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VIGNE

Prévoir la sortie de grappes

Frédérique Ehrhard - La vigne - n°221 - juin 2010 - page 44

A Sancerre et dans le Midi, deux organismes prévoient la sortie de grappes avant le débourrement. Les contrôles faits à la mi-mai montrent que ça marche.
BOUTURES photographiées mi-décembre. En dénombrant les ébauches de grappes, les Vignobles Foncalieu ont pu prévoir la sortie de grappes au vignoble. © FONCALIEU

BOUTURES photographiées mi-décembre. En dénombrant les ébauches de grappes, les Vignobles Foncalieu ont pu prévoir la sortie de grappes au vignoble. © FONCALIEU

A Sancerre, dans le Cher, la Sicavac évalue la sortie de grappes à l'avance, depuis plusieurs années. La méthode est simple, comme l'explique François Dal, le responsable du service viticulture : « Nous prélevons des rameaux début février, que nous plaçons dans un vase avec de l'eau au bureau. Au chaud, ils débourrent fin mars. Début avril, nous pouvons observer les inflorescences (ébauches de grappes), avec un mois d'avance sur la sortie au vignoble. »

Cet hiver, il a prélevé une vingtaine de rameaux dans une parcelle grêlée et autant dans une autre qui ne l'était pas. Sur la première parcelle, il a compté en moyenne 1,23 ébauche de grappes par rameau et 1,57 sur la seconde.

« Les vignerons ont pu supprimer une baguette au pliage »

« La sortie s'annonçait donc correcte pour le vignoble. Nous avons diffusé l'information aux vignerons. Ceux qui avaient gardé deux baguettes au lieu d'une seule pour compenser une éventuelle petite sortie dans les parcelles grêlées ont pu en supprimer une au moment du pliage. Cela leur a évité d'avoir trop d'ébourgeonnage à réaliser pour ajuster la charge », précise François Dal.

A la mi-mai, il a ensuite observé les sorties réelles dans les parcelles où il avait fait ses prélèvements. Il a dénombré 1,42 ébauche de grappe par rameau dans la parcelle grêlée et 1,68 dans l'autre. « Sur les boutures, la fertilité est moindre, c'est normal, rassure-t-il. Mais c'est une première indication, qui permet de prévoir le personnel nécessaire pour l'ébourgeonnage. Cela ne dispense pas pour autant d'observer ce qui se passe au vignoble. »

Trois semaines au frigo à 4 °C

Dans le Midi, les Vignobles Foncalieu souhaitent évaluer la sortie encore plus tôt pour conseiller leurs adhérents sur la taille. Pour y arriver, il faut lever la dormance des bourgeons. « En octobre 2009, nous avons prélevé des rameaux dans trois parcelles de chardonnay et nous les avons placés trois semaines au frigo à 4 °C. Puis nous les avons fait pousser dans des mini-serres chauffées, sur un lit de perlite », explique Gabriel Ruetsch, le responsable agronomie de ce groupe coopératif.

Quarante jours après, à la mi-décembre, il a dénombré 1,2 à 1,5 ébauche de grappe par rameau, suivant le rang des bourgeons prélevés. La sortie de grappes s'annonçait donc correcte. « Si nous avions eu moins d'une inflorescence par rameau comme l'année précédente, nous aurions conseillé aux vignerons de garder plus d'yeux », précise-t-il. Mi-mai, Gabriel Ruetsch est retourné dans le vignoble pour mesurer les sorties réelles. Il a dénombré 1,3 à 1,5 inflorescence par rameau en fonction des parcelles. Son test est donc pertinent.

Obtenir l'information dès le début de la saison de taille

Pour l'année prochaine, l'objectif est d'obtenir une information dès la fin novembre, au début de la période de taille. « En jouant sur le nombre d'yeux gardés à la taille, les vignerons peuvent éviter de trop grandes variations du potentiel de rendement », relève Gabriel Ruetsch.

Cette information permet aussi d'orienter chaque parcelle en fonction du potentiel de l'année. Mieux vaut éviter d'engager celles où les sorties seront les meilleures dans une catégorie où il faut prévoir de l'ébourgeonnage ou de l'éclaircissage, par exemple. « Nous allons renouveler ce travail l'année prochaine sur le chardonnay, le merlot, le cabernet sauvignon ou le sauvignon, en le déclinant sur l'Aude, le Gard et l'Hérault », ajoute-t-il.

Les fleurs se préparent un an avant

Les Vignobles Foncalieu disposent d'un réseau de huit stations météo. « En 2009, nous avons relié les données de ces stations aux sorties de grappes observées dans les parcelles. La fertilité était la meilleure dans les parcelles qui avaient reçu plus de lumière et de chaleur durant le printemps et l'été 2008 », précise Gabriel Ruetsch. Pas étonnant.

L'induction florale a lieu l'année précédant le développement des bourgeons, dans lesquels le phénomène se produit de manière invisible. De minuscules ébauches de feuilles se transforment en ébauches de fleurs. « La lumière et la température stimulent le processus, avec des besoins qui varient en fonction des cépages. La vigueur du cep et la charge de l'année précédente entrent aussi en ligne de compte », précise Laurent Torregrosa, enseignant et chercheur à Montpellier SupAgro.

L'induction florale débute en mai sur les bourgeons de la base et peut se poursuivre tant que la croissance végétative reste active. Au moment de l'aoûtement, les bourgeons entrent en dormance, renfermant déjà la fleur de l'année suivante. Ils ne se développeront qu'au printemps suivant, après une période froide.

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