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ACTUS - POUR OU CONTRE

Faut-il changer le nom d'une AOC s'il est similaire à celui d'une centrale nucléaire ?

Clara de Nadaillac - La vigne - n°231 - mai 2001 - page 25

Pour une AOC, porter le même nom qu'une centrale nucléaire peut-être préjudiciable.

Suite aux incidents survenus dans la centrale de Fukushima (Japon), la question du nucléaire en France est sur toutes les lèvres. Quelques AOC viticoles sont particulièrement concernées, telles que Pauillac ou Margaux qui regardent la centrale du Blayais (Gironde), ou Côte-Rôtie qui est située à 10 km de Saint-Alban-du- Rhône (Isère). La situation est encore plus tendue pour deux appellations : Chinon et Bugey. Toutes deux sont baptisées de manière identique à la centrale nucléaire de leur région. C'était aussi le cas des Coteaux du Tricastin. Mais il y a six mois à peine, cette AOC a troqué son nom, pour devenir Grignan-les-Adhémar.

L'objectif : se protéger des retombées médiatiques de la centrale du même nom, qui avait connu toute une série d'incidents en 2008.

Mais Chinon et Bugey ne veulent pas abandonner leur nom. La première ne souhaite pas communiquer sur le sujet. Le président de l'appellation souligne néanmoins que cette similitude ne pose pas de problème et que l'AOC ne changera pas de nom, « quoi qu'il arrive ». A Bugey, le syndicat a une position différente. Il est « en discussion et en négociation » avec EDF pour faire modifier le nom de la centrale. Une démarche ardue, si l'on se souvient que les Coteaux du Tricastin l'avaient en leur temps tentée, sans succès…

Le Point de vue de

CONTRE

« Non, il faut modifier le nom de la centrale »

Eric Angelot, président du syndicat et de l'ODG Bugey

Eric Angelot, président du syndicat et de l'ODG Bugey

« Nous nous préoccupons du risque médiatique que représente pour notre appellation le fait de porter le même nom que la centrale du Bugey. De nos jours, lorsque les consommateurs ou clients entendent parler de notre AOC, leur premier réflexe est de taper le nom sur Google. Et là, c'est la centrale nucléaire qui sort. Nous avons fréquemment des réflexions à ce sujet. Nous n'avons donc pas attendu les problèmes au Japon pour réagir. Depuis septembre 2010, nous sommes en réflexion et en négociation avec la direction de la centrale et avec EDF, pour trouver une solution.

Le nom de notre AOC date de 1958. A l'époque c'était une AOVDQS. Le choix du nom de la centrale nucléaire s'est quant à lui effectué en 1964. Nous avons donc une antériorité de nom. De plus, il n'y a pas de décret ministériel derrière le nom d'une centrale, contrairement à une AOC. Et les ventes d'électricité ne sont pas liées au nom de la centrale comme les ventes de vin le sont à celui de l'appellation. Il est donc hors de question que ce soit l'AOC qui change de nom. Nous souhaitons que ce soit la centrale qui le fasse. Nous sommes prêts à déposer un dossier pour la débaptiser. EDF n'y est pas opposée. Mais c'est une procédure longue et compliquée. Il faut que nous obtenions l'appui du ministère de l'Agriculture et de celui de l'Industrie, afin de convaincre les instances du bien fondé de ce changement. »

Le Point de vue de

POUR

« Nous avons changé de nom pour contourner le problème d'image »

Henri Bour, président du syndicat et de l'ODG Grignan-les-Adhémar

Henri Bour, président du syndicat et de l'ODG Grignan-les-Adhémar

« Le problème du nucléaire ne concerne pas que les AOC viticoles ayant le même nom qu'une centrale, mais les trois quarts des AOC alimentaires françaises ! Dans notre AOC, avant 2008, il n'y avait pas de majorité claire quant à un changement de nom. Mais en 2008, avec la suite d'incidents que la centrale nucléaire du Tricastin a connue, les viticulteurs ont majoritairement décidé de changer. Nous avons fait la une dans le monde entier. On nous parlait sans arrêt de cela. Les viticulteurs de l'appellation veulent que l'on parle d'eux pour leur vin, et non pour le nucléaire ! Nous avons donc choisi de modifier notre nom de Coteaux du Tricastin en Grignan-les-Adhémar, pour éviter que le débat sanitaire se pose sur nous.

Nous avons préféré repartir de zéro, plutôt que d'avoir des problèmes d'image. Ça n'a pas été facile, mais nous sommes satisfaits de notre initiative. Je n'ai pas assez de recul pour savoir si ce changement a été préjudiciable pour l'AOC. Mais lorsque je regarde les mercuriales, je constate que les volumes sortants et les prix d'achat de nos vins se placent parmi les meilleurs des Côtes-du-hône. Donc je pense que cela n'a pas de grosses répercussions. Néanmoins, nous allons bientôt initier une campagne de publicité pour communiquer sur notre nouveau nom. »

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