », explique Thierry Favier, de la CAPL.

« Cette restriction a un avantage : il n'y a aucun risque d'apparition de résistances », nuance Xavier Besson.

Enervin : très résistant au lessivage

En 2009, Sylvie Jacob, de la Fredon Bourgogne, a comparé Enervin à Electis pro, un produit à 10-12 jours de rémanence. A l'époque, BASF recommandait de l'appliquer à cette cadence. Depuis, la firme préconise 12 à 14 jours.

« Nous avons réalisé trois applications conséprogramme. cutives tous les 10-12 jours au moment de la floraison. La pression du mildiou était élevée puisque la moitié de la récolte a été détruite dans le témoin non traité, précise Sylvie Jacob. Enervin a eu une excellente efficacité, équivalente à notre référence. Si les viticulteurs l'utilisent bien en préventif, ils n'ont aucun souci à se faire. »

Jean-Yves Boileau, souligne aussi son bon niveau d'efficacité. « J'ai pu voir des essais en 2008 et 2009, deux années pluvieuses et très marquées par le mildiou. Malgré les conditions orageuses, ce produit a bien tenu. Cela prouve sa bonne résistance au lessivage. Nous l'avons référencé. Nous allons préconiser une application d'Enervin au stade grappes séparées - début floraison, dans toutes les situations. »

Enervin présente d'autres atouts. « Nous sommes en cours de réflexion pour un éventuel référencement. Ce produit apporte l'amétoctradine, une nouvelle matière active d'une nouvelle famille chimique. C'est intéressant pour la gestion des résistances. Il présente un très bon profil toxicologique et écotoxicologique, ce qui répond aux attentes des viticulteurs. De plus, son prix est correct », rapporte Thierry Favier.

« C'est effectivement un plus pour la gestion des résistances, même si l'amétoctradine présente un risque de résistance croisée avec les QiI (Mildicut) », précise Pierre Petitot. Ce conseiller apprécie aussi que cette nouvelle matière active soit associée au métirame zinc. « Cela change du folpel et du mancozèbe », remarque Pierre Petitot.

INSECTICIDES. Affirm : comparable aux meilleurs

Viriginie Viguès, de l'IFV Sud-Ouest, a testé ce nouvel insecticide, présenté comme « ovo-larvicide » par Syngenta. « Attention, il n'a pas d'effet strictement ovicide, car il n'agit pas directement sur l'œuf. En fait, lorsque la larve sort de l'œuf, elle ingère du produit et meurt. En revanche, Affirm bénéficie d'un bon effet larvicide, reste efficace sur des larves âgées de 14 jours et présente une persistance de 21 jours. »

Thierry Favier, de la CAPL, l'a retenu : « Il présente un très bon profil toxicologique et écotoxicologique. Son prix est correct. Bien positionné, son efficacité est excellente, comparable aux meilleures références du marché. Il bénéficie d'une longue rémanence. On le positionne un petit peu plus tard que les ovicides stricts. Cela permet de contrôler les fins de pontes lorsque les générations s'étalent. »

Ce distributeur va préconiser Affirm en deuxième et troisième génération d'eudémis. « Comme 2011 est la dernière campagne d'utilisation de Cascade, Lufox et Fuoro, il fallait renouveler la gamme », ajoute-t-il.

Selon Marc Guisset, de la chambre d'agriculture des Pyrénées-Orientales, le gros avantage d'Affirm est son nouveau mode d'action, provoquant une relaxation des muscles des chenilles jusqu'à la paralysie. Cela offre une possibilité d'alternance. Marc Guisset souligne aussi la souplesse d'utilisation du produit : du début des pontes jusqu'au stade tête noire. « Mais attention de ne pas aller au-delà pour garder l'optimum d'efficacité », prévient-il.

Coragen : un bon outil de plus

Encore un produit bénéficiant d'un nouveau mode d'action : il provoque la contraction des muscles des chenilles. Florent Bidaut, de la chambre d'agriculture de Saône-et-Loire, l'a testé l'an passé à la dose de 0,15 l/ha en comparaison du Steward (indoxacarbe). « Coragen a été aussi efficace que cette référence. Les viticulteurs avaient déjà de bons outils contre les vers de la grappe. Avec Coragen, cela en fait un de plus. »

Emmanuel Brosse, responsable de Résonance, filiale du groupe Isidore, en Charente-Maritime, met en avant sa bonne efficacité et son profil toxicologique et écotoxicologique favorable. Il fait remarquer que ce produit possède la mention abeille : il peut être utilisé pendant la floraison, en dehors de la présence d'abeilles. Il précise que : « Les viticulteurs pourront communiquer auprès de leurs clients sur le fait qu'ils utilisent des produits respectueux de l'environnement. »

Trois antimildious pouvant tenir jusqu'à quatorze jours

Nom : LBG 01F34.

Firme : De Sangosse.

Composition : 730 g/l de phosphonate de potassium ce qui correspond à 504 g/l d'acide phosphoreux.

Formulation : SL (concentré soluble).

Propriétés : ce produit stimule les défenses naturelles de la vigne et agit directement sur la multiplication du champignon.

Il présente une double systémie ascendante et descendante, ce qui permet la protection des nouvelles pousses.

Dose par hectare : 4 l, mais la firme le conseille à la dose de 2 à 3 l en association avec un antimildiou de contact (folpel, mancozèbe, métirame-zinc).

Persistance d'action : jusqu'à 14 jours.

Période d'application conseillée : du stade quatre à cinq feuilles étalées en préventif jusqu'à mi-fermeture de la grappe.

Restrictions d'utilisation : cinq applications par hectare et par an au maximum.

Classement toxicologique : non classé.

Zone non traitée : 5 mètres.

Délai de rentrée : 6 heures.

Délai d'emploi avant récolte : 60 jours.

Prix : 10 euros le litre.

Nom : Profiler.

Firme : Bayer CropScience.

Composition : 66,7 % de fosétyl-Al et 4,4 % de fluopicolide.

Formulation : WG (granulés dispersibles dans l'eau).

Propriétés : le fluopicolide est l'unique représentant de la famille chimique des acylpicolides. Selon Bayer, il ne présente pas de résistance croisée avec les autres familles d'antimildious.

Il bénéficie de propriétés translaminaires, c'est-à-dire que lorsque le produit est appliqué sur la face supérieure de la feuille, il se diffuse vers la face inférieure. Il bénéficie aussi d'une systémie acropétale : un traitement à la base de la feuille permet uneprotection complète de celle-ci.

Dose par hectare : 3 kg/ha.

Persistance d'action : 14 jours.

Période d'application conseillée : encadrement de floraison.

Restrictions d'utilisation : une seule application tous les deux ans.

Classement toxicologique : Xi (irritant).

Zone non traitée : 5 mètres.

Délai de rentrée : 24 heures.

Délai avant récolte : 28 jours.

Prix par ha : 62 euros.

Nom : Enervin.

Firme : BASF.

Composition : 120 g/kg d'amétoctradine et 440 g/l de métirame-zinc.

Formulation : WG (granulés dispersibles dans l'eau).

Propriétés : l'amétoctradine est une nouvelle matière active de la famille des pyrimidylamines. Son action est préventive.

Elle se fixe dans la cuticule cireuse, formant ce que BASF appelle une « barrière ciro-dynamique ». En cas de rosée ou de pluie, l'amétoctradine se redistribue à la surface de l'organe traité. Selon la firme, cela lui confère une grande résistance au lessivage.

Dose par hectare : 2,5 kg.

Persistance d'action : 12 à 14 jours.

Période d'application conseillée : du stade grappes visibles jusqu'à la fin de la période à risque de mildiou.

Restrictions d'utilisation : selon la note nationale mildiou 2011, pas plus de deux applications par an en incluant dans le comptage les produits à base de cyazofamide.

Classement toxicologique : non classé.

Zone non traitée : 5 mètres.

Délai de rentrée : 6 heures.

Délai d'emploi avant récolte : 35 jours.

Prix par ha : environ 40 euros.

La gamme des CAA s'étoffe

Bayer lance également deux antimildious systémiques qui s'emploient à la cadence de 14 jours : Firmament et Cassiopée. Le premier est à base de fosétyl-Al, d'iprovalicarbe et de mancozèbe. Il s'utilise à la dose de 4 kg/ha. Le second contient du fosétyl-Al, de l'iprovalicarbe et 25 % de folpel. Il s'utilise à 3 kg/ha. Ces deux produits présentent une efficacité préventive, curative et antisporulante. Selon la firme, ils sont idéals au moment de la fleur. Ils se présentent sous la forme de granulés dispersibles. Ils sont classés Xn (nocif) sur le plan toxicologique. Leur délai d'emploi avant récolte est de 28 jours. La ZNT de Firmament est de 50 mètres, son délai de rentrée dans les parcelles de 48 heures. La ZNT de Cassiopée est de 20 mètres, son délai de rentrée dans les parcelles de 24 heures. Ces deux produits font partie de la famille des CAA qui est déjà bien remplie. Il faut en tenir compte pour la gestion des résistances.

Prix : 58,40 €/ha pour Firmament et 58,50 €/ha pour Cassiopée (coûts des fournitures en viticulture et œnologie 2011).

Runner, plus de souplesse

Bayer qui commercialise l'insecticide Runner à base de 240 g/l de méthoxyfénozide a obtenu un élargissement de la fenêtre d'application. Désormais, ce produit peut se positionner du 25 mai au 15 août. « Cela offre de la souplesse et permet d'utiliser le produit sur la première, la deuxième ou la troisième génération de tordeuses. En revanche, le produit est toujours assujetti à la restriction d'utilisation d'une année sur deux sur la même parcelle », précise Frédéric Derolez, chef de marché vigne.

Deux insecticides avec un profil toxicologique et écotoxicologique favorable

Nom : Affirm.

Firme : Syngenta.

Composition : 0,95 % d'émamectine benzoate.

Formulation : granulés solubles dans l'eau (SG).

Propriétés : l'émamectine benzoate est une substance dérivée de la fermentation de Streptomyces avermilitis, une bactérie du sol. Elle paralyse le ravageur en créant une décontraction irréversible des muscles.

L'insecte meurt rapidement après l'ingestion du produit. L'émamectine agit sur deux sites au niveau des muscles des ravageurs. Elle est ovicide et larvicide.

Dose par hectare : 1,5 kg sur eudémis et cochylis.

Persistance d'action : 21 jours.

Positionnement : uniquement en G2 et/ou en G3, du début des pontes jusqu'au stade tête noire.

Restrictions d'utilisation : trois applications maximales par an.

Classement toxicologique : non classé.

Zone non traitée : 20 mètres.

Délai de rentrée : 6 heures.

Délai avant récolte : 7 jours.

Prix par hectare : non communiqué.

Nom : Coragen.

Firme : DuPont.

Composition : 200 g/l de rynaxypyr (ou chlorantraniliprole).

Formulation : suspension concentrée (SC).

Propriétés : le rynaxypyr est une nouvelle matière active de la famille des anthranilamides. Il provoque une contraction des cellules musculaires, ce qui engendre une tétanisation de l'insecte. Ce dernier cesse de s'alimenter et meurt dans les 72 heures. Selon la firme, il bénéficie d'un bon effet ovicide et larvicide.

Dose par hectare : 175 ml sur cochylis et 125 ml sur eudémis.

Persistance d'action : 21 jours.

Positionnement : dès les premiers stades larvaires jusqu'à l'apparition des glomérules en G1, dès le début des pontes en G2 ou G3.

Restrictions d'utilisation : une seule application par saison.

Classement toxicologique : non classé.

Zone non traitée : 20 mètres.

Délai de rentrée : 6 heures.

Délai avant récolte : 30 jours.

Prix par hectare : environ 50 euros à la dose de 175 ml et 35 euros à 125 ml.

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