Retour

imprimer l'article Imprimer

GÉRER

Aléas « Il faut s'assurer »

AUDE LUTUN - La vigne - n°299 - juillet 2017 - page 63

L'assurance récolte revient au premier plan de l'actualité après le gel d'avril. Trois viticulteurs nous expliquent pourquoi ils ont signé, chiffres à l'appui.
CHRISTOPHE RENOU, viticulteur bordelais, est convaincu de l'intérêt de s'assurer.

CHRISTOPHE RENOU, viticulteur bordelais, est convaincu de l'intérêt de s'assurer.

Christophe Renou « 115 €/ha, ce n'est pas très élevé »

Christophe Renou, viticulteur à Reignac, en Gironde, est membre du conseil d'administration de la Cave de Tutiac qui vient de voter l'obligation pour ses adhérents de souscrire une assurance récolte. Exploitant 30 ha en AOC Bordeaux et Côtes de Bordeaux-Blaye, Christophe Renou est assuré depuis huit ans. « Avec l'assurance récolte, on dort un peu plus tranquille, estime-t-il. Quand on a des salariés, des emprunts et la MSA à payer, il ne faut pas trop d'années "sans". C'est pour cela que j'ai adhéré à l'assurance récolte. »

Celle-ci, souscrite au Gan, a été activée en 2014 à la suite de la grêle. Elle le sera de nouveau cette année à cause du gel d'avril qui a détruit 90 % de sa récolte. « Après le gel, j'ai contacté mon assureur qui a fait venir un expert dans mes vignes pour estimer les dégâts, explique Christophe Renou. Celui-ci reviendra juste avant les vendanges, puis j'enverrai ma déclaration de récolte à l'assureur. »

Cette année, l'assurance lui coûte 5 208 € avant la subvention Pac et 2 918 € subvention déduite, soit 115 €/ha en production. Le capital assuré s'élève à 107 452 €, soit 4 255 € par hectare en production. De cette somme, il faut retirer 10 % de franchise pour le gel et la grêle, et 25 % pour les autres aléas.

« Je n'ai pas modifié le montant du capital assuré depuis plusieurs années. Mais j'aurais dû l'augmenter, regrette Christophe Renou, avant d'ajouter : 115 euros par hectare, ce n'est tout de même pas très élevé pour pouvoir poursuivre son métier après un aléa climatique. »

Damien Vialard « J'assure mon revenu »

Damien Vialard, installé à Giroussens, dans le Tarn, cultive 40 ha de vignes dont 25 en IGP et 15 en AOC Gaillac. Adhérent à l'Union de coopératives Vinovalie, il est assuré depuis son installation, en 2011 : « On ne peut pas se permettre une année blanche. »

Ce viticulteur est assuré pour un capital de 140 000 €. En 2015, il a fait évoluer son contrat en optant pour une franchise de 15 % contre 25 % auparavant. « En 2014, j'ai grêlé et j'ai perçu peu d'indemnités, précise-t-il. Cela m'a incité à modifier mon contrat, d'autant que mon exploitation étant plus stable, je peux consacrer plus de moyens à l'assurance récolte. » Il touche la subvention Pac sur la base du coût d'un contrat avec 25 % de franchise et supporte entièrement le surcoût pour baisser cette franchise de 25 à 15 %.

En 2016, son assurance récolte n'a pas été activée, mais elle le sera en 2017 à cause du gel de fin avril, puis la grêle de début mai. L'expert a estimé que 20 ha sont touchés à 80 % et 10 entre 30 et 40 %.

Pour son assurance, Damien Vialard paie 100 €/ha, subvention comprise, avec la franchise de 15 %. S'il était resté à 25 % de franchise, il aurait payé 60 €/ha. « Mon objectif est de couvrir mes coûts de production, mes prêts et de m'assurer un revenu », indique le vigneron. Il estime que les formalités sont assez simples. Mais il aimerait voir évoluer la règle de calcul du rendement de référence. « Actuellement, si vous avez trois années difficiles, c'est la double peine. »

Pascal Sorin « De plus en plus de coups durs »

En Bourgogne, Pascal Sorin n'est assuré que depuis cette année. La grêle de 2016, qui a détruit 90 % de son vignoble, l'y a incité. Ce viticulteur basé à Saint-Bris-le-Vineux (Yonne) exploite 23 ha de différentes AOC bourguignonnes (Bourgogne aligoté, Bourgogne rouge, Irancy, Saint-Bris-le-Vineux, etc.) et 1,3 ha en Champagne. Il a souscrit l'assurance récolte pour ses vignes de Bourgogne. Son contrat Pacifica comprend 20 % de franchise. Il lui coûte 11 865 €/an, déduction faite de la subvention (12 239 €).

À titre d'exemple, pour les 7,65 ha d'aligoté blanc, le rendement assuré est de 39,37 hl/ha (rendement historique moyen - 20 %) pour un prix garanti de 333 €/hl. Le capital garanti pour ces 7,65 ha s'élève donc à 100 314 €.

« L'assurance récolte devrait être obligatoire, estime Pascal Sorin. Avant la grêle de 2016, j'aurais dit que c'était dictatorial d'imposer l'assurance. Maintenant, je pense que c'était une erreur professionnelle de ne pas être assuré, surtout que nous sommes aidés. Si on retire la MSA et les impôts, le coût net est d'environ 5 000 € pour mon exploitation. Avec le changement climatique, on est de plus en plus soumis à des coups durs, il faut modifier notre approche de l'assurance. »

Vers une assurance obligatoire ?

Avec 25 % des vignes assurées et la multiplication des incidents climatiques, les responsables professionnels s'interrogent sur l'obligation de souscrire une assurance récolte. Jérôme Despey, vice-président de la FNSEA, est favorable à ce que l'octroi des aides OCM soit conditionné à une obligation d'assurance. L'Association générale de la production viticole (AGPV), qui regroupe la Cnaoc, la CCVF, les Vif et la confédération des vins IGP, invite, quant à elle, les pouvoirs publics à rendre l'assurance plus attractive. Elle demande, entre autres, un abaissement de la franchise à 15 ou 20 %.

Cet article fait partie du dossier

Consultez les autres articles du dossier :

L'essentiel de l'offre

Voir aussi :