dossier - BONNES PRATIQUES PHYTOSANITAIRES

Contrôle des pulvérisateurs, mécaniques à la loupe

Marianne Decoin* - Phytoma - n°653 - avril 2012 - page 18

Le point sur ce dispositif, ce qu'il est, où il en est et quel est son intérêt
 ph. V. Polvèche

ph. V. Polvèche

Contrôle obligatoire de pulvérisateur par un inspecteur agréé (à gauche) sous l'œil intéressé du propriétaire de l'appareil (à droite). Occasion de mieux connaître son matériel. V. Polvèche

Contrôle obligatoire de pulvérisateur par un inspecteur agréé (à gauche) sous l'œil intéressé du propriétaire de l'appareil (à droite). Occasion de mieux connaître son matériel. V. Polvèche

Étalonnage de manomètre de travail sur un calibrateur : « contrôleur » à gauche et « contrôlé » à droite.      On trouve un manomètre défectueux sur la moitié des 13 % d'appareils arrivant non conformes au contrôle. ph. V. Polvèche

Étalonnage de manomètre de travail sur un calibrateur : « contrôleur » à gauche et « contrôlé » à droite. On trouve un manomètre défectueux sur la moitié des 13 % d'appareils arrivant non conformes au contrôle. ph. V. Polvèche

Contrôle en cours : mesure de pression au niveau des rampes de sortie, un des 55 points inspectés sur les appareils pour cultures hautes (vigne-arboriculture). ph. V. Polvèche

Contrôle en cours : mesure de pression au niveau des rampes de sortie, un des 55 points inspectés sur les appareils pour cultures hautes (vigne-arboriculture). ph. V. Polvèche

Évoquer le cadre réglementaire des bonnes pratiques phytos, c'est forcément parler du contrôle des pulvérisateurs. D'abord il s'agit d'une obligation réglementaire depuis 2009. Ensuite il offre une opportunité pour les bonnes pratiques. Des contraintes à connaître mais que l'on peut aussi transformer en atout.

Cet article fait le bilan du dispositif de contrôle des pulvérisateurs en 2011 et évoque le diagnostic qu'il a permis globalement et qu'il permet au cas par cas donc son intérêt pour les bonnes pratiques. Mais d'abord, un rappel réglementaire est utile. Ce sera une redite pour nos lecteurs qui se souviennent parfaitement du dossier « Bonnes pratiques » de mai 2011(1), ou peuvent le retrouver à la minute car il est très bien rangé… Mais une révision voire une découverte pour les autres !

Ce qui est obligatoire, rappel utile

Qui est concerné ?

Premier point à rappeler : le contrôle des pulvérisateurs par un organisme d'inspection agréé est obligatoire depuis 2009, de par la loi sur l'eau de 2006(2).

Sont concernés tous les pulvérisateurs dits « de type agricole », c'est-à-dire à rampe d'au moins 3 mètres ou à distribution verticale. Donc pas les appareils à jet unique, ni les poudreuses et microgranulateurs, ni les semoirs-pulvérisateurs qui ne traitent qu'une partie de la surface (désherbage sur le rang de semis).

Attention c'est le type d'appareil qui doit être agricole, pas son propriétaire ! Les « pulvés » de ce type utilisés en ZNA (terrains de sports, etc.) ou par des particuliers doivent, eux aussi, passer au contrôle !

Quand ? Âge de l'appareil, n° SIREN, contrôles antérieurs

Le contrôle doit avoir lieu tous les 5 ans, donc concerne les appareils âgés de 5 ans ou plus. Pour éviter l'engorgement des organismes de contrôle les premières années, un calendrier des dates limites de contrôle a été organisé, en fonction du numéro SIREN des exploitations (ou autres entreprises) concernées. Les contrôles volontaires effectués en 2007 et 2008 ont été pris en compte.

Pour savoir quand on doit faire contrôler son pulvérisateur, il faut connaître l'âge de l'appareil, le numéro SIREN ou SIRET de son exploitation ou entreprise (si on n'en a pas, le cas est prévu), et la date d'un éventuel précédent contrôle effectué depuis 2007.

Ensuite, on peut se reporter :

– au tableau 1 pour les appareils datant de 2006 ou plus anciens,

– ou au tableau 2 pour les « pulvés » plus récents.

Contrôlé ET conforme

Pour qu'un pulvérisateur soit en règle après un contrôle obligatoire, il faut que ce dernier ait été réalisé par un organisme d'inspection officiellement agréé.

À noter : les contrôles volontaires réalisés en 2007 et 2008 sont reconnus même si l'organisme n'a pas été agréé depuis lors.

Dans tous les cas, soit l'appareil est reconnu sans défaut sur tous les points inspectés (55 pour les appareils destinés à traiter des arbres et arbustes vigne comprise, et 63 pour les appareils à rampe, certains points pouvant donner lieu à plusieurs défauts), soit il faut effectuer une contre-visite (re-contrôle des points non conformes) dans un délai maximum de 4 mois. Au delà de ces 4 mois, on repart pour un contrôle complet de tous les points…

En pratique, rien n'interdit de faire la contrevisite le jour-même, sur place et dans la foulée, s'il suffit d'effectuer un réglage simple ou de remplacer des pièces facilement disponibles (jeu de buses, collier, manomètre...).

Si, à l'issue du contrôle complet ou de la contrevisite, l'appareil est reconnu conforme, un certificat est délivré avec un macaron à poser sur l'appareil. Celui-ci sera en règle 5 ans.

Où en est-on début 2012 ?

Les organismes, et où les trouver

Le 23 mars dernier, 103 « organismes d'inspection » étaient officiellement agréés pour réaliser des contrôles obligatoires de pulvérisateurs, sachant que l'un d'eux, le Crodip, est lui-même un réseau de 43 organismes. Leurs listes (des 103 et les 43), avec leurs coordonnées, sont en accès libre sur le site du GIP Pulvés : www. gippulves.fr.

Ce groupement d'intérêt public coordonne le dispositif. Il délivre les avis avant agrément après audits sur site – chaque audit consiste à réaliser le suivi d'un contrôle et à examiner toutes les pièces métrologiques (en clair, passer les bancs de contrôle à la loupe) et administratives. Et il tient les statistiques.

Important : les agréments des organismes d'inspection sont donnés au niveau des préfets de régions (par les DRAAF, directions régionales de l'Alimentation, l'Agriculture et de la Forêt, ou leur équivalents Outre-Mer), mais ils ont une valeur nationale. Tout organisme agréé peut parfaitement intervenir dans une autre région que celle de son siège.

De fait, le site du GIP Pulvés publie aussi une liste des organismes proposant d'intervenir par département. Elle a été établie selon les déclarations et sous la responsabilité des organismes eux-mêmes.

Certains organismes d'inspection sont unipersonnels : un seul inspecteur muni de son banc de contrôle. D'autres regroupent plusieurs personnes, pouvant se partager le même banc s'ils réalisent des contrôles à temps partiel.

Il y a actuellement 185 inspecteurs disponibles. Tous sont titulaires d'un certificat d'aptitude après formation officielle suivie d'une évaluation dans un des 5 centres de formation agréés, officiellement eux aussi bien sûr (liste des centres sur www.gippulves.fr).

Nombre d'appareils contrôlés

Combien d'appareils ont-ils été contrôlés à ce jour ? Vincent Polvèche, directeur du GIP Pulvés, a publié les chiffres que nous reproduisons en tableau 3.

On voit que le nombre d'appareils a baissé en 2011, et qu'on est loin des 40 000 à 50 000 par an visés au départ sur la base d'une estimation de 200 000 à 300 000 pulvérisateurs de plus de 5 ans à contrôler en 5 ans.

Les agriculteurs renâcleraient-ils ? Les contrôles sont certes payants, mais on risque une amende si on ne les fait pas réaliser. Et, surtout, l'argent dépensé pour les réaliser est-il vraiment perdu ?

L'analyse de l'état des appareils contrôlés suggère plutôt que non.

Éloge de la chasse aux fuites

Des pulvés dans tous leurs états

L'âge moyen de ces appareils est de 13 ans lors du contrôle. Dans le détail, 28 % d'entre eux ont de 5 à 9 ans, 30 % de 10 à 14 ans et 16 % de 15 à 19 ans. Les trois quarts sont des appareils pour les grandes cultures.

Quant aux non-conformités recensées avant contre-visite, elles concernent 13 % des appareils en 2011. Mais V. Polvèche révèle : « Les témoignages du terrain concordent : dans 20 % des cas, un conseiller machinisme ou un concessionnaire a déjà vérifié l'appareil et fait les réparations nécessaires avant le passage officiel au banc de contrôle. »

On arrive donc à « un tiers des matériels non conformes au départ, et qui le sont devenus à l'occasion du contrôle ».

Au fait, y a-t-il des appareils pas acceptés après contrôle ? « Moins de 1 % ». Revenons à ceux qui sont contrôlés. V. Polvèche détaille : « Dans les deux-tiers de nos 13 % de cas de non-conformités, il y a présences de fuites. Elles sont souvent minimes et réparées sur place : juste un collier à changer… »

Autre défaut : « Dans environ 50 % des cas, on trouve un manomètre défectueux, le plus souvent trop imprécis et qu'il faut changer. » Là encore, la réparation ou le remplacement sur place est facile.

Dernier défaut courant : « Un bon tiers ont des déformations de rampe. » Ce défaut n'est réparable sur place que si le contrôle a lieu chez un concessionnaire.

Mais c'est très probablement le cas pour la majorité des contrôles : plus de 40 % des organismes de contrôle sont eux-mêmes par ailleurs des concessionnaires, et de nombreux autres concessionnaires accueillent volontiers des organismes de contrôle sur leur site.

Précision : si le total fait plus de 100 %, c'est qu'un même appareil peut cumuler plusieurs défauts.

Et les buses, au fait ? « 15 % des appareils ont des défauts de ce côté-là, un jeu pas homogène, certaines trop usées. » C'est peu : seulement 15 % de 13 %... On s'attendait à davantage. Mais V. Polvèche explique : « La question des buses, c'est le point dont les propriétaires sont le plus conscients. Du coup, on voit souvent des jeux de buses très récents, voire neufs car changés juste avant le contrôle… »

Pour les bonnes pratiques, ça sert

Justement, quand on détaille ces défauts, on mesure l'intérêt technique de ces contrôles.

« Certains agriculteurs arrivent au contrôle en traînant des pieds, pour faire plaisir à leur conseiller ou à leur femme, ou par peur du gendarme. Ils en repartent contents d'avoir un appareil qui ne fuit plus – économie de produit et de risque de pollution – dont ils peuvent vraiment régler la pression et le débit, qui pulvérise régulier. »

« Même pour les appareils conformes dès le départ, c'est l'occasion d'échanger avec les contrôleurs qui sont compétents en machinisme et donnent souvent des conseils techniques à l'occasion de l'opération. »

En plus, sachant qu'en général les organismes d'inspection regroupent le contrôle de plusieurs appareils le même jour sur le même site pour maîtriser leur coût…

« C'est l'occasion d'échanger des informations entre collègues. Il y a souvent un « spécialiste » prêt à donner des conseils. Là encore, les participants sont contents d'avoir appris des trucs et astuces… » … De bonnes pratiques, bien entendu !

Alors, un intérêt pour les agriculteurs qui ont participé aux contrôles, un intérêt pour la collectivité avec ce tiers des appareils révisés et l'ensemble qui sera mieux maîtrisé. Le contrôle des pulvérisateurs, ça n'est pas que de l'acharnement administratif, mais bien une opportunité à saisir !

<p>* Phytoma.</p> <p>(1) Phytoma n° 644, mai 2011. Article <i>« Pulvérisateurs, à vos marques, prêts, contrôlez »</i>, pages 20 à 23.</p> <p>(2) LEMA, Loi sur l'eau et les milieux aquatiques, n° 2006-1772 du 30 décembre 2006, publiée au JORF (Journal officiel de la République française) le 31 décembre 2006. Décrets sur ce contrôle des pulvérisateurs n° 2008-1254 et 2008-1255 du 1er décembre 2008 publiées au JORF le 3 décembre 2008, puis arrêtés du 18 décembre 2008 publiés le 26 décembre 2008 et arrêté du 12 janvier 2009 publié le 31 janvier 2009.</p>

Tableau 1 - Vous avez un pulvérisateur « de type agricole »(1) datant de 2006(2) ou avant, quand devez-vous le faire contrôler ?

La réponse vous concerne, que vous soyez agriculteur ou non, sauf si votre appareil a déjà subi le contrôle obligatoire et a été reconnu conforme (auquel cas il faudra le faire re-contrôler 5 ans après).

Tableau 2 - Vous avez un pulvérisateur « de type agricole » datant de 2007(1) ou après, quand devez-vous le faire contrôler ?

La réponse vous concerne, que vous soyez agriculteur ou non, sauf si votre appareil a déjà été contrôlé et reconnu conforme(2), auquel cas il faudra le faire re-contrôler 5 après.

Tableau 3 - France, combien de contrôles de pulvérisateurs ?

Bilan des trois premières années de contrôle obligatoire. Source : GIP Pulvés.

Résumé

Cet article fait le point sur le contrôle obligatoire des pulvérisateurs, en vigueur en France depuis 2009.

Les types d'appareils concernés sont rappelés, ainsi que les échéances (dates limites avant laquelle il faut avoir fait contrôler les appareils).

Celles-ci dépendent de l'âge de ces appareils, du numéro SIREN de leurs propriétaires, et bien évidemment du passage ou non d'un contrôle précédent, la périodicité entre deux contrôles obligatoires étant de 5 ans.

Un bilan quantitatif des contrôles réalisés en 2011 (rappel pour 2010 et 2009) est fourni par Vincent Polvèche, du GIP Pulvés, groupement d'intérêt public qui coordonne ce dispositif.

V. Polvèche évoque les informations et statistiques que ces contrôles ont permis de remonter sur l'âge moyen des appareils et leur état avant contrôle. Il précise le type des non-conformités les plus fréquentes.

Il souligne que, en ajoutant les non-conformités décelées et corrigées lors du contrôle et les réparations faites préalablement, c'est environ un tiers des appareils pour lesquels le contrôle obligatoire a été l'occasion d'une remise à niveau.

Il souligne aussi les échos du terrain montrant que les agriculteurs ayant fait contrôler leur appareil reviennent très satisfaits de cette opération, même s'ils n'étaient pas demandeurs au départ.

Mots-clés : bonnes pratiques phytosanitaires, pulvérisateurs, contrôle obligatoire, GIP Pulvés, échéancier, bilan, statistiques.

L'essentiel de l'offre

Phytoma - GFA 8, cité Paradis, 75493 Paris cedex 10 - Tél : 01 40 22 79 85