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Le rôle de l'administrateur de coopérative

AUDE LUTUN - La vigne - n°273 - mars 2015 - page 74

La loi d'avenir agricole de 2014 renforce le pouvoir des administrateurs de coopérative et impose de les former afin qu'ils soient en mesure de participer judicieusement aux prises de décision. Le point sur leurs missions et leurs devoirs.
POINT CLÉ POUR LES ADMINISTRATEURS : les investissements, qui demandent d'avoir une vision stratégique de l'entreprise. © C. WATIER

POINT CLÉ POUR LES ADMINISTRATEURS : les investissements, qui demandent d'avoir une vision stratégique de l'entreprise. © C. WATIER

À quelles décisions l'administrateur de coop prend-il part ?

À toutes les décisions qui relèvent du conseil d'administration. À ce titre, il arrête les comptes à la clôture de l'exercice. Il arbitre entre les intérêts de la coopérative et ceux des adhérents. C'est le point le plus délicat de sa mission : faut-il investir ? Baisser ou augmenter la rémunération des coopérateurs ? Fusionner ? Etc. C'est également le conseil qui fixe le montant des indemnités des administrateurs qui en perçoivent.

Si un administrateur est en désaccord avec un projet, il doit avoir la possibilité de faire valoir ses arguments. Mais si le conseil adopte le projet, il doit être solidaire de la décision et ne pas la critiquer publiquement.

La loi d'avenir agricole de 2014 a renforcé le pouvoir de l'administrateur. Il a accès à toutes les informations qui lui sont utiles pour exercer son mandat. C'était déjà le cas auparavant, mais ce n'était pas formalisé de manière aussi claire.

À quelles obligations est-il tenu ?

Il doit être disponible pour sa coopérative et avoir l'esprit collectif. Il doit participer de manière active à la prise des décisions et à leur application. De ce fait, sa participation à toutes les réunions du conseil est obligatoire, bien qu'aucune sanction ne soit prévue en cas d'absence. Dans la pratique, cette obligation n'est pas toujours respectée, si bien que « des coopératives fixent des règles d'absentéisme, précise Dominique Saintout, directeur de la Fédération des caves coopératives d'Aquitaine. Si un administrateur est trop souvent absent, le président pourra l'interroger sur son engagement au moment de son renouvellement. » Même absent, un administrateur est solidairement responsable des décisions prises par le conseil d'administration.

L'administrateur assure aussi le lien entre les coopérateurs et le conseil d'administration, tout en ayant l'obligation de garder la confidentialité sur les débats du conseil et les prises de position de ses membres.

Qui l'élit ?

L'assemblée générale. Le candidat au poste d'administrateur doit envoyer une lettre recommandée avec avis de réception au moins dix jours avant la date de l'assemblée générale. Mais il peut également se déclarer lors de l'assemblée générale. Avant le vote, le président de la coopérative doit citer les candidatures reçues et demander s'il y a d'autres postulants. Il doit également rappeler le nombre de postes à pourvoir et les règles du vote. Les administrateurs sont élus à la majorité des suffrages exprimés. Il est conseillé que l'élection se fasse à bulletin secret. Les mandats durent généralement de deux à quatre ans, avec un rythme de renouvellement qui oscille entre la moitié et le quart à chaque assemblée générale.

Doit-il être formé ?

Oui. La loi d'orientation agricole de 2014 insiste sur ce point. Elle impose aux coopératives l'obligation de former ses administrateurs à chaque renouvellement de mandat afin de les aider à apprécier les personnes et les situations, et à avoir une vision stratégique de l'entreprise. L'assemblée générale annuelle doit voter le budget nécessaire pour cette formation. Pour accompagner les coopératives, Coop de France a créé l'an dernier l'Institut de la coopération agricole qui vise à recenser et à évaluer l'offre des formations au niveau national et régional.

« Vivre et décider collectivement, ce n'est pas évident, précise Lucie Suchet, juriste à la Confédération des caves viticoles de France et corédactrice du guide de l'administrateur. Se former est d'autant plus important que les coopératives grossissent et vendent sur les marchés internationaux. »

« Nous proposons une formation de quelques jours par an pendant trois ans, indique Dominique Saintout. Ces sessions permettent de comprendre le fonctionnement d'une coopérative, mais aussi de savoir prendre la parole ou rédiger un compte rendu. Cela conduit à rendre les discussions plus efficaces lors des conseils d'administration. »

Le Point de vue de

OLIVIER REY, ADMINISTRATEUR À LA CAVE DE DIE JAILLANCE, DANS LA DRÔME

« Nous mettons notre matière grise en commun »

 © STUDIO LATTARD

© STUDIO LATTARD

« Je suis administrateur depuis une quinzaine d'années et vice-président depuis deux ans de Die Jaillance. Pour moi, être administrateur, c'est la mise en commun de matière grise par des vignerons qui partagent la même passion. Il faut savoir sortir du cadre de son exploitation pour analyser les orientations que proposent la direction et le bureau. Ce fut le cas lorsque nous avons construit l'an dernier une cave en Gironde pour vinifier des crémants de Bordeaux. Le travail des commissions est important pour que chacun se sente impliqué. Quand on débat d'un sujet au sein du conseil, le témoignage des administrateurs de la commission en question donne confiance aux autres. Le travail d'explication et d'écoute auprès des adhérents est tout aussi important. C'est la raison pour laquelle la coop organise des réunions locales avec une dizaine d'adhérents pour faciliter les échanges. »

Le Point de vue de

LIONEL MONCLA, ADMINISTRATEUR DE LA CAVE DE LANDERROUAT, EN GIRONDE

« Nous avons décidé collégialement d'une fusion »

« La cave de Langoiran, dont j'étais administrateur et membre du bureau, a fusionné avec celle de Landerrouat l'an dernier. Je suis maintenant administrateur de la cave de Landerrouat. Cette fusion n'a pas été une décision simple à prendre. Le bureau l'a proposée, mais opter pour ce choix s'est fait de manière collégiale par le conseil d'administration. Nous avions déjà essayé de fusionner avec d'autres coopératives, mais cela n'avait pas fonctionné. Après trois récoltes déficitaires, il devenait urgent de trouver une solution avant que nos comptes se dégradent. Nous avons ainsi pu fusionner alors que nous avions une situation économique saine. Avec cette fusion, nos coûts de vinification sont passés de 50 €/hl à 30 €/hl.

C'est un changement important pour tout le monde, d'autant que le siège de la nouvelle coopérative est à quarante-cinq minutes en voiture. Les adhérents craignaient légitimement une perte d'identité. Cette inquiétude s'est atténuée car nous avons conservé notre caveau de vente à Langoiran. Dans la coopérative de Langoiran, nous étions 30 adhérents sur 200 ha. Les commissions n'étaient pas très actives, ce qui est assez logique quand on est confronté à des difficultés économiques. Pour qu'une structure fonctionne bien, des réunions fréquentes sont nécessaires et il faut faire travailler les commissions. Mais cela suppose d'avoir du personnel à la coopérative pour organiser et relancer les gens. La communication est aussi indispensable entre les membres du conseil et les adhérents. C'est le rôle d'un administrateur de transmettre les informations aux coopérateurs et de faire remonter leurs questions au conseil d'administration. »

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