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La cuve béton revêt des formes originales

Marine Balue - La vigne - n°241 - avril 2012 - page 46

Œuf, pyramide, tulipe… la cuve en béton bouleverse les codes en adoptant des formes originales qui se démocratisent dans les caves. Ces nouveaux modèles allient intérêt technique et esthétique, mais leur nettoyage reste une affaire minutieuse.
CUVE ŒUF. La première cuve béton à la forme vraiment originale (modèle MC). Elle fait le succès des cuves Nomblot. Moulée d'un bloc et sans armature en métal, elle existe en modèles 6,7 hl et 16 hl. Sa forme est réputée pour engendrer un bâtonnage naturel des lies. © P. ROY 2

CUVE ŒUF. La première cuve béton à la forme vraiment originale (modèle MC). Elle fait le succès des cuves Nomblot. Moulée d'un bloc et sans armature en métal, elle existe en modèles 6,7 hl et 16 hl. Sa forme est réputée pour engendrer un bâtonnage naturel des lies. © P. ROY 2

CUVE PYRAMIDALE ou cuve cubiquetronconique (modèle MA). Ce modèle de cuve Nomblot s'est démocratisé en France et à l'international. Il peut aller de 20 à 100 hl.

CUVE PYRAMIDALE ou cuve cubiquetronconique (modèle MA). Ce modèle de cuve Nomblot s'est démocratisé en France et à l'international. Il peut aller de 20 à 100 hl.

CUVE ELEGANCE CHEVAL BLANC. Il s'agit d'une cuve pyramidale Élégance de D.V. Tec, relookée par l'architecte Christian de Portzamparc pour le château Cheval blanc. La forme pyramidale offre un bon contact entre le jus et le marc pour une meilleure extraction en rouge. Tout le système de thermorégulation est intégré dans le béton. Élégance est disponible en capacités de 20 à 120 hl. © Deepix

CUVE ELEGANCE CHEVAL BLANC. Il s'agit d'une cuve pyramidale Élégance de D.V. Tec, relookée par l'architecte Christian de Portzamparc pour le château Cheval blanc. La forme pyramidale offre un bon contact entre le jus et le marc pour une meilleure extraction en rouge. Tout le système de thermorégulation est intégré dans le béton. Élégance est disponible en capacités de 20 à 120 hl. © Deepix

CUVE TENTATION : la nouvelle née de la gamme D.V. Tec fin 2011, en forme de flacon. Son petit volume et sa forme la destinent aux vins blancs haut de gamme. Elle est un compromis entre l'oeuf et le demimuid. © J.-C. Grelier

CUVE TENTATION : la nouvelle née de la gamme D.V. Tec fin 2011, en forme de flacon. Son petit volume et sa forme la destinent aux vins blancs haut de gamme. Elle est un compromis entre l'oeuf et le demimuid. © J.-C. Grelier

Le béton, longtemps délaissé au profit de l'inox, connaît un renouveau. Les nouvelles formes de cuves qu'affichent deux grands spécialistes de la cuverie béton, Nomblot et D.V. Tec, y contribuent.

Dans le registre de l'originalité, Marc Nomblot, ancien fabricant de cuves béton, est un précurseur. Au début des années 2000, à la demande du producteur Michel Chapoutier, il crée une cuve béton qui se rapproche d'une amphore romaine : la cuve ovoïde. Ses proportions suivent le nombre d'or, elle est en béton brut non armé et moulée en un seul bloc. Depuis, ces « œufs » s'éparpillent dans le monde entier.

« La cuve œuf préserve la pureté de mes jus »

« La cuve œuf est notre fer de lance. Nous en avons vendu plusieurs milliers d'exemplaires dans le monde et nous avons encore beaucoup de commandes », atteste Éric Leclere, responsable commercial des cuves Nomblot chez Bonna Sabla, la société qui a racheté l'entreprise de Marc Nomblot. Cette cuve, qui revient à 3 000 euros environ pour 6,7 hl, attire les vignerons cherchant de la rondeur dans leurs vins, sans le boisé. Mais aussi pas mal de producteurs en bio et biodynamie, comme Dominique Lucas, propriétaire du château de Barrigards, à Ladoix-Serrigny (Côte-d'Or). Ce vigneron possède dix œufs de 600 l où il vinifie ses blancs et élève la moitié de ses blancs et de ses rouges. « Cette forme me permet de conserver la pureté de mes jus. Il s'y passe une sorte de dynamisation qui renforce la structure et les arômes de mes vins. Le béton ne les alourdit pas comme le bois », juge-t-il. L'absence d'armature métallique dans le béton l'a aussi séduit.

La cuve cubique-tronconique, ou pyramidale, est un autre produit phare de la marque. Disponible en petit volume (de 20 à 100 hl), elle se transporte facilement. Le mas Amiel, à Maury (Pyrénées-Orientales), est à l'origine de ce modèle. « Le béton non revêtu offre une micro-oxygénation douce des vins, sans les marquer par le bois, explique Nicolas Raffy, le maître de chai. La forme pyramidale nous servait au départ à faire des remontages par injection d'azote sous le chapeau de marc. » Cette méthode a été abandonnée au profit de remontages classiques, mais la pyramide permet toujours un bon contact entre le marc et les jus.

Chez Bonna Sabla, plusieurs nouveaux modèles sont encore en projet : cuves en forme d'amphore, cuve cubique à l'arrière et ronde devant… Éric Leclere estime que ces cuves originales représentent environ la moitié des ventes. Elles correspondent à des demandes particulières des domaines. « Les cuves tronconiques marchent aussi très bien. Elles sont maintenant considérées comme un modèle classique, comme les cubes ou les parallélépipèdes », note-t-il. Pour lui, alors que le béton était tombé en disgrâce il y a quinze ans, il revient à la mode. Cette année, Bonna Sabla a donc décidé d'investir dans un nouvel outil de fabrication, plus précis. « Le marché du béton se maintient et se diversifie, confirme Denis Daurelle, fondateur de la société D.V. Tec, qui distribue les cuves Nico Velo. La demande porte sur de petites cuves, pour des sélections. Nous les équipons d'accessoires plus variés, notamment des régulations thermiques intégrées dans le béton. Nous essayons d'allier technique et esthétique, ce qui ne coûte pas forcément plus cher. »

Depuis 2004, la société D.V. Tec essaie ainsi de se démarquer en lançant une nouvelle forme de cuve béton chaque année. Au départ, la demande était centrée sur des cuves cubiques. Mais Denis Daurelle constatait un attrait pour les cuves en bois tronconiques. Il a donc conçu la cuve pyramidale Élégance, un compromis entre les deux formes, destinée à la vinification de rouge. « Cette cuve a une pente de 13 % qui permet un bon contact entre le jus et le marc durant la macération. »

De la pyramide à la jarre

Ce modèle, qui va de 35 à 75 hl, constitue environ le tiers des ventes totales de D.V. Tec et la moitié des cuves originales. Niveau prix, il coûte à peu près 15 % plus cher qu'une cuve en béton de forme classique. Il a attiré l'attention du château Cheval blanc pour son nouveau chai mis en service en 2011. « Nous voulions de la cuverie béton, matériau que nous privilégions depuis quarante ans, relate Pierre-Olivier Clouet, maître de chais. Nous souhaitions améliorer nos vinifications parcellaires, avec des volumes plus petits et plus divers. » Au terme de ses comparaisons, il a opté pour les cuves Élégance, que l'architecte du chai, Christian de Portzamparc, a relookées : il a demandé à D.V. Tec d'intégrer les pieds de la cuve dans un galbe de béton et d'ajouter une plinthe en haut pour protéger la trappe du dessus. La pyramide s'est transformée en une sorte de grosse jarre. Cheval blanc est désormais équipé de cinquante-deux de ces cuves dans neuf formats de 20 à 110 hl. « La qualité du béton est impeccable et les cuves sont pratiques à utiliser : pas besoin de nettoyer en dessous, nous pouvons circuler autour…, décrit Pierre-Olivier Clouet. Nous pouvons vendanger chaque parcelle à maturité optimale et la vinifier séparément. Le réglage très doux et très précis des températures grâce aux serpentins intégrés dans le béton est un atout. » Seul inconvénient : le nettoyage de l'intérieur doit se faire manuellement à la brosse. Pour les vendanges 2012, D.V. Tec lance un petit format de cuve (600 l), en forme de flacon, pour les vins blancs. Denis Daurelle explique que c'est un compromis entre la cuve œuf et le demi-muid. « Les ventes commencent bien, avec une douzaine de commandes. La clientèle ciblée est haut de gamme. » Une cuve flacon avec toutes les options coûte 4 700 euros environ.

L'amphore en terre cuite les a séduits

Véronique et Stéphane Azémar, du Clos d'un jour, à Duravel (Lot), élèvent des vins rouges en jarres de terre cuite depuis 2003. Élaborées par un potier audois, elles sont tournées à la main, ce qui les rend très lisses. Elles ne font que 1 à 1,5 cm d'épaisseur ce qui favorise l'oxygénation.

Le domaine possède cinquante jarres de 140 l, renouvelées tous les quatre à cinq ans. Les vins y passent treize des dix-huit mois d'élevage et entrent pour un tiers dans les assemblages. Pour ces vignerons, la jarre apporte beaucoup de rondeur et d'équilibre. Ils ressortent d'ailleurs très bien dans les concours. Ils les nettoient à la vapeur et les rincent à l'eau, en étant très précautionneux, car les jarres sont fragiles.

Régine et Laurent Bannwarth, du domaine Laurent Bannwarth, à Obermorschwihr (Haut-Rhin), testent les kvevri, des amphores géorgiennes en terre cuite : ils en ont quatre, de 200 à 1 500 l.

L'intérieur est recouvert de cire d'abeille, donc très lisse. « Ainsi, nous n'avons pas besoin de les aseptiser, nous pouvons faire des cuvées sans soufre. » En 2011, ils ont réalisé leurs premiers vins dans ces jarres. Ils les ont enterrées, « car sinon, elles ne résisteraient pas au poids du vin ». Les jus y ont subi de très longues fermentations, puis plusieurs mois d'élevage, au contact des pellicules de raisins. Dégustés il y a peu, les vins ont présenté des arômes très fins, complexes et très atypiques, mais sans aucune déviation.

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