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VENDRE - Conseils de pros

Travailler avec les grossistes qui livrent les restaurateurs

Frédérique Ehrhard - La vigne - n°215 - décembre 2009 - page 60

Les restaurateurs s'approvisionnent pour un tiers de leurs volumes auprès de grossistes. Voici comment aborder ces intermédiaires qui s'intéressent de plus en plus aux vins pour compléter leur offre de boissons.
Un bon moyen de décrocher un marché chez un grossiste, c'est de lui proposer une cuvée qui sera vendue comme « vin du mois » dans les restaurants. © C. WATIER

Un bon moyen de décrocher un marché chez un grossiste, c'est de lui proposer une cuvée qui sera vendue comme « vin du mois » dans les restaurants. © C. WATIER

1. Ciblez vos interlocuteurs

Les grossistes qui livrent la restauration s'appuient sur des réseaux d'entrepôts. Ils référencent des vins au niveau national et régional. « Mieux vaut les aborder en commençant par l'échelon régional. Choisissez les villes où vous voulez vous développer. Contactez les responsables des entrepôts qui vous intéressent », précise Aurélie Mauchand. Votre interprofession peut vous fournir leurs coordonnées. Si vous livrez déjà en direct des restaurateurs dans ces villes, demandez-leur quels sont les grossistes qui les approvisionnent, et glanez des informations sur les vins qu'ils distribuent déjà.

2. Saisissez les opportunités

Les grossistes travaillent dans la durée. Une fois que leurs références tournent bien, ils évitent d'en changer. « Ils sont plus fidèles que les grandes surfaces. En contrepartie, il y a moins de places à prendre chez eux », relève Aurélie Mauchand.

La porte n'est pas fermée pour autant. « Nous avons besoin de valeurs sûres reconnues dans leur région, et aussi de vins découverte », souligne Corinne Richard Saïer. Le système des « vins du mois » offre des opportunités pour une première collaboration.

De même, l'émergence de nouvelles tendances amène les grossistes à élargir leur gamme. « Les restaurateurs nous demandent plus de vins de cépage à servir au verre. Nous venons d'en référencer une dizaine en Pays d'Oc », relève Christine Fabre. « En ce Vendre moment, nous cherchons des vins bios », souligne Corinne Richard Saïer.

3. Trouvez l'accroche

Très sollicités, les grossistes n'ont pas le temps de multiplier les dégustations. Prenez un premier contact par courrier, mail ou téléphone avant d'envoyer des échantillons. « J'ai besoin de quelque chose qui me donne envie : un nouveau cépage, une appellation peu connue, un habillage qui accroche, un nom de cuvée créatif. Trouvez une petite phrase pour les baptiser, osez faire un clin d'œil », suggère Corinne Richard Saïer.

« Donnez quelques éléments de votre histoire personnelle aux grossistes. Cela aidera leurs commerciaux à parler de vous aux restaurateurs », conseille Aurélie Mauchand. Mentionnez les plus : agriculture raisonnée ou bio, médailles récentes, références dans les derniers guides, succès à l'export. « Le marché français n'est pas forcément traditionnel. Ce qui marche à l'export marche bien aussi à Paris », rappelle Corinne Richard Saïer.

4. Soyez persévérants

Les restaurateurs renouvellent leur carte une ou deux fois par an. Les grossistes suivent le même rythme. « Nous avons un catalogue pour le printemps et l'été, et un autre pour l'automne et l'hiver, que nous préparons trois ou quatre mois à l'avance. Avant d'y intégrer un nouveau vin, nous le testons sur deux ou trois mois pour voir comment il est reçu par les restaurateurs », précise Corinne Richard Saïer.

« Un référencement peut prendre six mois ou un an, voire plus. Parfois, un vin nous plaît, mais il ne trouvera sa place que l'année suivante, parce que les ventes d'une de nos références auront fléchi ou que le marché aura évolué. Si le premier contact a été positif, il ne faut pas hésiter à nous recontacter », conseille Christine Fabre.

5. Aidez-les à vendre

Les grossistes forment de plus en plus leurs commerciaux. Ils peuvent faire appel à vous dans ce but. « On ne vend bien que ce qu'on connaît bien. Pour donner des arguments de vente aux commerciaux, sachez décrire votre vin. Donnez-leur des informations utiles, et mettez en scène votre vin dans l'univers de la restauration. Suggérez des accords mets et vins, en vous adaptant aux saisons », affirme Aurélie Mauchand.

N'hésitez pas à proposer d'animer une soirée de dégustation chez un restaurateur, et tenez-vous prêt à participer à un mini-salon. Rapprochez-vous aussi de votre interprofession pour savoir si elle va organiser des opérations de promotion avec ces grossistes.

6. Evitez de les concurrencer

« Les grossistes n'apprécient pas du tout de retrouver les mêmes vins en grande surface ou chez des concurrents ! Réservez-leur des cuvées avec des assemblages et un habillage spécifiques, bien adaptés à leurs besoins », souligne Aurélie Mauchand. Mieux vaut ne placer qu'un vin chez un grossiste, qui tournera bien, plutôt qu'essayer de vendre de tout à tout le monde. Pour que chaque intermédiaire puisse se rémunérer, le vigneron doit aussi établir des tarifs cohérents. « Avant de démarrer une collaboration, je demande au vigneron chez quels restaurateurs il est déjà présent, et à quel prix, rappelle Corinne Richard Saïer. Quand il me vend un vin à 2 euros le col, il ne faut pas qu'il le propose en direct à des restaurateurs à 2,50 euros. Ce n'est pas assez cher pour que je puisse rémunérer le travail de mes commerciaux et de mes livreurs. Nous devons arriver au même tarif chez les restaurateurs pour ne pas nous concurrencer. »

Le Point de vue de

Daniel Mouty, Vignobles Daniel Mouty, en Gironde

« J'adapte mes tarifs et j'offre une qualité suivie »

« Je travaille avec la Maison Richard depuis vingt ans. Le premier contact s'est fait par un courtier qui prospectait pour eux. Ils ont sélectionné ma deuxième référence de Saint-Emilion grand cru. Je leur assure une qualité suivie. Je réserve tout le temps des volumes au-delà de leur commande annuelle pour éviter toute rupture d'approvisionnement. Chaque année, leur œnologue vient déguster le nouveau millésime, et nous rediscutons le prix. Pour que les ventes se développent, il faut que chacun y trouve son compte. Je vends au-dessus de mes coûts de production, mais je n'oublie jamais que le prix de la bouteille doit rester accessible. S'il faut deux mois chez un restaurateur pour vendre Vingt-quatre bouteilles parce qu'elles sont trop chères, ce n'est intéressant pour personne ! Actuellement, je vends 6 000 cols par an à la Maison Richard. Je sers aussi un grossiste belge et un suisse, rencontrés sur des salons.

Le premier me prend 6 000 cols par an d'un vin, et le deuxième me commande régulièrement 600 cols de deux vins différents. Entre ces trois grossistes, je vends 20 000 cols par an, soit 10 % de mes volumes. Ce sont des débouchés stables. Je vends aussi 10 000 cols en direct à des restaurateurs, par un agent. La marge est un peu supérieure, mais l'investissement en temps aussi. J'ai beaucoup plus de factures à faire, et je dois rappeler lorsque le paiement n'arrive pas. Avec les grossistes, les livraisons sont groupées et les paiements suivent sans problème. »

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Aurélie Mauchand, chargée du marketing à Inter-Rhône pour la France, la Belgique et l'Angleterre

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Corinne Richard Saïer, directrice des achats et du marketing de la Maison Richard

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Christine Fabre, responsable Vins chez Olivier Bertrand Distribution

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