En deux jours : 470 mm d'eau ! C'est le cumul relevé sur le massif des Albères, tout au sud des Pyrénées-Orientales, à la frontière avec l'Espagne, les 29 et 30 novembre dernier. Ce déluge a provoqué de lourds dégâts dans le vignoble de Banyuls, situé en contrebas. La Baillaury, le Ravane, le Douy, trois petits cours d'eau, ont vu leur débit grossir furieusement. En sortant de leur lit, ils ont emporté 2 à 3 ha et sérieusement endommagé une dizaine d'autres : souches couchées et limonées, palissage arraché... Les pluies torrentielles qui les ont fait gonfler ont également démoli des murettes et raviné des vignes en coteaux.
Situés plus au nord-ouest, le vignoble des Fenouillèdes et celui des Aspres n'ont pas été épargnés. Le barrage de Caramany a pourtant bien joué son rôle : il s'est rempli de 14 m en 24 heures. Mais il n'a pas pu empêcher la crue dévastatrice de l'Agly. À la cave coopérative de Cases-de-Pène, le président Jean-Christophe Bourquin déplore des dégâts sur environ 2 ha de vigne tout cumulé. « Des extrémités de parcelle ont été submergés. Tout le limon est parti, il ne reste que la terre des racines », se désole le viticulteur.
Le problème n'est pas nouveau. En janvier 2013, une inondation similaire s'était produite au même endroit. L'incident avait été signalé mais rien n'a été fait. « Depuis 24 ans que je suis installé, l'Agly n'a jamais été nettoyé. Nous avons déjà subi une dizaine d'inondations », poursuit le viticulteur catalan, découragé.
Dans l'Aude, les pluies diluviennes sont tombées en deux temps : un premier orage a éclaté le 24 novembre, avec un cumul de 250 mm en une nuit dans la région de Bizanet.
Cinq jours plus tard, un nouveau déluge s'est abattu sur une zone plus importante, touchant tout l'est du département. Une quinzaine de communes sont sérieusement affectées. « Environ la moitié du vignoble du département est impacté à des degrés divers », estime Emmanuel Rouchaud, chef du service viticulture-oenologie de la chambre d'agriculture. Vignes arrachées, palissages couchés, ravinement, débris de tous ordres jonchent les vignes...
À Portel-des-Corbières, une des communes les plus touchées, Florent Noguero a perdu entre 13 et 15 ha sur les 40 ha qu'il exploite en Gaec avec son père. « C'est un désastre. La Berre, le cours d'eau qui borde mes vignes, est sortie de son lit. Elle est montée de trois mètres en un quart d'heure. La crue a été si rapide qu'elle a emporté toute la terre. Les racines sont à l'air. Il faut tout arracher. » Ce jeune viticulteur en cave particulière veut délocaliser son vignoble. « Nous avons déjà été inondés en 1999. Il avait fallu replanter 6 ha. Ces nouvelles vignes ont à leur tour été saccagées. Et le phénomène a pris de l'ampleur puisqu'il a impacté davantage d'hectares cette année. Ce n'est plus tenable. » Les chambres d'agriculture des deux départements se mobilisent pour accompagner les sinistrés dans leurs démarches d'indemnisation.