Vous êtes propriétaire d'une vigne, mais à la suite d'un accident, vous n'êtes plus en état de la cultiver. Votre fils poursuit des études d'œnologie et espère bien reprendre le flambeau. Comment gérer au mieux la période d'incapacité jusqu'à la reprise ? Une première solution vient de l'article L 411-40 du code rural… Selon ce texte, vous allez pouvoir mettre vos vignes en location pour un an, en vue de l'installation de votre fils. La loi dispose que ce contrat est renouvelable six fois en attendant l'installation de votre descendant. Si, au final, votre enfant ne s'installe pas, le contrat se transforme en bail rural de neuf ans…
Autre solution possible : le contrat de prêt gratuit, dit commodat. Il est réglementé par les articles 1875 à 1891 du code civil. Caractère essentiel de cette convention : le prêt est gratuit, c'est-à-dire sans contrepartie. Grâce à cette gratuité, le propriétaire dispose d'une liberté totale sur la durée du contrat. Il suffit de rédiger une convention…
Louis règle la taxe foncière due par Simon
Dans une affaire jugée par la Cour de cassation le 28 avril 2009, les juges ont eu à analyser le type de relations entre le propriétaire d'une vigne, touché par une incapacité de travail et son cocontractant. Voici les faits : Simon se trouve dans la situation évoquée ci-dessus. Renseignements pris auprès d'un juriste, il se met en rapport avec Louis, viticulteur à la recherche d'une exploitation provisoire, car il est en attente de la production d'un plantier. A la demande de ce dernier, un contrat de prêt est conclu pour quatre ans.
Le temps passe. Simon oublie un peu ses vignes. En son absence, des courriers arrivent, dont l'avertissement à régler la taxe foncière. Craignant des poursuites, Louis ouvre l'enveloppe et paie le foncier dû par Simon.
A l'approche du terme des quatre ans, le propriétaire entend libérer son bien, car un important négociant se porte acquéreur à prix rémunérateur. Un compromis est signé sous condition que le terrain soit libéré à l'expiration de la quatrième année. Simon adresse alors une lettre recommandée à Louis pour lui demander de laisser les vignes une fois le terme échu. Louis répond qu'il ne quittera pas le bien, car il s'estime en possession d'un bail de neuf ans renouvelable. Son argumentation est simple : il ne s'agit pas d'un prêt gratuit, mais d'une location. Pour lui, il y a mise à disposition d'un bien agricole à titre onéreux, puisqu'il a réglé la taxe foncière pour le compte de Simon.
Un contrat truqué ?
A l'appui de son argumentation, Louis montre l'exemplaire de son contrat de prêt sur lequel est mentionné « gratuit sauf impôt ». Chose curieuse, l'exemplaire détenu par Simon ne porte pas cette mention. Les juges sont troublés par cette différence et rejettent la demande de Louis. La Cour de cassation leur a donné raison. Pour les magistrats, le fait que Louis ait réglé la taxe foncière ne suffit pas à donner au contrat un caractère onéreux.
Cela pourrait passer pour un revirement de jurisprudence car, le 14 janvier 2004, la même cour avait décidé que le paiement de la taxe foncière par l'emprunteur suffisait à donner au contrat son caractère onéreux. Toutefois, dans cette espèce, le contrat mentionnait sans discussion possible, l'obligation imposée à l'emprunteur.
En fait, tout porte à croire, que dans l'affaire jugée le 28 avril 2009, les juges ont pensé que Louis avait rajouté la mention et qu'ils ont voulu le punir.