Occuper le territoire, telle est la vocation de la piloselle. Cette plante pérenne colonise le sol en se multipliant par stolons (tiges rampantes). Cette capacité intéresse les membres du syndicat viticole de Westhalten depuis 2013. Leur idée ? Qu'elle couvre le cavaillon pour éviter l'érosion, stopper les applications d'herbicide et économiser la main-d'oeuvre et l'énergie nécessaires à l'entretien du rang.
Pierre Isner, coopérateur sur 7,5 ha en viticulture raisonnée, a planté de la piloselle sur 30 ares de vignes en 2014 et sur plus de 70 ares par la suite. « Je l'ai réservée à mes terres maigres, en forte pente, et à mes vignes en terrasses que je ne peux pas désherber mécaniquement parce que les rangs sont plantés sur des petites buttes », explique-t-il.
Le vigneron a planté à la main deux à trois plants de piloselle entre chaque cep de vigne : d'abord des plants qu'il a achetés, ensuite des mini-mottes produites sur place avec des graines locales, qui se sont révélées mieux adaptées. « À raison de 80 heures/ha, c'est physique ! », constate le viticulteur.
Pierre Isner a dû patienter dix-huit mois pour obtenir une couverture stable, plus ou moins dense en fonction du type de sol et de la concurrence de l'herbe en place. Il fauche le couvert une à trois fois selon l'année pour éliminer le trèfle et le liseron, premiers concurrents de la piloselle.
En trois ans, il n'a mesuré aucune chute significative de rendement ou de qualité des raisins. Toutefois, il a observé une petite baisse de vigueur cette année.
Pour obtenir ce résultat, le vigneron est passé d'un enherbement tous les rangs au travail du sol un interrang sur deux, pour ne pas concurrencer la piloselle. L'enherbement qui sera le partenaire idéal de cette espèce reste toutefois à trouver.
Pierre Isner participe à une expérimentation conduite sur 16 ha à Westhalten, suivie par l'Inra qui en tirera les enseignements définitifs en 2020.