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DOSSIER - Tour des vignobles : gagnants et perdants d'une récolte compliquée

CORSE Produire plus pour vendre plus

GRÉGORY PASQUIER - La vigne - n°260 - janvier 2014 - page 42

Avec des exportations en hausse et un millésime 2013 abondant et de qualité, les Corses abordent 2014 sereinement. Ils accélèrent la restructuration de leur vignoble.

Bienheureux les Corses ! « Nous n'arrivons pas à répondre aux demandes d'achats, explique Bernard Sonnet, directeur du Conseil interprofessionnel des vins de Corse (CIV Corse). Nous pourrions commercialiser 100 000 hl de plus. Nous sommes en sous-volume. Et nous avons la chance d'avoir un bon millésime 2013, sans baisse de récolte, contrairement aux deux précédents. » La production totale de vin en Corse est passée de 330 000 hl en 2012 à environ 360 000 hl en 2013.

Dans ce contexte, « l'augmentation du volume ne devrait pas avoir d'impact sur les prix du vrac », poursuit le directeur du CIV Corse. Le cours de l'IGP Île de Beauté rosé était de 100 euros l'hectolitre à la fin novembre. Il devrait rester stable cette année.

Belle progression à l'export. Depuis les arrachages massifs de 2008 et 2009, l'île manque de vin. Mais elle y remédie. « Nous sommes en phase de plantations nouvelles et de restructuration, indique Bernard Sonnet. En 2013, 199 ha de vignes ont été plantés ou restructurés. En 2014, ce seront 231 ha. Nous avons 6 000 ha de vigne en production. Nous estimons qu'il faudrait atteindre une dizaine de milliers d'hectares d'ici 2020 pour répondre à la demande. »

Les cépages plantés sont le niellucciu et le sciaccarellu pour la production de rouges et de rosés ainsi que le vermentino et le bianco gentile en blanc. Des blancs « qui se valorisent mieux que les rosés », assure Jean Foch, directeur de l'Union de vignerons de l'île de Beauté (UVIB). Mais à l'heure actuelle, ils ne représentent que 10 % de la production totale de vin corse. Loin derrière le rouge (25 à 30 %) et surtout le rosé (60 à 65 %), dont les volumes augmentent de 1 à 2 % chaque année.

Les vins corses connaissent une belle progression à l'export. « Sur les dix dernières années, la part de nos volumes exportés est passée de 10 à 18 % de notre production », souligne Bernard Sonnet.

Alain Mazoyer, le directeur des Vignerons corsicans, le deuxième opérateur corse, qui exporte 20 à 25 % de sa production, ajoute : « Les marchés des pays nordiques, de l'Angleterre et du Canada repartent et ceux des États-Unis ou du Japon sont en progression constante. »

« La saison d'été sera déterminante. » En Corse, les voyants sont donc au vert pour démarrer l'année. Alain Mazoyer pense « qu'elle apportera de nouvelles perspectives de développement et des occasions de diversifier les marchés » de son entreprise.

Jean Foch reste prudent. « Nous exportons environ 15 000 hl en Allemagne, principalement des blancs et des rouges. La pression exercée sur les prix par ce marché pourrait perturber nos exportations. » Et même si toute la production de l'UVIB est déjà engagée, « la saison d'été sera déterminante », prévient-il. Car les 70 000 hl de rosés que ce groupe coopératif a produits en 2013 seront surtout consommés durant cette période.

+ 10-15 %

En 2013, la production d'IGP est en hausse de 10 à 15 % par rapport à 2012, alors que la récolte d'AOP « serait en légère baisse », explique l'interprofession. Sachant qu'en Corse, la production d'IGP représente le double des AOP : elle s'élève à environ 250 000 hl, alors que les AOP se situent autour de 110 000 hl.

Le Point de vue de

Emmanuel Venturi, propriétaire du domaine Vico, 76 ha à Ponte-Leccia (Haute-Corse), et son associé François Acquaviva

« Une production inférieure à ce que nous pourrions vendre »

Emmanuel Venturi (à gauche) © C. CRUELLS

Emmanuel Venturi (à gauche) © C. CRUELLS

« Le millésime 2013 est de qualité. Nous avons produit 3 950 hl de vin, soit 15 % de plus que l'an dernier. Cette année, nous avons choisi de produire plus de vins rouges pour reconstituer nos stocks, car notre production est inférieure à ce que nous pourrions vendre. Il y a cinq ou six ans, nous avions deux ans de réserve. Aujourd'hui, nous n'en avons plus que pour six à huit mois, car nous avons une forte demande sur ces vins. Le domaine Vico commercialise huit références de blancs, rouges et rosés, principalement en AOP Corse, entre 6 et 35 euros la bouteille prix professionnel. Comme tous les ans, nous allons pratiquer des hausses de prix de 2 à 4 % sur les gammes de 12 à 35 euros. Ce sont simplement des réajustements par rapport au coût du transport. Car en Corse, nous payons pour faire venir les matières sèches et pour expédier nos vins. Nous vendons 40 % de notre production sur l'île, 30 % sur le continent et 30 % à l'export. Nos exportations sont en forte augmentation depuis quatre ans, notamment aux États-Unis et en Belgique. Cette année, nous espérons même nous implanter dans les Caraïbes. Nous prospectons aussi à Hong Kong, au Japon et à Macao (Chine). La conjoncture sur le marché mondial est compliquée. Nous avons fait le choix d'élargir notre gamme en plantant des cépages autochtones comme le bianco gentile ou le genovèse et de diversifier nos marchés. Pour le moment, ça nous réussit bien. »

Cet article fait partie du dossier Tour des vignobles : gagnants et perdants d'une récolte compliquée

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