Samedi 29 avril 2017, à l'aube, au milieu du vignoble montlouisien, un vigneron épuisé s'assoit dans ses vignes frigorifiées. La météo ne l'avait pas annoncé et pourtant le thermomètre affiche -2 °C. Des feux sont allumés, en vain, comme pour se donner bonne conscience d'avoir, jusqu'au bout, tout essayé. Le ciel est clair, pas un nuage, pas de vent. Tout est prêt pour le coup de grâce. Dame Nature est sans pitié. Et pourtant pendant dix jours, sans relâche, les vignerons de cette petite appellation ont déployé une énergie folle pour inverser le destin. Par deux fois, ils ont repoussé l'assaut du gel. Mais le lendemain, sans munitions ni hélicoptère ni bottes de paille, le combat est devenu inégal.
Ce matin, le vigneron épuisé s'est assis au milieu de ses vignes. Il fixe inlassablement les ceps et les bourgeons blanchis par la rosée et que le soleil va venir griller. Les minutes et les heures passent, la température remonte.
Cette fois, les bourgeons ont résisté. Mais des larmes coulent sur son visage buriné par les années. Des gels, il en a connu mais c'est la fois de trop. Il craque, fatigué par une succession de nuits blanches.
Sa fille puis ses collègues viennent l'aider à se relever et lui réchauffer le coeur. Au terme de cette bataille, tout n'aura pu être sauvé mais tout n'aura pas été perdu. Le bilan viendra. Pour l'heure, le vigneron retient que la solidarité a toujours sa place dans ce monde. D'autres larmes coulent. Plus douces, elles effacent les premières. Demain, il retournera dans ses vignes, renforcé par l'épreuve.