Fils d'agriculteurs ardennais, Didier Lamblin entre en 1985 à la Providence Agricole (depuis 1992 Champagne Céréales et aujourd'hui Vivescia). Au départ, adjoint au chef du silo d'Alland'huy-et-Sausseuil (Ardennes), il en est depuis 2003 le responsable, épaulé par deux adjoints et une dizaine de saisonniers lors de la récolte.
Analyse automatique
Le maïs est la principale production stockée sur ce site d'une capacité de 27 000 t. Il est destiné en grande partie à l'amidonnerie. S'y ajoutent un peu de colza, blé et orge.
Toute récolte arrivant au silo est automatiquement analysée via la prise d'un échantillon dans la benne.
Sont évalués le taux d'humidité, le poids spécifique, le taux de protéines, la présence d'insectes… Les résultats conditionnent le traitement du grain avant stockage.
Sécher le grain pour prévenir les mycotoxines
Didier Lamblin doit en effet veiller à conserver la qualité technologique des grains mais aussi leur qualité sanitaire. Ses ennemis : mycotoxines de stockage, insectes, rongeurs et oiseaux.
Depuis 2004, il applique la charte sécurité alimentaire. Depuis 2011, le silo est certifié Iso 22000*.
Cela commence avant la récolte par un nettoyage minutieux du silo pour éliminer les insectes.
« Nous aspirons la poussière en faisant fonctionner les ventilateurs à l'envers. S'il y a vraiment un problème, nous avons la possibilité de désinsectiser le silo avant moisson. »
Au moment de la récolte, c'est le branle-bas de combat !
« Le risque mycotoxines de stockage dépend en partie de l'humidité des grains réceptionnés, explique Didier. Si le taux est supérieur à 16 %, on les sèche pour atteindre 14 à 15 %. »
La coopérative a mis en place un plan d'étalement de la récolte pour réguler les volumes de maïs à la réception et le sécher au fur et à mesure.
Après séchage, le grain passe dans un nettoyeur à grilles pour éliminer les insectes. En cas de manque de temps, cette opération est réalisée une fois le grain stocké ou juste avant expédition au client.
Premier palier de température, contre les moisissures
Séché et propre, le grain peut maintenant se reposer en cellule de stockage. Mais pour notre chef de silo et son équipe, le travail ne fait que commencer ! En effet, pour être stocké durant de longs mois tout en conservant une bonne qualité sanitaire en termes de mycotoxines et insectes, le grain doit voir sa température descendre sous 8 °C.
« Un blé ou un maïs bien refroidi peut se garder longtemps », précise Didier. Le grain est refroidi la nuit grâce à des ventilateurs qui propulsent dans chaque cellule de stockage l'air frais pompé à l'extérieur. Il y a trois paliers. L'objectif du premier, à réaliser dès que possible, est d'atteindre les 20 °C, notamment pour éviter le développement de moisissures.
« Pour cela, il faut une différence de 10 à 15 °C entre le jour et la nuit », explique le chef de silo.
Viser les insectes, deux paliers et surveillance
À 20 °C, les insectes peuvent encore se développer. Pour atteindre les 15 °C et bloquer leur développement, le deuxième palier a donc lieu sans tarder, en octobre-novembre.
« Ensuite, à partir de janvier, nous essayons de descendre la température des blés ou des maïs qui seront gardés jusqu'à la prochaine récolte en dessous de 5 °C. »
Pendant la ventilation, la baisse de la température des grains est surveillée tous les jours : des sondes vont du haut en bas de la cellule munies de capteurs tous les deux mètres.
Entre les périodes de ventilation, la stabilité de chaque cellule est contrôlée une fois par semaine.
« En cas de température anormalement élevée, nous redonnons un coup de ventilateur. Si cela ne change rien, c'est que le point chaud est dû au développement d'insectes. Tout le grain de la cellule concernée est alors renettoyé pour les éliminer. En dernier recours, nous pouvons utiliser un insecticide. »
Chasse aux rongeurs et oiseaux
La qualité sanitaire se joue également à l'extérieur des cellules en éliminant rongeurs et oiseaux. Un prestataire spécialisé passe tous les deux-trois mois afin de surveiller l'efficacité du plan de lutte antirongeurs en contrôlant la cinquantaine de boîtes renfermant des appâts.
« Une fois par semaine, j'inspecte tout le silo pour voir s'il y a des cadavres de rongeurs, raconte Didier. Parfois, je trouve aussi des oiseaux. On comptait en moyenne deux à trois rongeurs par mois. Depuis que nous avons bouché des entrées potentielles, nous n'en trouvons quasiment plus. »
La propreté du silo est également essentielle :
« Si du grain traîne à droite et à gauche, cela attire forcément les rongeurs et les oiseaux. »
Expédier aux clients
Parallèlement à la surveillance de la qualité sanitaire de la récolte, d'autres missions occupent notre chef de silo : accueillir les agriculteurs pour les livraisons de récolte ou l'approvisionnement en engrais, préparer les lots de grains à expédier aux clients à raison d'un train de maïs par jour en octobre. Ensuite, le rythme de croisière est de trois à quatre par mois.
« Ce qui me plaît le plus dans ce métier, c'est le contact avec le grain. Ça me rappelle mon enfance.
Et puis également celui avec les agriculteurs. Le silo, c'est finalement la suite de l'exploitation », conclut Didier Lamblin, heureux, aux commandes de son silo.
<p>*Norme internationale focalisée sur la sécurité des denrées alimentaires avec pour objectif l'absence de risques pour le consommateur.</p>