Retour

imprimer l'article Imprimer

éditorial

Encore un excès de zèle

PAR BERTRAND COLLARD, RÉDACTEUR EN CHEF DE LA VIGNE - La vigne - n°290 - octobre 2016 - page 5

C'est sans doute un énième avatar du principe de précaution. Le ministère de l'Agriculture vient de présenter son projet d'arrêté réglementant les traitements phyto après l'annulation par le Conseil d'État de celui qui était en vigueur depuis 2006. Qu'y trouve-t-on ? La généralisation des zones non traitées. Ces ZNT ne longeraient plus seulement les cours d'eau, mais à l'avenir aussi les fossés, les haies, les bosquets et les habitations. Si ce projet voit le jour, il faudra laisser de 5 à 50 m, selon les produits et les appareils utilisés, entre la dernière maison et le premier pied de vigne traité.

À Coursan, Montagne, Montlouis, Vinzelles et dans quantité d'autres villages viticoles, les vignes démarrent dès la fin des habitations. Comment ces ceps seront-ils protégés ? Le ministère de l'Agriculture ne semble pas s'en soucier. C'est à se demander s'il comprend encore quelque chose à l'activité dont il porte le nom. Que le ministère de l'Environnement fasse de telles propositions, c'est dans l'ordre des choses. Qu'elles viennent du ministère de l'Agriculture, c'est intolérable ! Cette administration devrait promouvoir et encourager la production agricole. C'est à l'inverse qu'elle s'attelle. Rappelons une fois de plus que les agriculteurs français sont en meilleure santé que le reste de la population. Il en est de même des agriculteurs américains. Comment cela se pourrait-il si tous les phytos étaient des poisons mortels ?

Non seulement le ministère de l'Agriculture veut repousser l'agriculture au fin fond des campagnes, loin des regards, mais il lui demande en plus de grimper aux lustres. Cette fois, on ne peut s'empêcher de sourire. Dans son projet, l'administration explique qu'il faudra mesurer pendant 10 minutes la vitesse du vent au sommet des cultures afin de s'assurer qu'il souffle bien à moins de 19 km/h. Alors seulement, on pourra aller traiter. Qui peut croire qu'une telle chose se fera ?

Ces nouvelles dispositions font partie de ce flot intarissable de règles et de normes que beaucoup dénoncent et dont personne ne vient à bout. Toutes alourdissent le fardeau des employeurs. Dernière en date : la complémentaire santé des saisonniers. Cet automne, tous les vignerons ont dû demander à leurs vendangeurs de leur fournir des attestations. Une tâche administrative supplémentaire. « Il faut que les parlementaires arrêtent. Sinon, un jour peut-être, il y aura une révolution en France à cause de ces excès », prévient un responsable professionnel. Cette révolution n'est-elle pas déjà en route lorsqu'on sait qui recueille les voix de la France en rogne ?

Cet article fait partie du dossier

Consultez les autres articles du dossier :

L'essentiel de l'offre

Voir aussi :