Jusqu'en 2009, la cave de Monségur, au Puy (Gironde) vinifiait ses 70 000 hl de rouges – en appellations Bordeaux et Bordeaux supérieur – selon un seul procédé. Celui-ci restait très traditionnel : encuvage, remontages et pigeages classiques.
Début 2010, dans le cadre d'un projet de rénovation de la cave et d'agrandissement de la cuverie, le cabinet Ingévin lui propose de diversifier ses schémas de vinification grâce à la thermovinification.
« Nous y songions depuis un moment, confie Eric Saurin, directeur de la cave coopérative. Nous avions vu l'installation de la cave de Buzet (Lot-et-Garonne), qui nous semblait intéressante. Et puis, la demande pour des vins plus structurés, plus fruités, avec plus de rondeur se fait pressante depuis quelques années. »
Suite à la proposition d'Ingévin, les choses s'accélèrent. En quatre mois seulement, le chai est rénové. Il intègre un atelier de thermovinification complet avec chauffage de la vendange, cuves de macération adaptées, matériel de flottation pour clarifier les moûts, groupe de froid…
Sur ce premier millésime, l'objectif est d'élaborer des vins avec une bonne intensité aromatique, assez structurés et puissants. « Nous cherchons à obtenir une bonne extraction, avec un bon rapport tannins/ anthocyanes », ajoute Eric Saurin. En parallèle, la cave conserve des cuvées traditionnelles, vinifiées à partir de sélections parcellaires.
Les échantillons plaisent au négoce
Pour Philippe Moute, maître de chai, ce nouvel outil permet d'élaborer des produits aux styles différents. « En fonction du potentiel du raisin, du rapport tannins/anthocyanes et du niveau de turbidité des moûts, nous orientons les cuves vers des macérations préfermentaires à chaud plus ou moins longues, en sortie de thermo. »
Ainsi, quelques cuves présentent un profil amylique. Mais la plupart sont plutôt concentrées, puissantes, très fruitées et très colorées.
Le directeur et le maître de chai ont l'impression que la thermo permet de gommer les petits défauts de leurs vins, comme les caractères végétaux ou le côté asséchant. Dans le même temps, elle apporte de la sucrosité et du fruité.
« Mais bien sûr, la qualité du raisin au départ est primordiale ! La thermovinication n'est pas une technique miracle », insiste Philippe Moute.
Les vins thermovinifiés entrent dans les assemblages à hauteur de 30 à 40 %. Quelques cuvées sont même à 100 % en thermo. Eric Saurin estime que les profils obtenus correspondent bien aux nouveaux marchés, surtout à l'export.
En témoignent les premières réactions des négociants (la cave commercialise 70-80 % de sa production via le négoce) : les échantillons présentés semblent mieux ressortir en dégustation qu'à l'accoutumée. Et les vins ont été bien perçus sur le marché américain, selon la responsable commerciale de la cave, de retour d'une mission aux Etats-Unis. Des résultats à confirmer dans le temps, 2010 ayant été un millésime particulièrement bon.