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VIGNE

Maladie La sensibilité au mildiou diffère selon les clones

CHRISTELLE STEF - La vigne - n°279 - octobre 2015 - page 37

Des travaux sur le pinot noir et le cabernet franc en conditions contrôlées montrent que certains clones sont moins sensibles que d'autres au parasite.
Grappe de pinot noir. © GUTNER

Grappe de pinot noir. © GUTNER

Grappe de cabernet franc. © P. ROY

Grappe de cabernet franc. © P. ROY

SSURPRISE : TOUS LES CLONES DE PINOT NOIR NE SONT PAS ÉGAUX FACE AU MILDIOU. Certains tolèrent mieux que d'autres ce parasite. En 2013 et 2014, des chercheurs de l'Université de Haute-Alsace et de l'Agroscope de Nyon (Suisse), soutenus par les Pépinières Guillaume, à Charcenne (Haute-Saône), ont cultivé sous serre 85 clones de pinot noir greffés sur le porte-greffe SO4. Au bout de huit semaines, ils ont prélevé des feuilles auxquelles ils ont inoculé le mildiou. Cinq jours plus tard, le mildiou avait fortement sporulé sur 62 clones, peu sporulé sur 17 clones et très peu sur les 6 restants.

Des clones de pinot noir plus riches en stilbènes

Soumis à des analyses fines, ces derniers se sont avérés plus riches en stilbènes (viniférine et ptérostilbène) que les autres. Ce serait l'explication de leur robustesse face au mildiou. En effet, ces composés sont connus pour être toxiques, in vitro, vis-à-vis de ce parasite.

« Au laboratoire, il existe donc des différences de sensibilité des clones de pinot noir au mildiou. Certains d'entre eux sont très peu sensibles sans toutefois être résistants à la maladie. Ces différences s'observent-elles au vignoble ? Pour l'instant, nous l'ignorons », rapporte Bernard Walter, chercheur à l'Université de Haute-Alsace aujourd'hui retraité.

Les Pépinières Guillaume multiplient deux des clones qui se sont révélés peu sensibles lors des tests, mais elles ne souhaitent pas communiquer leur nom. Elles attendent que de nouveaux résultats confirment les premières observations. Ces deux clones sont disponibles en quantité limitée. L'un est certifié et utilisé par quelques viticulteurs, l'autre est vendu en matériel standard. « Ce sont des clones qualitatifs. Ils donnent des vins excellents, avec de bonnes couleurs et des tanins soyeux. Leur niveau de production est moyen. Et ils sont plutôt moins sensibles au botrytis que les autres. En ce qui concerne les quatre autres clones, nous finissons de les caractériser puis nous les ajouterons à notre catalogue », indique Pierre-Marie Guillaume, le directeur commercial.

Même constat pour le cabernet franc

À Bordeaux, Cornelis van Leeuwen a fait il y a quelques années des observations similaires sur le cabernet franc. Ainsi, en 2009, ce professeur de viticulture à Bordeaux Sciences Agro, aidé de Katia Gindro, une chercheuse suisse, a étudié neuf clones issus de la collection privée d'un château bordelais. « Aucun d'eux n'est commercialisé », précise Cornelis van Leeuwen. En conditions contrôlées, cinq clones se sont révélés très sensibles au mildiou, trois moyennement sensibles et le dernier peu sensible. Comme dans le cas du pinot noir, c'est le moins sensible qui présentait les plus fortes teneurs en stilbènes (delta-viniférine) après l'infection.

En 2011, les chercheurs ont testé trois clones au champ, de sensibilité différente : forte, moyenne et faible. Durant toute la saison, ils n'ont effectué aucun traitement. Comme le printemps a été très sec, les inflorescences et les jeunes baies n'ont subi aucune attaque. Mi-septembre, à la veille des vendanges, il y avait malgré tout quelques symptômes sur feuilles. De nouveau des écarts sont apparus. En effet, 10,5 % de la surface foliaire du clone le moins sensible était attaquée par le mildiou contre 15,7 % pour le clone très sensible et 13,4 % pour le clone moyennement sensible. Aucun des trois clones n'a présenté de symptômes sur grappe. Ces essais n'ont pas été poursuivis.

« Certes, les différences entre les clones ne sont pas énormes. Toutefois, il y a un tiers de symptômes sur feuilles en moins sur le clone le moins sensible. Si cela pouvait permettre d'économiser un traitement, ce serait toujours ça de gagné », note Cornelis van Leeuwen. Pour le savoir, il faudrait mettre en place de nouveaux essais. Mais rien ne semble prévu à ce jour.

En attendant, le chercheur plaide pour que le critère de sensibilité des clones au mildiou soit pris en compte lors de la sélection clonale. « On a la technologie pour le faire. À qualité égale, cela permettra de choisir le clone le moins sensible. » À bon entendeur...

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