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VIN

Phénols volatils Bientôt la parade

MICHÈLE TRÉVOUX - La vigne - n°273 - mars 2015 - page 52

Une nouvelle technique d'élimination des phénols volatils a été reconnue en novembre dernier par l'OIV. Cette pratique devrait être autorisée dès les prochaines vendanges dans l'Union européenne. Deux fabricants n'attendent que cela pour commercialiser leurs matériels

C'est une avancée technologique à mettre à l'actif d'Inter Rhône. Après cinq ans d'expérimentations avec Bucher Vaslin, Patrick Vuchot, directeur du service technique de l'interprofession rhodanienne, a obtenu, en novembre dernier, la reconnaissance par l'OIV d'un procédé d'élimination des phénols volatils dans les vins. L'Union européenne, qui suit les recommandations de l'OIV pour faire évoluer la réglementation, va certainement l'ajouter à la liste des pratiques oenologiques autorisées.

Dès les prochaines vendanges, les vignerons et les oenologues devraient disposer d'un traitement curatif pour éliminer les phénols volatils, ces composés indésirables produits par les Brett, responsables des goûts de sueur de cheval et d'écurie.

Le traitement se déroule en deux temps. D'abord, on soumet le vin à traiter à une nanofiltration. Ce vin doit afficher une turbidité inférieure à 20 NTU. On en extrait ainsi une fraction d'eau et d'alcool comprenant les phénols volatils, dénommée le perméat. Les polyphénols et l'essentiel des arômes, de plus grande taille, sont retenus par le filtre et renvoyés dans la cuve initiale. Le perméat est ensuite envoyé sur une colonne contenant des charbons actifs qui vont retenir les phénols volatils. Pour finir, il est réincorporé au vin. Ainsi, seule une fraction du vin passe sur l'adsorbant.

Cette innovation préserve au maximum les composés d'intérêt oenologiques (polyphénols et arômes). La structure et la couleur du vin ne sont pas modifiées par le traitement.

La nanofiltration extrait 90 % des phénols volatils du vin à traiter, 40 % de ses esters volatils ainsi que les terpènes. Mais les alcools supérieurs restent dans le vin. Au niveau organoleptique, les vins traités ne présentent plus le caractère désagréable des vins à Brett et ils sont plus fruités. « On ne retrouve pas tout à fait le niveau de complexité aromatique des vins avant contamination, mais on se situe bien au-dessus du niveau des vins contaminés », précise Patrick Vuchot.

Le traitement permet de réduire les phénols volatils en dessous du seuil de perception, quelle que soit leur concentration initiale. Le niveau d'élimination des phénols volatils est à ajuster en fonction du style des vins. « Sur des vins à profil fruité, on perçoit facilement les phénols volatils. Mieux vaut ramener la teneur en dessous du seuil de perception à 400 µg/l. Sur des cuvées haut de gamme, élevées en barriques, des teneurs de 600 et 800 µg/l sont acceptables », précise Patrick Vuchot. Ce nouvel outil ne doit pas pour autant conduire à un relâchement des mesures de prévention.

« Un vin contaminé, même après traitement, sera toujours inférieur au même vin avant contamination. De plus, ce traitement aura un coût qui devrait être comparable à celui de l'électrodialyse. Les producteurs ont donc tout intérêt à continuer à se prémunir contre les contaminations », insiste l'expert.

Deux fabricants dans les starting-blocks

L'osmoseur Flavy ML de Bucher Vaslin.

L'osmoseur Flavy ML de Bucher Vaslin.

L'Osmoseur Perf de Michaël Paetzold. © J. JAMBON

L'Osmoseur Perf de Michaël Paetzold. © J. JAMBON

Bucher Vaslin possède une gamme d'osmoseurs pour concentrer les moûts ou désalcooliser les vins.

Il suffit de changer leurs membranes pour les transformer en nanofiltres.

Bucher Vaslin dispose également d'une colonne d'adsorption sur charbon actif Flavy EP, capable de traiter 100 à 1 000 l de perméat à l'heure. Son prix : 4 400 €, livré avec 50 kg de charbon actif, ce qui permet d'assurer le traitement de 1 000 hl de vin.

L'ensemble composé des nanofiltres plus la colonne de charbon actif peut traiter 15 à 70 hl par jour selon le nombre de cartouches utilisées, pour réduire de moitié la teneur en éthylphénol.

L'entreprise Michaël Paetzold travaille sur le même process depuis huit ans, sans le tester en France, faute d'autorisation. Ses installations tournent déjà dans des pays qui l'autorisent. La société bordelaise proposera des équipements avec la nanofiltration couplée à une colonne d'adsorption sur charbon actif.

Le filtre peut, là aussi, être utilisé pour d'autres traitements (concentration, désalcoolisation) en changeant sa membrane. Avec un débit de 600 l/h, il faut compter 14 heures de traitement pour une cuve de 50 hl dont on souhaite ramener la teneur en phénols volatils de 700 à 300 µg/l. Michaël Paetzold réalisera également le traitement à façon.

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