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VIGNE

Dépérissement Place à l'action

CHRISTELLE STEF - La vigne - n°286 - mai 2016 - page 44

Le 7 avril, le Cniv et FranceAgriMer ont lancé le plan national de lutte contre le dépérissement du vignoble. Voici ce qu'il faut en retenir
LES MALADIES DU BOIS ne sont pas la seule cause du dépérissement. Il faut aussi prendre en compte les viroses, la flavescence dorée... Ici, un pied atteint d'esca (forme apoplectique). © C. WATIER

LES MALADIES DU BOIS ne sont pas la seule cause du dépérissement. Il faut aussi prendre en compte les viroses, la flavescence dorée... Ici, un pied atteint d'esca (forme apoplectique). © C. WATIER

«Il y a des aventures dont il faut être. Celle-ci en est une ! », a déclaré Marie-Laëtitia Des Robert, du cabinet d'étude BIPE, le 7 avril, lors de la présentation du plan national de lutte contre le dépérissement du vignoble, à Paris, qui repose sur quatre ambitions.

Première ambition : la mise en place d'un réseau de formation aux bonnes pratiques. « On met le viticulteur au coeur de la lutte », a expliqué Luc Lurton, le directeur technique de l'interprofession de Cognac. Nombre de producteurs sont déjà sur le pied de guerre. Bernard Laurichesse, viticulteur à Verrières, en Charente, a ainsi fait part de son expérience. En 2014, il a commencé à recéper tous les pieds atteints d'esca/BDA dans une de ses parcelles d'ugni blanc âgée de 18 ans, très touchée. Grâce à cette opération, en 2015, il a amélioré le rendement de 12 % dans cette zone.

Lorsqu'il prospecte ses vignes à la recherche de ceps atteints de flavescence dorée, il en profite pour marquer les pieds touchés par l'esca, en vue de leur recépage. « En même temps, je signale aussi les pieds morts pour les éliminer en hiver, ce qui permet de lutter contre l'eutypiose. Il faut s'orienter vers la prospection intégrée des différentes maladies de dépérissement et utiliser des outils numériques pour identifier les symptômes et géolocaliser les pieds atteints. »

De son côté, Michel Chapoutier, négociant à Tain-l'Hermitage (Drôme) et président d'Inter Rhône, a insisté sur la formation. « Tout le monde doit être formé au diagnostic des maladies et à l'art de la taille », a-t-il expliqué dans une vidéo. « Il est important de valoriser les initiatives de terrain et de mutualiser les connaissances. Cela passe par la mise en place d'une plateforme internet nationale dédiée aux dépérissements, de journées de formation... », a ajouté Luc Lurton. À ce titre, les organisateurs de la journée ont mis en exergue le travail de François Dal, de la Sicavac, à Sancerre, pour promouvoir la taille respectueuse des flux de sève.

Deuxième pan du plan : l'intégration de la pépinière à l'effort de lutte. Les dépérissements provoquent une hausse de la demande en plants pour la complantation et la replantation. Or, « il y a pénurie. En dix ans, les surfaces de vignes mères de greffons ont baissé de 23 % », a déploré Jean-Philippe Gervais, le directeur des services techniques du BIVB. Les pépiniéristes ont conscience de ces difficultés. Ils replantent des vignes mères de greffons et de porte-greffes. « On a pris l'engagement de replanter 250 à 300 ha de vignes mères de greffons à l'horizon 2020-2022 », a expliqué David Amblevert, le président de la Fédération française de la pépinière viticole.

En contrepartie, il a insisté sur la nécessité qu'ont les pépiniéristes de connaître très tôt les besoins des viticulteurs pour prévoir les greffages. À cette fin, il faudrait un tableau de bord. David Amblevert a également rappelé que la filière s'est engagée dans un programme de prospection de la flavescence dorée dans les vignes mères de greffons et qu'elle a mis en place une charte de qualité adossée à la marque Entav-Inra. Enfin, il a expliqué que la pépinière viticole milite pour que le pays d'origine des greffons et des porte-greffes apparaisse sur les étiquettes des plants.

Troisième objectif : la mise en place d'un observatoire national des vignobles. Cet observatoire serait participatif. Les viticulteurs pourraient y enregistrer leurs observations directement via leur smartphone. Ces données agronomiques seraient alors associées, entre autres, à celles du CVI et de Vitiplantation. « Cet outil nous permettrait de réaliser des simulations », a expliqué Muriel Barthe, la directrice technique du CIVB.

Dernier axe de lutte : la coordination des actions de recherche, lesquelles doivent répondre aux attentes des professionnels. Objectif : remettre l'agronomie au coeur de la réflexion. Des travaux vont démarrer sur les composantes du rendement, la réaction des vignes au stress, la détection des maladies, le biocontrôle, le matériel végétal et les leviers socio-économiques de lutte contre les dépérissements...

Des pertes de rendement colossales

4,6 hl/ha en 2014 : telle est la perte de rendement imputable au dépérissement du vignoble, à l'échelle de la France. Soit 3,46 millions d'hectolitres sur les 752 000 ha du vignoble. Les maladies du bois ne sont pas les seules responsables du dépérissement. Selon Marie-Laëtitia Des Robert, du cabinet BIPE, il faut aussi prendre en compte les viroses (court-noué, enroulement), la flavescence dorée, les stress environnementaux et certaines pratiques culturales et stratégies des exploitations. « Il n'y a pas une cause avec une solution mais des facteurs et des effets sur lesquels agir. » Pour lutter contre ce fléau, les interprofessions vont débloquer 1,5 million d'euros par an à partir de 2017. Le 9 mai, le ministre de l'Agriculture a promis à la filière de débloquer la même somme par an pendant deux ans.

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