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Comment réagir face à la crise

Aude Lutun - La vigne - n°215 - décembre 2009 - page 72

L'Enitab de Bordeaux a étudié les résultats de trente et une exploitations de l'Entre-deux-Mers et du Médoc entre 2002, début de la crise, et 2006. Voici les enseignements de ce travail pour préserver votre rentabilité.
UNE BAISSE IMPORTANTE DU PRIX DES BOUTEILLES, notamment auprès des particuliers, peut être très mal interprétée. Mieux vaut appliquer la méthode des grandes surfaces qui consiste à réaliser des promotions sur des lots de bouteilles. Mais chaque situation doit être examinée avec attention, car la vente en bouteilles n'est pas adaptée à tous. © J. CHABANNE

UNE BAISSE IMPORTANTE DU PRIX DES BOUTEILLES, notamment auprès des particuliers, peut être très mal interprétée. Mieux vaut appliquer la méthode des grandes surfaces qui consiste à réaliser des promotions sur des lots de bouteilles. Mais chaque situation doit être examinée avec attention, car la vente en bouteilles n'est pas adaptée à tous. © J. CHABANNE

1. Conservez votre capacité d'écoulement

L'indicateur de bonne santé économique le plus important est la capacité à vendre un volume proche de sa production annuelle. Hélène Samie et Bernard De l'Homme, enseignants à l'Enita de Bordeaux, en sont convaincus. Ils ont supervisé l'étude des résultats économiques de trente et une exploitations bordelaises de 2002 à 2006, dix-sept du Médoc et quatorze de l'Entre-deux-Mers. « En période de crise, les viticulteurs ont intérêt à accepter de dégrader la valorisation de leur production jusqu'à une certaine limite, de façon temporaire, afin de conserver une capacité d'écoulement de la quasi-totalité de leurs produits sur l'année », estiment-ils.

Une baisse importante du prix des bouteilles, notamment auprès des particuliers, peut être très mal interprétée. Pour ne pas ternir son image sur ce segment des bouteilles, mieux vaut envisager de déstocker en vrac. Mais cela suppose d'être présent sur ce marché de manière constante, et pas seulement en temps de crise.

« Il faut conserver la valeur, mais aussi vendre pour garder un niveau de trésorerie correct qui ne met pas l'entreprise en danger, a rappelé Daniel Vatel, responsable champagne du Crédit agricole nord-est lors d'une conférence au salon Viteff à Epernay (Marne) en octobre dernier. La bonne stratégie en temps de crise est d'accepter de baisser ses prix sur certains marchés bien ciblés, sans brader ses produits pour autant. »

2. Misez sur le vrac et la bouteille

C'est probablement l'une des conclusions les plus surprenantes de l'étude : « Le produit le plus élaboré et le circuit le plus proche du consommateur final ne sont pas toujours les plus rentables. » L'analyse des résultats de dix-sept domaines du Médoc montre que seules les bouteilles vendues au négoce et aux centrales d'achat de la grande distribution permettent de dégager une marge. La vente de bouteilles auprès des particuliers génère très peu, voire pas de marge. La vente aux cavistes et à la restauration est déficitaire.

Le constat est différent pour les quatorze exploitations de l'Entre-deux-Mers. La vente en bouteilles aux cavistes et au CHR est bénéficiaire, la vente aux particuliers aussi, mais dans une moindre mesure. Mais pour ce panel d'exploitations, la vente de bouteilles au négoce est presque aussi déficitaire que la vente en vrac.

Chaque situation est particulière et mérite d'être examinée en détail. Mais il est clair que la vente de bouteilles aux particuliers n'est pas adaptée à tous et la mixité est la voie la plus intéressante.

3. Baissez vos coûts

Une revalorisation des cours du vin étant très hypothétique, l'un des principaux leviers des viticulteurs est de serrer leurs coûts de production. Dans la région de l'Entre-deux-Mers, ils ont déjà baissé de 14 % depuis 2002 pour le vin en vrac et de 24 % pour la bouteille. Néanmoins, les écarts varient encore de 1 à 2 entre les exploitations. Les auteurs de l'étude soulignent « qu'il est plus facile de bien maîtriser ses coûts de production pour les exploitations privilégiant le vrac, car elles n'ont à concentrer leurs efforts que sur l'activité vigne, tandis que les autres exploitations devront agir simultanément sur les activités vigne, conditionnement et commercialisation. »

Il existe également un levier d'action sur le prix de vente en vrac, lequel varie pour une même appellation de 1 à 1,8 selon la qualité du produit et le dynamisme commercial du vigneron.

Dans le Médoc, la rentabilité a chuté de 45 % en quatre ans

Ce n'est pas une surprise, la rentabilité des exploitations bordelaises a beaucoup baissé entre 2002, début de la crise, et 2006. L'étude de l'Enitab montre que les dix-sept domaines du Médoc ont gagné en moyenne 19,5 €/hl de vrac en 2006 et qu'ils ont perdu 25 €/hl en 2006. Soit une baisse de 45 %. L'étude entend par « rentabilité économique » la différence entre le prix de vente et le coût de production, lequel intègre la main-d'œuvre familiale, le foncier en propriété et le capital propre de l'exploitation, dans le but de comparer les exploitations sur des bases identiques.

En 2002, les amplitudes de résultats étaient plus importantes qu'en 2006, les coûts de production s'étant resserrés avec la crise.

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