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DOSSIER - Rendement : viser plus haut

Joël Pierre, 14 ha, François Legros, 14 ha, et Pierre-Jean Coulon, 20 ha, à Saint-Gengoux-le-National et Saint-Vallerin (Saône-et-Loire) « Quatre petites récoltes de suite, c'est trop ! »

La vigne - n°263 - avril 2014 - page 26

Chez ces trois coopérateurs, les aléas climatiques se sont ajoutés à l'esca pour réduire les rendements. Ils doivent maintenant tailler dans leurs coûts et leurs prélèvements.
JOËL PIERRE, FRANÇOIS LEGROS ET PIERRE-JEAN COULON, coopérateurs à la cave des Vignerons de Buxy (Saône-et-Loire), vont revoir l'organisation de leurs chantiers pour diminuer la consommation de gasoil et réduire ainsi leurs coûts. © J.-F. MARIN

JOËL PIERRE, FRANÇOIS LEGROS ET PIERRE-JEAN COULON, coopérateurs à la cave des Vignerons de Buxy (Saône-et-Loire), vont revoir l'organisation de leurs chantiers pour diminuer la consommation de gasoil et réduire ainsi leurs coûts. © J.-F. MARIN

« En quatre ans, nous avons perdu une récolte complète », résument Joël Pierre, Pierre-Jean Coulon et François Legros. Tous trois coopérateurs à la cave des Vignerons de Buxy (Saône-et-Loire), ils produisent des appellations Bourgogne, Mâcon et Côte châlonnaise en rouge et en blanc. Les rendements autorisés vont de 58 à 72 hl/ha. Mais ces quatre dernières années, ils sont loin d'avoir fait le plein. Sur leurs exploitations, le froid, les pluies, le vent et la grêle se sont succédé.

Aux dégâts dus au climat s'ajoutent ceux provoqués par l'esca. « En quatre ans, j'ai perdu 1 000 hl valorisés en moyenne à 220 €/hl. Cela représente un manque à gagner de 220 000 euros », calcule Joël Pierre. Les trois vignerons, assurés, ont touché pour ces quatre années de 50 000 à 80 000 euros d'indemnisation suivant leurs contrats. Cela ne suffit pas à couvrir les pertes. « Avec la franchise de 15 %, notre marge s'évapore d'emblée », constate Pierre-Jean Coulon. Ces petites récoltes successives ont progressivement réduit le rendement triennal qui sert de base au déclenchement de l'indemnisation. « En 2014, j'ai enlevé une appellation de mon contrat car cela ne servait plus à rien de l'assurer », rapporte Joël Pierre.

Les réserves qu'ils avaient constituées les bonnes années sont pratiquement épuisées. Ils doivent maintenant tailler dans les coûts. Joël Pierre et Pierre-Jean Coulon travaillent ensemble en Cuma intégrale. Pour économiser du temps et du carburant, ils vont améliorer leur organisation. Une étude a mis en évidence que la quantité de gasoil consommée sur la route était pratiquement aussi importante que celle utilisée dans les vignes. « Pour éviter des allers et retours, nous allons grouper les chantiers. Celui qui prendra l'enjambeur pour une intervention la réalisera dans la foulée dans les vignes des autres adhérents proches des siennes », explique Joël Pierre. « Nous allons aussi devoir réduire un peu le travail du sol en revenant partiellement au désherbage chimique sous le rang pour utiliser moins l'interceps », ajoute Pierre-Jean Coulon.

Jouer sur les stocks. De son côté, la coopérative fait tout pour préserver la rémunération de ses adhérents. « Nous payons chaque millésime sur trente mois, cela nous aide à étaler les pertes », précise François Legros, le président. En vendant 85 à 90 % de vin conditionné, la cave ne profite qu'à la marge de la hausse des cours du vrac. Mais elle peut jouer sur ses stocks. « En 2009 et 2010, nous avons gardé des vins que nous ne voulions pas brader. Aujourd'hui, nous les vendons en bouteilles à un bon prix. Cela génère un complément de rémunération », poursuit-il. Pour le millésime 2013, la coopérative a également porté la part versée en acompte de 40 à 45 %.

Cela ne suffira pas à combler les pertes liées aux petites récoltes. « Pour boucler mon budget 2014, je vais devoir faire l'impasse sur les prélèvements privés », affirme Joël Pierre. Pour redresser durablement la situation, tous les trois espèrent de bonnes années 2014, 2015 et 2016 ! « Nous pourrons ainsi mettre des blancs en réserve grâce au VCI », note François Legros. Et pour réduire les risques climatiques, plusieurs ODG envisagent de s'équiper de canons destinés à lutter contre la grêle.

L'esca grignote l'outil de travail

Selon la chambre d'agriculture de Saône-et-Loire, les dégâts causés par l'esca nécessitent de replanter 540 ha par an, alors que le vignoble couvre 13 500 ha. En 2012, cet effort aurait coûté 20 millions d'euros aux vignerons du département. Comme si cela ne suffisait pas, d'autres dépérissements apparaissent. « Nous avons un problème lié au porte-greffe 161-49, qui concerne aujourd'hui une soixantaine d'hectares de jeunes vignes chez nos adhérents », indique François Legros. Pour maintenir le potentiel de production, le renouvellement du vignoble reste essentiel. Encore faut-il pouvoir le financer. « Cette année, je vais être obligé de remplacer moins de manquants et de repousser des plantations, regrette Joël Pierre. Je sais bien que si le potentiel de production baisse, cela réduira d'autant mes marges et donc mes possibilités de renouvellement, mais je n'ai pas le choix. »

L'essentiel de l'offre

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