Parmi les facteurs d'attractivité d'une coopérative, les frais de vinification figurent en bonne position. Ceux-ci dépendant étroitement du volume qu'elles vinifient. De ce fait, elles se concurrencent pour conserver ou accroître ce volume. Un sujet sensible.
D'autant plus que « la situation s'est tendue ces dernières années avec la succession de petites récoltes qui a renchéri nos coûts de vinification, confie Bernard Roustans, directeur de la cave Costebelle, à Tulette, dans la Drôme. Ils se situent normalement dans une fourchette de 18 à 20 €/hl. En 2012, ils ont grimpé à 21,50 €/hl et nous estimons qu'ils ont atteint 23 €/hl sur la récolte 2013, car nos volumes sont tombés de 85 000 à 66 000 hl. » Ces dernières années, la coopérative a maintenu ses surfaces en accueillant de nouveaux coopérateurs. Mais elle souffre de la baisse des rendements.
« Dans notre région, les frais varient entre 17 et 25 €/hl, estime Joël Reynaud, président de Coop de France Alpes-Méditerranée (Paca). C'est effectivement un élément d'attractivité pour nos adhérents, mais il faut rester prudent. Certaines caves peuvent avoir des frais plus élevés, car elles ont investi pour assurer leur avenir. D'autres peuvent afficher des frais très bas car elles n'ont pas investi. Et leur avenir est incertain. »
La perte d'adhérents peut rapidement entraîner une cave dans un engrenage périlleux. « Quand une cave commence à perdre des volumes, ses frais augmentent, ce qui incite des coopérateurs à partir. Et ces départs conduisent à une nouvelle hausse, rendant la cave de moins en moins attractive. L'effet inverse se produit pour les coopératives qui attirent des adhérents », analyse Tino Gonzalès, de Coop de France Languedoc-Roussillon.
« Les coûts de vinification polarisent l'attention des coopérateurs, mais ce n'est pas le seul critère à considérer, nuance Éric Daband, expert comptable chez Exco Languedoc, qui suit une quinzaine de coopératives de la région. D'une part, parce que chaque cave a son mode de calcul. Les comparaisons sont donc souvent faussées. D'autre part, parce que certaines caves peuvent avoir des frais élevés, notamment celles qui vendent en conditionné, mais elles valorisent bien leurs vins. Et au final, leurs coopérateurs ont une rémunération intéressante. »
Dans les coopératives suivies par ce cabinet, les frais de cave varient de 12 à 30 €/hl pour la récolte 2011 et les frais nets retenus de 10 à 25 €/hl. Un écart du simple au double à mettre en perspective avec la valorisation des vins.
Rognes vinifie à façon pour diminuer ses coûts
La coopérative de Rognes, dans les Bouches-du-Rhône, fait partie de ces petites structures qui arrivent à se maintenir et à investir malgré 20 000 hl de production annuelle. En 2012, elle a déboursé 10 millions d'euros dans une toute nouvelle cave de vinification. Pour la rentabiliser, elle a signé un partenariat avec le château de Beaulieu : ce dernier lui confie la vinification de la totalité de sa récolte, soit 10 000 hl. La coopérative a ainsi modéré la hausse des frais de vinification générée par ce lourd investissement.
« Dans nos anciennes installations, nos frais de vinification tournaient autour de 22 €/hl, souligne le directeur Jean-Patrice Margnat. Avec la nouvelle cave, ils sont montés à 27 €/hl. Mais nous avons l'ambition de les faire baisser. La maîtrise des coûts est un enjeu crucial pour des structures comme la nôtre. Nous sommes très vigilants. Nous suivons tous les trimestres notre balance comptable ligne par ligne. Nous avons certainement des économies à faire sur la consommation en eau et en électricité. »
nocoop négocie les prix des produits oenologiques
Dix-huit caves coopératives d'Aquitaine se sont regroupées pour négocier les prix d'achat de leurs produits oenologiques et d'hygiène vinaire. Lancée dès 2005 par Univitis et la cave des Hauts de Gironde, l'expérience s'est pérennisée l'année suivante avec la création d'nocoop, une SARL entièrement dédiée à cette activité. « Avec un volume vinifié d'un million d'hectolitres, nous pouvons négocier des tarifs intéressants, indique Serge Labat, directeur adjoint d'Univitis et en charge d'nocoop. Les économies vont jusqu'à 50 à 70 % pour les petites structures et sont de 5 à 10 % pour les grosses coopératives. Et avec nos volumes, nous intéressons un plus grand nombre de fournisseurs. »
nocoop achète à tarif négocié les produits choisis par les coopératives adhérentes et leur refacture ces produits en incluant une commission de 2 % (1 % pour les frais de fonctionnement, 1 % pour financer des essais sur les produits). Une réunion est organisée chaque année au mois de juin pour faire un point sur les nouveautés. « Notre regroupement permet également des échanges techniques entre les oenologues sur les différents produits », souligne Serge Labat. Depuis 2013, les coopératives peuvent directement passer commande sur le site internet oenocoop.fr. Elles y trouvent également les fiches techniques, les certificats de conformité, d'alimentarité... Cette présence sur le net a généré de nouvelles demandes d'adhésion, y compris d'autres régions. Une idée à reprendre !