Des bambous pour traiter les effluents vitivinicoles ? Personne en Aquitaine ne l'a tenté, sauf Laurent Rousseau. A la tête du vignoble familial (50 ha en Lalande-de-Pomerol, Lussac-Saint-Emilion et Bordeaux supérieur), il fait figure de pionnier. Les visiteurs se pressent dans sa bambouseraie de 138 pieds, installée en 2007, sur 900 m2 à Abzac, en Gironde.
Un piège à polluants
Les eaux de lavage du chai et des matériels viticoles, soit 800 m3 par an, sont séparées de leur phase solide, puis aspergées en très faible ondée sur la parcelle de bambous. Elles disparaissent ensuite, emportées par l'évapotranspiration des plantes. En même temps que l'eau, les racines des bambous absorbent les polluants minéraux, puis les stockent dans leurs chaumes. Ces polluants sont ainsi piégés dans le bois sans possibilité de relargage. De leur côté, les bactéries qui se développent autour des racines des bambous minéralisent les matières organiques en éléments simples assimilables par les plantes. Quant aux matières solides récupérées à l'entrée de la bambouseraie, elles sont compostées, puis servent d'amendement aux jeunes plants.
C'est en 2005 que Laurent Rousseau découvre cette technologie brevetée par la société Phytorem. Les débuts sont difficiles. « Il m'aura fallu douze mois pour obtenir toutes les autorisations nécessaires », se souvient-il. A-t-il fait des émules ? Une bambouseraie traitant les eaux usées de plusieurs viticulteurs est à l'étude. En attendant, Laurent Rousseau ne dévie pas de sa route. Son crédo ? Le respect de l'environnement qui n'est pas « une affaire de lois, mais de conscience collective », répète-t-il. Sociéthica, société qui a créé le trophée du développement durable, ne s'y est pas trompé en attribuant à son exploitation sous agriculture raisonnée le prix spécial du jury 2010.