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AU COEUR DU MÉTIER

Dans l'Aude, chez Nicolas Assemat Je vends des vins de mes deux coopératives »

Frédérique Ehrhard - La vigne - n°230 - avril 2011 - page 34

En dix ans, Nicolas Assemat a agrandi et restructuré l'exploitation familiale. Pour récupérer de la marge, il a créé un magasin dans lequel il vend des vins de ses deux coopératives, son huile d'olive et bientôt ses truffes.
EN 2009, NICOLAS ASSEMAT a créé un magasin sur le domaine avec sa compagne Angélique, qui a une bonne expérience professionnelle dans la vente. © J. SIERPINSKI

EN 2009, NICOLAS ASSEMAT a créé un magasin sur le domaine avec sa compagne Angélique, qui a une bonne expérience professionnelle dans la vente. © J. SIERPINSKI

APRÈS AVOIR RESTRUCTURÉ ses parcelles, Nicolas a replanté avec des palissages hauts. Il conduit cette syrah en cordon de Royat, avec six coursons de deux yeux chacun. © J. SIERPINSKI

APRÈS AVOIR RESTRUCTURÉ ses parcelles, Nicolas a replanté avec des palissages hauts. Il conduit cette syrah en cordon de Royat, avec six coursons de deux yeux chacun. © J. SIERPINSKI

POUR LOGER TOUT LE MATÉRIEL, Nicolas a construit un nouveau hangar de 300 m2 dans une zone artisanale située à l'extérieur du village. © J. SIERPINSKI

POUR LOGER TOUT LE MATÉRIEL, Nicolas a construit un nouveau hangar de 300 m2 dans une zone artisanale située à l'extérieur du village. © J. SIERPINSKI

La vente n'est pas réservée aux vignerons indépendants ! Depuis juin 2009, Nicolas Assemat commercialise des vins des deux coopératives auxquelles il adhère. « Angélique, ma compagne, gère quatre chambres d'hôte. Nous avons créé un magasin où nous proposons aux touristes des vins et de l'huile d'olive. Ils apprécient de trouver des produits locaux, et nous arrondissons notre chiffre d'affaires », raconte ce vigneron de Caunes-Minervois, dans l'Aude.

Lorsqu'il s'est installé sur l'exploitation familiale en 2000, les vins de pays et le Minervois se vendaient bien. Mais dès 2004, les cours ont chuté. « Malgré l'agrandissement de l'exploitation, le chiffre d'affaires a reculé de 30 % durant les années de crise. J'ai dû réduire mes prélèvements au minimum pour continuer à investir », explique Nicolas, qui voit avec soulagement ses acomptes remonter pour la récolte 2010.

En dix ans, il a porté la surface de 25 à 45 ha tout en regroupant des parcelles. « La plupart font maintenant 2 ou 3 ha. Je gagne du temps à les cultiver. » Sur les terrasses les plus escarpées, il a installé 2 ha d'oliviers et 3 ha de chênes truffiers. Dans la plaine, il a constitué un îlot de 25 ha de vignes qu'il est en train d'équiper pour l'irrigation.

« En 2010, j'ai pu arroser 12 ha grâce à un puit. Le rendement a été supérieur de 15 % à celui des parcelles non irriguées. Et j'ai récolté des raisins bien mûrs qui n'avaient pas subi de stress hydrique ! »

Entrepositaire agréé

Pour trouver de nouvelles ressources en eau, Nicolas a monté un projet de bassin de stockage avec deux autres vignerons. « Il faut mieux réguler la qualité et le rendement. Quand les petites récoltes se conjuguent à la baisse des prix, le chiffre d'affaires est vite divisé par deux. C'est ce qui s'est produit en 2008. »

Nicolas adhère à la coopérative de Caunes-Minervois pour les rouges et à celle de Peyriac-Minervois pour les blancs. Pour leur acheter des vins, il a dû prendre le statut d'entrepositaire agréé. « J'ai d'abord choisi des bouteilles dans la gamme de chaque cave. Je les achète au tarif de gros et je les revends au même prix qu'au caveau, pour ne pas créer de concurrence, explique-t-il. En 2010, il a demandé à la coopérative de Caunes de lui élaborer une cuvée personnalisée de Minervois. « J'ai pu fixer librement mon prix à 5,80 €/col. » Ce vin ne provient pas uniquement de ses raisins. Mais Nicolas a participé à l'assemblage. « Je voulais un rouge assez puissant et boisé. Cela correspond aux attentes de mes clients et au style de vin que j'aime. » La cave en a embouteillé 5 000 cols. Nicolas a fait faire l'étiquette. « J'ai payé cette cuvée 215 €/hl. Il y a des frais d'élevage et de conditionnement. Malgré cela, c'est cher, si je compare aux 70 €/hl que nous touchons en tant qu'adhérents pour nos minervois. »

Deux autres coopérateurs reprennent aussi des vins. « Quand nos ventes auront progressé, nous serons mieux placés pour discuter les prix. Et j'espère bien pouvoir disposer d'une cuvée élaborée avec mes raisins. »

Pour compléter son offre, Nicolas vend aussi des vins produits par d'autres vignerons du syndicat Jeunes agriculteurs, dont il est le président pour l'Aude. Il propose également son huile d'olive, et ses truffes quand ses plantations produiront. « Je n'aurais pas pu investir dans une cave particulière. Avec ce magasin, je peux m'impliquer dans la vente à mon rythme. Je n'achète que les volumes que je peux vendre. Les risques sont limités », relève Nicolas. En allant jusqu'au consommateur, il récupère de la marge. Il fait connaître les vins de ses coopératives et il contribue au développement d'un tourisme vigneron indispensable pour accroître la notoriété du Minervois.

Pour exploiter le magasin, il a créé une SARL. « Sur les six mois de 2009, nous avons fait 7 500 euros de ventes de vins. En 2010, nous sommes montés à 20 000 euros. C'est un bon départ. » La clientèle se concentre sur cinq mois, de mai à septembre. « Pour vendre toute l'année, nous nous sommes lancés à l'export. Nous avons expédié trois palettes avant les fêtes de fin d'année et rentré 6 000 euros. »

Côté emploi du temps, la situation est tendue. Angélique s'occupe du magasin. Les parents de Nicolas sont encore très présents sur l'exploitation. Grâce à leur aide, il arrive à se passer de salariés permanents. Entre l'exploitation, la vie de famille et les réunions à l'extérieur, l'équilibre est parfois difficile à tenir. « Dans un an et demi, mon mandat syndical va s'achever, espère Nicolas. Je pourrai me recentrer sur mes projets personnels et souffler un peu ! »

Et si c'était à refaire ? « Je planterais des blancs plus vite »

« Mon père a été l'un des premiers à planter de la syrah et j'ai continué avec des cépages rouges avant de m'intéresser aux blancs. J'aurais dû le faire plus vite. Leurs cours ont mieux résisté à la crise que ceux des rouges.

Actuellement, avec du sauvignon qui donne 80 hl/ha payés à 70 €/hl, le produit brut dépasse 5 000 €/ha. Sur les rouges, il se situe plutôt à 3 500 €/ha, après être descendu en pleine crise à 2000 €/ha.

Par ailleurs, je quitterais aussi plus vite la Cuma.

L'an dernier, je me suis désengagé sur la machine à vendanger, que j'ai rachetée. En faisant quelques prestations pour amortir l'investissement, j'ai réduit mes coûts. En revanche, je garderais un rythme de plantation soutenu. Dans la foulée de mes parents, j'ai continué à investir chaque année, et en dix ans, j'ai replanté près de 20 ha. Avec des vignes jeunes et bien structurées, j'ai pu réduire mes coûts. Et j'ai élargi ma palette de cépages. »

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L'EXPLOITATION

Main-d'œuvre du Gaec : Nicolas, ses parents et deux saisonniers.

36 ha de vignes dont 32 en production, 4 ha de blé dur, 3 ha de chênes truffiers et 2 ha d'oliviers.

Cépages : grenache, syrah, carignan, caladoc, marselan, sauvignon, chardonnay, muscat petit grain, chasan et viognier.

Densité : 4 000 pieds/ha.

Mode de conduite : cordon de Royat et guyot.

Rendements : 45 hl/ha en AOC Minervois, 70 à 90 hl/ha en IGP.

Commercialisation

Deux coopératives et un magasin au domaine.

Les ventes au magasin

6 000 cols.

Prix : 2,95 à 5 €/col de vin de cépage IGP et 4 à 19,50 €/col de Minervois. Les résultats

Chiffre d'affaires 2010 : 135 000 € pour le Gaec, 20 000 € pour la SARL.

L'essentiel de l'offre

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