LA VIGNE : En quelques mots, qu'est ce qu'une SAS ?
Hervé Lepelletier : C'est une société anonyme simplifiée. Pourquoi « simplifiée » ? Parce que la SAS peut s'exonérer de nombreuses règles de fonctionnement des SA, prévues par le code du commerce. De plus, une SAS peut comprendre un associé unique alors qu'il en faut au minimum sept dans une SA. Le coût de la création d'une SAS avoisine les 2 500 euros.
Quel est l'intérêt d'en créer une ?
H. L. : Le statut du dirigeant est probablement le principal avantage. Dans une SAS, le dirigeant est un mandataire social, c'est-à-dire salarié. Aux yeux de la MSA, il n'est plus exploitant. Il cotise donc en fonction du salaire qu'il s'attribue. Il faut toutefois rester cohérent. Le dirigeant doit être mieux payé que ses salariés, sinon la MSA estimera qu'il y a abus de droit. De même, si vous ne percevez pas de rémunération de la SAS, le fisc peut estimer que vous ne vous comportez pas comme un dirigeant. Dans ce cas, il ne considérera pas la SAS comme un outil de travail et fera entrer ses biens dans la base taxable à l'ISF.
La SAS bénéficie d'un nouvel avantage depuis deux ans. Il n'est plus obligatoire de faire appel à un commissaire aux comptes, ce qui engendre une économie de 5 000 à 6 000 euros par an minimum.
Quel est le mode d'imposition de la SAS ?
H. L. : Sur ce domaine également, la loi a bougé il y a deux ans. Désormais, la SAS peut être soumise à l'impôt sur le revenu (IR) pendant les cinq premières années consécutives à sa création et non à l'impôt sur les sociétés (IS), comme c'est le cas pour les SA. A l'issue des cinq ans, le dirigeant peut rester à l'IR en transformant sa SAS en EARL et bénéficiera alors de la fiscalité agricole (déduction pour investissement, etc). Ou il pourra choisir l'IS s'il reste en SAS. Le choix de l'IS, intéressant à plus d'un titre, est irrévocable. Lors de la transformation d'une EARL en SAS en restant à l'IR, le dirigeant n'a pas à se poser de questions sur des plus-values potentielles, uniquement liées au changement d'imposition. Autre point à savoir : quand on transforme une EARL ou SCEV en SAS en restant à l'IR, l'écoulement des stocks de l'entreprise précédente se fait sans cotisation MSA.
Peut-on faire cohabiter une SAS avec une EARL ou une SCEV ?
H. L. : Bien sûr. C'est même souvent le cas. On peut, alors, bénéficier des avantages des deux régimes d'imposition : l'impôt sur le revenu pour l'EARL ou la SCEV et l'impôt sur les sociétés pour la SAS.
Quel profil de vigneron peut être intéressé par une SAS ?
H. L. : J'ai envie de répondre « c'est l'occasion qui fait le larron ». La SAS est particulièrement indiquée aux célibataires, qui ne peuvent pas, contrairement aux couples, optimiser leurs prélèvements fiscaux et sociaux au sein d'une EARL ou d'une SCEV. Elle peut aussi être intéressante pour transmettre un patrimoine à ses enfants avec une imposition réduite.
La situation n'est jamais figée. On peut transformer une SAS en EARL pour revenir à une imposition sur le revenu ou parce que votre situation familiale a changé. Dans ce cas, il est préférable d'avoir « vidé » les réserves de la SAS, car elles seront imposées lors du passage à l'IR.
Quels peuvent être les dangers d'une SAS ?
H. L. : Quand un couple crée une société, il doit veiller à ce que le survivant garde le pouvoir en cas de décès de son conjoint. Ainsi, il est protégé si les relations avec les enfants se dégradent. Il faut aussi étudier les conséquences d'un éventuel divorce. Une SAS peut rapidement conduire un des membres à la faillite, en cas d'accident, si ces points n'ont pas bien été pensés avant, car elle est souvent réalisée dans un but d'optimisation fiscale. Il ne faut pas viser cet objectif à tout prix, sinon on peut se mettre en danger.
L'autre inconvénient de la SAS, c'est que, comme dans toute société commerciale, les revenus ne sont disponibles qu'après l'assemblée générale, qui statuera sur la distribution des réserves. En dehors de l'AG, le dirigeant ne peut percevoir que sa rémunération.