Après une heure et demie de découverte, les amis d'Olivier (quatrième débout en partant de la gauche) et de Véronique (troisième debout en partant de la droite) semblent avoir apprécié leur soirée. PHOTOS P. TOUCHAIS
La première bouteille dégustée par les convives est un sancerre blanc. Avec application, chaque participant hume et goûte avant de remplir une simple fiche indiquant s'il aime ou non ce vin. Alors que certains dégustent en silence et observent, d'autres livrent discrètement leurs impressions à leurs voisins. Les langues se délieront au fur et à mesure de la dégustation.
Château Chevaliers Lagrézette (Caillac, Lot). Un cahors 2009 issu de malbec (85 %), merlot (12 %) et tannat (3 %). Conseil du caviste : tajine d'agneau aux abricots moelleux, côte de boeuf... Prix de vente : 16,50 euros le col.
Sancerre blanc cuvée les Terres blanches 2011 100 % sauvignon du domaine Reverdy-Ducroux (Verdigny, Cher). Le caviste suggère un chèvre (chavignol notamment), des gambas à l'orange ou un feuilleté à la mousse de poisson. Prix de vente : 12,85 euros les 75 cl.
« Bonsoir à tous. Je m'appelle Christophe. Je suis ici à l'invitation de Véronique et Olivier pour vous proposer une dégustation de vins à l'aveugle. Ne vous inquiétez pas. Rien de compliqué. Je souhaite simplement vous faire passer un bon moment autour du vin. »
En ce vendredi soir du mois de novembre, Véronique et Olivier ont convié cinq couples parmi leurs amis dans leur belle maison d'un village des bords de Loire. Point commun de tous ces quadras : ils sont tous amateurs de bonne chère et de bons vins. Dans l'ensemble, ce sont plutôt les rouges qui ont leur faveur. Certains sont de fins connaisseurs, mais ce n'est pas la majorité. Ça tombe bien. Christophe Guicheteau bannit le vocabulaire complexe, le savoir approfondi, la technique... « On parle mets, vins, plaisir », résume-t-il.
Depuis vingt ans, il est commercial et courtier en vins de Loire. Il y a six mois, il a créé à Angers (Maine-et-Loire) la société Mon caviste à la maison. Le concept fonctionne sur le mode des ventes à domicile de marques très célèbres comme Tupperware ou Avon. « Nous avons une démarche de vente directe, à domicile ou dans les entreprises, indique Christophe Guicheteau. À la demande des comités d'entreprise, nous pouvons aussi animer des afterworks vers 19 heures », souligne le caviste. Son entreprise a déjà organisé plus d'une centaine de soirées. La mécanique fonctionne et le message est désormais bien rôdé : l'animateur parle beaucoup de dégustation et peu de vente, même s'il est bien là pour en conclure.
Tablier de sommelier bien ficelé autour de la taille, Christophe explique en quelques mots le déroulé de la soirée. Tout d'abord, chacun va se présenter, en précisant son type de nourriture et de vin préférés.
Ensuite, pour la dégustation, chaque hôte dispose devant lui de deux verres - un pour les rouges, l'autre pour les blancs -, d'une carte du vignoble français et d'une fiche de dégustation. Cette fiche rend perplexe l'une des convives. « J'aime le vin, mais je n'y connais rien. Je ne vais pas noter les bouteilles ! » s'exclame-t-elle.
Tout de suite, Christophe la rassure : « C'est parfait, dit-il. La fiche va simplement permettre de savoir si vous aimez ce vin et avec quel plat vous pourriez le déguster. » Et il montre qu'il s'agit d'une fiche très simple. Pour la remplir, il suffit en effet de cocher « J'aime » ou « J'aime moins », de donner une note sur 20 et d'indiquer une suggestion de plat qui irait bien avec le vin.
Ces explications données, Christophe sert le premier vin, un blanc. Il fait le tour de la table, tel un sommelier dans un restaurant. « Je vous sers 4 cl de vin à chaque fois. C'est largement suffisant pour déguster. À la fin de la soirée, chacun sera parfaitement capable de reprendre le volant. Et il y a un seau au milieu de la table si vous ne souhaitez pas tout boire. »
Une fois le vin dans les verres, les plus volubiles se lancent dans les commentaires. Notamment pour tenter d'identifier le vin. « Ce n'est pas le but », corrige Christophe. Certains dégustent en silence et observent. D'autres livrent discrètement leurs impressions à leurs voisins. Rapidement, le caviste retire la chaussette : c'est un sancerre blanc 2012. Et les participants s'échangent des idées d'accords mets et vins : un poisson, des fruits de mer, du fromage de chèvre...
Les autres vins s'enchaînent. Après le sancerre, le caviste d'un soir propose trois rouges : un fleurie 2011, un grenache IGP Pays d'Oc, puis un cahors 2009. Christophe les accompagne de produits du terroir que sa société vend également : terrine de canard au magret fumé, saucisson sec artisanal, foie gras...
Au fur et à mesure, les langues se délient. Les couples s'interrogent : « J'aime bien le premier rouge. Et toi ? » Même les participants les plus effacés au départ de la soirée commencent à donner leur avis. Ils se mettent à jouer avec les plus chevronnés à qui va découvrir quel est le dernier vin. « Un liquoreux de la région », avance un des convives. Les appellations fusent, jusqu'à ce que la chaussette soit levée pour dévoiler un coteaux du layon 2011.
Après une heure trente de découverte des cinq vins, d'échanges oenoludiques et de bonne humeur, Christophe propose de clore la soirée en précisant à ceux qui pousseraient volontiers la dégustation qu'il se tient disponible pour cela. « Si vous souhaitez découvrir d'autres vins, n'hésitez pas à organiser chez vous, avec des amis ou de la famille, une soirée Mon caviste à la maison. »
Dans son catalogue, il dispose d'une trentaine de références, essentiellement des vins tranquilles issus de toute la France. « Tous nos vins sont des cuvées spécialement sélectionnées par mes soins en exclusivité. Dans une gamme de prix entre 4,95 et 21,80 euros. »
Sans perdre plus de temps, Christophe distribue ses bons de commande : toute son offre de vins y figure, mais aussi ses terrines, rillettes, saucissons, chocolats, caramels... Pas de surprise pour les convives. Tous étaient là en connaissance de cause, et donc prêts à acheter.
« Le chiffre d'affaires d'une soirée comme celle-ci s'élève à 600 euros, avec un panier moyen de 80 euros par commande. Et les participants me réservent généralement une ou deux autres sessions de dégustation », confie le caviste.
En fin de soirée, ce dernier n'oubliera pas de remercier chaleureusement ses hôtes en leur offrant un magnum de vin rouge d'Anjou. Mais aussi un bon d'achat équivalent à 5 % du chiffre d'affaires réalisé au cours de la soirée.
Toutes les commandes seront ensuite gracieusement livrées chez l'hôte de la soirée dans les quinze jours qui suivent la dégustation. Ceux qui souhaitent une livraison à domicile devront payer les frais supplémentaires. Et, comme pour toute vente à domicile, chaque personne dispose d'un délai légal de rétractation de sept jours. Ce que n'oublie pas de rappeler le caviste.
À la fin de la dégustation, Christophe reprend les petites fiches des convives. « Fin 2014, nous allons sortir un guide sur les vins de Mon caviste à la maison grâce aux notes que vous avez données. Ce sera un vrai guide de consommateurs », annonce Christophe Guicheteau.
DÉBRIEFING
La dégustation dure une heure trente. Les vins s'enchaînent parfaitement. Les convives ne voient pas le temps passer.
L'animation est axée sur le goût, le plaisir... Les fiches sont très simples à remplir. L'ambiance est très conviviale et détendue.
Cinq vins, c'est bien pour la majorité des convives, même si certains habitués des dégustations souhaiteraient sans doute aller plus loin.
Les prix des vins s'étalaient de 5,60 à 16,50 euros, mais quatre sur cinq étaient au-dessus de 10 euros. Il faut adapter le choix des produits à la clientèle.
Évidemment, en amont, il faut prévenir les convives qu'il s'agit d'une vente.
Le Point de vue de
CHRISTOPHE GUICHETEAU, CRÉATEUR DE MON CAVISTE À LA MAISON
« J'ai testé le concept pendant trois ans »
« J'ai créé la société à partir d'une idée qui me trotte dans la tête depuis dix ans. Beaucoup de mes proches me demandaient de leur faire découvrir des vins et de leur dénicher des pépites. Ce que je faisais à une petite échelle, je l'ai transformé en une activité. J'ai élaboré et testé le concept pendant trois ans avant de me lancer. J'ai créé la société il y a un an avec Bertrand Baudaire, le PDG de la chaîne de restaurants La Boucherie. Aujourd'hui, nous rayonnons sur quinze départements dans l'Ouest et en région parisienne. Nous allons nous développer sur Lyon et Bordeaux. La société travaille avec des "cavistes ambassadeurs". Ce sont des vendeurs à domicile indépendants, payés à la commission sur le chiffre d'affaires. Ils sont une quarantaine et touchent entre 50 et 200 euros par dégustation. Au siège de l'entreprise, à Beaucouzé, près d'Angers, nous avons quatre salariés. Concrètement, chaque caviste ambassadeur saisit sur notre intranet les commandes. Elles sont expédiées sept jours après le délai de rétractation. Chaque séance de dégustation débouche sur un chiffre d'affaires moyen de 600 euros. »