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VIGNE

Viti-Pulvé maltraite les idées reçues

MARTIN CAILLON - La vigne - n°267 - septembre 2014 - page 34

Début juillet, en Bourgogne, le CIVC a présenté les résultats de ses derniers essais de pulvérisation qui bousculent bien des préjugés sur l'efficacité des traitements. L'occasion d'une mise au point.
Le Polyjet de l'entreprise Bobard Jeune, distingué au palmarès du dernier Sitevi, réunit les trois technologies de pulvérisation : jet projeté, jet porté et diffuseurs pneumatiques.  ©  M. CAILLON

Le Polyjet de l'entreprise Bobard Jeune, distingué au palmarès du dernier Sitevi, réunit les trois technologies de pulvérisation : jet projeté, jet porté et diffuseurs pneumatiques. © M. CAILLON

Les visiteurs de Viti-Pulvé ont pu constater le renouvellement de l'offre de matériels en face par face opéré depuis trois ans par les constructeurs. De gauche à droite : les nouveaux diffuseurs pneumatiques AB Most, de Berthoud, moins encombrants que l'ancienne génération car intégrés dans le corps de la descente ; la descente pneumatique en toile souple Flexispray, de Grégoire, la plus légère du marché ; la descente pneumatique en caoutchouc souple mais robuste TB+, de Faupin ; l'équipement Polyjet, de Bobard, qui combine jet projeté, jet porté et diffuseurs pneumatiques ; enfin, la descente à jet porté Précijet, de Tecnoma, qui propulse un flux d'air laminaire régulier sur toute la hauteur de la végétation. © M. CAILLON

Les visiteurs de Viti-Pulvé ont pu constater le renouvellement de l'offre de matériels en face par face opéré depuis trois ans par les constructeurs. De gauche à droite : les nouveaux diffuseurs pneumatiques AB Most, de Berthoud, moins encombrants que l'ancienne génération car intégrés dans le corps de la descente ; la descente pneumatique en toile souple Flexispray, de Grégoire, la plus légère du marché ; la descente pneumatique en caoutchouc souple mais robuste TB+, de Faupin ; l'équipement Polyjet, de Bobard, qui combine jet projeté, jet porté et diffuseurs pneumatiques ; enfin, la descente à jet porté Précijet, de Tecnoma, qui propulse un flux d'air laminaire régulier sur toute la hauteur de la végétation. © M. CAILLON

La journée technique Viti-Pulvé, organisée par les chambres d'agriculture de la Côte-d'Or, de la Saône-et-Loire et de l'Yonne, s'est tenue le 10 juillet dernier à Beaune (Côte-d'Or). À défaut de démonstrations de matériels, impossibles à cause de la pluie tombée la veille, la manifestation a permis de faire le point sur les avancées en matière de pulvérisation. Le Comité interprofessionnel du vin de Champagne (CIVC) a dévoilé à cette occasion le bilan des tests menés l'an passé par le Groupe de machinisme champenois. Ce dernier a quantifié les dépôts de produits en fonction des conditions de passage, des pratiques et des réglages des pulvérisateurs. Ces résultats vont parfois à l'encontre d'idées communément admises.

Plus on apporte d'eau, plus il y a de produit sur les grappes

« C'est faux, indique Marie-Pierre Vacavant, du CIVC, chiffres à l'appui. Utiliser un gros volume d'eau n'est pas la solution pour apporter plus de produit sur les grappes. » Ainsi, augmenter le volume par hectare de 100 l, en passant de 150 l à 250 l, avec un appareil pneumatique et sans augmenter la vitesse d'air, peut entraîner une baisse de 20 % du produit déposé sur la zone des grappes. « Le volume par hectare est lié à la technologie de pulvérisation. Augmenter ce volume sur un appareil pneumatique, sans augmenter la vitesse d'air, entraîne la formation de plus grosses gouttes, moins aptes à atteindre les grappes. Si l'on réduit le nombre de diffuseurs en début de végétation, il ne faut pas modifier le volume de bouillie par hectare, sauf si les réglages de l'appareil l'imposent », complète l'experte.

Plus on roule lentement, plus on dépose de produit sur les grappes

Faux, selon l'essai réalisé par le CIVC. L'expérimentation a été menée avec un appareil à jet porté (aéroconvection). Le tracteur est passé successivement à 3, 4, 5, 6 et 7 km/h. C'est à 5 km/h que les dépôts de bouillie sont les plus élevés. Au-delà, et logiquement, les quantités déposées baissent. Elles diminuent de 20 % à 6 km/h et chutent de 50 % à 7 km/h. Plus surprenant, la perte s'élève aussi à 40 % à 3 km/h. En cause, la puissance de la ventilation qui, en s'attardant, maintient les feuilles dans le flux d'air, comme des drapeaux flottant au vent. Une partie de la bouillie traverse alors le plan de palissage sans s'arrêter. Réduire la vitesse d'avancement implique donc de réduire également la vitesse de rotation de la turbine.

Les traitements réalisés par temps chaud sont moins efficaces

Vrai. Pour étudier l'influence de la météo sur la qualité de pulvérisation, le CIVC a traité une même vigne le matin, par une température de 19°C et un taux d'humidité de 55 %, puis l'après-midi, par 27°C et 39 %. Les deux traitements ont été réalisés à 5 km/h avec un appareil pneumatique pulvérisant 150 litres par hectare en face par face par le dessus. La vigne traitée l'après-midi a reçu un quart de produit en moins (-26 % sur grappes, -28 % sur feuilles) par rapport à celle pulvérisée le matin. Sous l'effet de la chaleur, de petites gouttes se sont évaporées entre leur formation et le feuillage. Pour éviter cela, le CIVC recommande de traiter tôt le matin, sans vent, et lorsque l'humidité relative est comprise entre 60 et 95 % et la température entre 12°C et 20°C.

Mieux vaut attendre que les feuilles soient sèches avant de traiter

Tout dépend du pulvérisateur. Concrètement, le CIVC a examiné l'incidence de la rosée sur la qualité de l'application de deux appareils : un pulvérisateur à jet porté, monté sur un enjambeur et réglé à 150 l/ha, et un appareil à jet projeté monté sur un chenillard et débitant 400 l/ha.

Le résultat est sans appel : l'appareil à jet porté, grâce à l'assistance d'air, « évacue les gouttes de rosée avant l'application de la bouillie. Il dépose la même quantité de produit dans la zone des grappes quelle que soit l'importance de la rosée ». Dépourvu d'assistance d'air, le pulvérisateur à jet projeté accuse, en revanche, « une perte de 40 % de produit par lessivage avec une rosée moyenne, et de presque 60 % avec une forte rosée ».

La densité du feuillage est sans effet sur la quantité de produit déposée

À nouveau, tout dépend du type de matériel. En jet porté, les performances sont équivalentes sur une vigne à expression végétative forte ou plus faible. « Le flux d'air porte efficacement les gouttes dans les deux cas », note le CIVC. À l'inverse, avec un pulvérisateur à pendillards, sans assistance d'air, la perte de produit est de plus d'un quart (-26 %) sur les feuilles et de près de moitié (-47 %) sur les grappes lorsqu'on passe d'une vigne peu vigoureuse à une vigne très dense. Pour parer à ces piètres performances, « il peut être utile d'envisager de limiter l'expression végétative par la maîtrise des intrants, un enherbement ou des travaux en vert ».

Il faut traiter peu de rangs à la fois pour être efficace

Vrai. Le test relève qu'en passant tous les deux rangs avec un chenillard dans une vigne étroite en pleine végétation, les faces pulvérisées indirectement reçoivent 30 % de produit en moins par rapport aux faces situées du côté des diffuseurs. À ce même stade végétatif, un passage toutes les trois ou quatre routes augmente considérablement le risque de sous-dosage. Dans le premier cas, le dépôt de bouillie sur le rang pulvérisé indirectement baisse de 50 % sur les feuilles et de 60 % sur les grappes par rapport à la face traitée directement. En passant toutes les quatre routes, le déficit sur les deux rangs traités indirectement atteint 65 % sur les feuilles et 70 % sur les grappes. Le CIVC recommande donc d'adapter les pratiques de pulvérisation à la densité de feuillage. Et pour ce faire, de limiter l'écartement des rangs de passage plutôt que de réduire la vitesse d'avancement.

En Bourgogne : un parc hétérogène vieillissant

Vincent Polvèche, directeur du Groupement d'intérêt public (GIP) Pulvé, a également dressé, au cours de l'après-midi, le bilan des contrôles pulvés réalisés depuis cinq ans. En Bourgogne, 1 123 pulvérisateurs viticoles ont été inspectés. Les résultats révèlent une grande hétérogénéité du parc selon les départements. Les viticulteurs de Côte-d'Or sont encore équipés en majorité (+ de 60 %) de pendillards à jet projeté. Ces appareils ont un âge moyen de 15 ans. À l'inverse, presque 70 % des exploitations de Saône-et-Loire et plus de 80 % de celles établies dans l'Yonne travaillent avec des appareils pneumatiques. Distinction notoire entre les deux départements, 80 % des machines de l'Yonne pulvérisent en face par face, contre un peu plus de 40 % seulement en Saône-et-Loire. Le reste du parc de ce département est constitué d'appareils à voûte (30 %) ou à canon (25 %). Avec 18 ans et demi d'âge moyen (3 ans et demi de plus que la moyenne), les pulvérisateurs de Saône-et-Loire sont les plus vieux de la région.

Parmi les principaux défauts relevés lors des contrôles, le GIP Pulvé note que 40 % des appareils de viticulture sont dépourvus de filtre central au refoulement et 30 % au niveau des sections. 16 % présentent des fuites, dont 4 % considérées comme majeures. Enfin, 20 % des appareils sont affectés de corrosion, de lésions aux soudures, de déformation et/ou d'usure des tuyaux et 30 % présentent une erreur sur l'indication de pression.

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