MISE EN PLACE. Christophe Moron se prépare à lancer une filtration de bourbes. Après avoir posé les plaques recouvertes des toiles sur le châssis, il serre le filtre-presse qui fonctionne sous pression. © C. WATIER
CUVE DE BOURBES. A l'extérieur de la cave, cette cuve de 12 hl recueille les bourbes additionnées de perlite. Un agitateur brasse le mélange pendant une demi-journée et durant la filtration.
DÉBÂTISSAGE. Après avoir desserré le filtre et écarté les plaques de filtration, Christophe Moron retire le gâteau, un mélange de perlite et de résidus de bourbes. Avec les toiles en polypropylène, un coup de jet d'eau suffit à nettoyer le filtre et les plaques. © C. WATIER
DÉBÂTISSAGE. Après avoir desserré le filtre et écarté les plaques de filtration, Christophe Moron retire le gâteau, un mélange de perlite et de résidus de bourbes. Avec les toiles en polypropylène, un coup de jet d'eau suffit à nettoyer le filtre et les plaques.
Comme de nombreuses caves, le domaine de Gagnebert, à Juigné-sur-Loire (Maine-et-Loire), possède encore un filtre-presse. Christophe Moron utilise le sien pour filtrer toutes ses bourbes, soit environ 400 hl par saison de vinification. Il récupère ainsi un volume de jus et de vin conséquent, « la quasi-totalité du volume initial, moins le volume de terre », ces jus et vins étant « intéressants au niveau aromatique ».
Parfois, il filtre aussi les moûts des moelleux coteaux-de-l'aubance. « Ceux-ci se débourbent très mal, explique Christophe Moron. Cette filtration permet de clarifier les jus avant la fermentation et d'éviter l'apparition de faux goûts. »
Un filtre assez autonome
Ce filtre-presse, de marque Padovan, est équipé de quarante plateaux posés sur un châssis en inox. Les toiles qui s'adaptent aux plateaux mesurent 40 cm sur 40 cm, ce qui donne une surface filtrante totale de près de 13 m2.
Pendant les vinifications, Christophe Moron traite 20 hl/jour de bourbes environ. « La veille de la filtration, j'incorpore la perlite, à raison de 2 kg/hl, dans la cuve de bourbes de 12 hl, située à l'extérieur de la cave. Je branche dessus un agitateur pendant une demi-journée, indique-t-il. Le lendemain matin, je remets en route le brassage, j'installe le matériel et je lance la filtration. Cela me prend dix minutes. »
Le filtre-presse a un débit très faible, mais il tourne tout seul. Une pompe l'alimente avec le mélange bourbes-perlite. Un cycle de filtration dure deux à trois heures pour 12 hl. La pression monte progressivement jusqu'à 6 à 8 bars quand passent les trois quarts du volume à filtrer. Puis, elle oscille entre 5 et 8 bars jusqu'à la fin du cycle. Un pressostat sur le filtre gère la mise en marche ou l'arrêt de la pompe, en fonction de la pression. La famille Moron utilise ce filtre-presse sur le domaine depuis vingt ans environ. Il paraît toujours en bon état.
Pas d'investissement dans du nouveau matériel
Christophe Moron a déjà songé investir dans un nouveau matériel pour les bourbes. Il en avait assez du temps passé à débâtir le gâteau et à nettoyer son filtre-presse. « Nous avons un filtre tangentiel pour filtrer les vins. Nous pourrions l'équiper d'un module de filtration de bourbes, remarque-t-il. D'autant que le nettoyage de ces filtres est quasi automatique. » Mais le jeune vigneron confie que ce module est onéreux : « L'équivalent du prix de trois ou quatre filtres-presses au moins. »
En 2009, il a trouvé une autre option qui a redonné du souffle à son filtre-presse. Il a acheté de nouvelles toiles en polypropylène pour remplacer les anciennes en tissu. Il s'agit de toiles Vinitex, en matière synthétique, que distribue la société Filtration conseil.
D'abord, ces toiles sont beaucoup plus faciles à entretenir que les anciennes. « Les toiles en tissu s'encrassaient très vite, expose Christophe Moron. J'étais obligé de les passer au lave-linge très souvent. Et comme elles séchaient mal, je les mettais même au sèche-linge pour éviter qu'elles moisissent. »
Le nettoyage est beaucoup plus rapide
Avec les toiles Vinitex, un simple jet d'eau suffit, car la matière est très lisse. Le séchage est aussi rapide. Elles peuvent être nettoyer au karsher de temps en temps, sans que cela les abîme. Les toiles en tissu, elles, résistent moins bien à la pression et à l'eau chaude.
Ensuite, ces nouvelles toiles ont considérablement réduit le temps de travail sur le filtre-presse. Surtout le nettoyage, en fin de filtration. « Avant, pour débâtir le gâteau et nettoyer le matériel, cela prenait une heure, à deux personnes, calcule Christophe Moron. Maintenant, il faut une demi-heure, seul. » Désormais, il suffit de desserrer le filtre, de laisser tomber la terre et de passer un coup de jet d'eau. Et Christophe Moron n'envisage plus de le remplacer par un matériel plus moderne.
Quant à choisir entre filtre-presse et filtre rotatif ? La question ne se pose même pas. « Le filtre-presse est le mieux adapté aux petits volumes de bourbes que nous générons chaque jour, justifie Christophe Moron. Dans le cas des blancs, cela me permet de réincorporer les jus filtrés aux cuves du jour pour que les moûts fermentent ensemble. » Un filtre rotatif impliquerait de stocker les bourbes jusqu'à la fin des vendanges et donc des besoins en froid trop importants.
Le Point de vue de
Jean-Michel Desseigne, responsable expérimentation des équipements œnologiques à l'IFV
« Il clarifie très bien les bourbes »
« Le filtre-presse permet de très bien clarifier les liquides chargés, difficiles à filtrer : les bourbes, les lies, voire les vins de presse. Très ponctuellement, il peut servir pour la filtration par alluvionnage des vins, en adaptant la pompe.
C'est un filtre très simple d'utilisation. Une fois la pompe à piston branchée, il tourne tout seul et demande peu de surveillance. De plus, c'est un filtre clos. La filtration se fait donc sans aération, contrairement au filtre rotatif sous vide.
Le filtre-presse est mieux adapté aux petites installations, alors que le filtre rotatif est plus réservé aux gros volumes.
En revanche, le gros inconvénient de ce filtre est le débâtissage. Selon le liquide filtré, cette opération peut être longue. Et comme les cycles sont assez courts, il faut débâtir le filtre et le laver souvent. En outre, il nécessite d'utiliser des terres de filtration, qu'il faut gérer par la suite. L'autre point négatif est qu'il est bruyant, à cause de la pompe à piston. »