Retour

imprimer l'article Imprimer

VIGNE

Des microdoses de sucre pour lutter contre le mildiou

CHRISTELLE STEF - La vigne - n°255 - juillet 2013 - page 29

L'ajout de 10 g de sucre dans 100 litres d'une bouillie à dose réduite de cuivre permet d'obtenir une efficacité intéressante sur le mildiou.
TACHES DE MILDIOU SUR FEUILLE. Le fructose à 100 ppm associé à une dose réduite de cuivre permet d'obtenir une efficacité équivalente au cuivre seul à pleine dose. © C. STEF

TACHES DE MILDIOU SUR FEUILLE. Le fructose à 100 ppm associé à une dose réduite de cuivre permet d'obtenir une efficacité équivalente au cuivre seul à pleine dose. © C. STEF

Des infradoses de sucre pour lutter contre les pathogènes de la vigne : tel est le nouveau concept sur lequel travaillent les expérimentateurs. Tout découle des travaux de Sylvie Derridj, de l'Inra de Versailles (Yvelines). Cette chercheuse a montré que l'application foliaire de microdoses de fructose ou de saccharose a un effet intéressant contre la pyrale du maïs et contre la carpocapse de la pomme.

L'explication ? « Le sucre stimulerait l'immunité de la plante », indique Ingrid Arnault, de l'université de Tours (Indre-et-Loire). Au vu de ces résultats, l'université de Tours et le Groupe de recherche en agriculture bio (Grab) ont monté un programme de recherche pour en connaître les effets sur le mildiou de la vigne. Les tests ont démarré en 2011 sur des plants en pot de muscat de Hambourg et d'alphonse-lavallée, deux cépages très sensibles à la maladie.

« Nous avons testé l'association de 100 ppm de fructose avec 100 g/ha de cuivre métal sous forme d'hydroxyde », rapporte Marc Chovelon, du Grab. Une dose qui correspond à seulement 10 g dans 100 l de bouillie.

Différents sucres testés. « Nous avons pulvérisé le mélange sur les feuilles et, sept jours plus tard, nous avons inoculé le mildiou et aspergé les plants, poursuit Marc Chovelon. Pour comparer, nous avions un témoin non traité, une référence à 600 g de cuivre métal par ha, une autre référence à 100 g de cuivre métal par ha et le plant protégé par le fructose seul. Nous avons mesuré uniquement les attaques sur feuilles. Sur ce point, c'est la modalité cuivre à 600 g qui a été la moins touchée. Et dans le même groupe statistique se trouvait la modalité 100 g de cuivre par ha associée au fructose. »

En 2012, les expérimentateurs ont poursuivi les essais dans le cadre du projet Usage (1). Toujours en conditions semi-contrôlées, sur muscat de Hambourg et grenache blanc, ils ont testé différents sucres à différentes doses : le fructose, le glucose et le saccharose à 1, 10 et 100 ppm et le tréhalose (un sucre composé de deux molécules de glucose) à 100 ppm. À chaque fois, ils les ont testés seuls et en association avec 100 g de cuivre métal sous forme d'hydroxyde. Puis ils ont comparé les résultats à un témoin non traité, à une référence à 600 g de cuivre métal et à une référence à 100 g de cuivre métal.

Si le saccharose et le fructose donnent des résultats intéressants, il n'en est pas de même pour le glucose et le tréhalose. Ce dernier aurait même tendance à stimuler le mildiou. Quant aux doses, ce sont celles à 10 et 100 ppm qui procurent les meilleures efficacités, c'est-à-dire 1 g et 10 g dans 100 l de bouillie.

Des résultats prometteurs. Les expérimentateurs ont également mené des essais au vignoble dans différentes régions avec du fructose à 100 ppm. « Nous avons testé toutes les combinaisons possibles : le sucre seul et le sucre associé à une dose réduite de cuivre (hydroxyde) appliqués tous les sept jours ou positionnés selon la météo. Nous avons comparé ces modalités à une pleine dose de cuivre, à une dose réduite de cuivre seule et à un témoin non traité », détaille Arnaud Furet, de l'Adabio en Savoie, qui participe au programme.

La pression du mildiou variant d'une région à l'autre, les doses pleines ou réduites de cuivre et le nombre de passages n'étaient pas les mêmes d'un site à l'autre.

« Dans les différentes régions, le fructose à 100 ppm en association avec une dose réduite de cuivre a eu une efficacité équivalente au cuivre seul à pleine dose, assure Ingrid Arnault. Cela permet de diminuer de deux à six les quantités de cuivre. Le fait d'appliquer la bouillie tous les sept jours n'améliore pas l'efficacité des traitements comparé à un positionnement selon la météo. » Bref, des résultats prometteurs, d'autant que le sucre ne coûte rien. Mais ils méritent d'être confirmés.

(1) Projet coordonné par l'université de Tours et mené avec l'Itab, le Grab, l'Adabio, la chambre d'agriculture d'Indre-et-Loire, les lycées viticoles d'Amboise et de Tours-Fondettes.

Effet prometteur contre la cicadelle jaune

Avec la Fredon Paca, Marc Chovelon, du Grab, a aussi testé l'effet du saccharose à 100 ppm pour lutter contre la cicadelle de la flavescence dorée (ou cicadelle jaune). Là encore, les résultats sont étonnants. L'association du sucre à Pyrévert, un insecticide végétal, au moment du pic des éclosions procure une meilleure efficacité que l'application du produit seul. « Avec Pyrévert seul, l'efficacité n'a été que de 30 %. L'ajout de sucre a permis de la doubler », rapporte Marc Chovelon. Autre observation : une application de sucre au moment du pic des éclosions a été sans effet. Mais une application de sucre seul lors des toutes premières éclosions suivie d'une seconde lors du pic des éclosions a permis d'obtenir une efficacité supérieure à celle de Pyrévert seul. Les expérimentations se poursuivent.

Cet article fait partie du dossier

Consultez les autres articles du dossier :

L'essentiel de l'offre

Voir aussi :