Suis-je un cas unique ? La formation Certiphyto m'a vraiment découragé. J'y allais le cœur léger, curieux d'apprendre de nouvelles techniques et d'échanger avec des collègues. J'en suis ressorti « plombé » à la vue de toutes les formalités que doivent remplir les employeurs et surtout à la découverte de tous les risques que nous prenons à déléguer les traitements à nos salariés. Il faut voir la somme de décrets qui ont fleuri depuis une décennie sur l'environnement et la santé ! Une question me taraude depuis : sera-t-il encore possible, dans quelques années, qu'un salarié effectue un traitement ? Le mien fait 40 % des traitements, le reste étant à ma charge. J'ai tous les équipements de protection, mon enjambeur est aux normes, mon local phyto également. Mais bien que je respecte la réglementation, j'ai peur que dans quinze ans, mon employé me poursuive en justice s'il contracte une maladie qui puisse avoir un lien avec son exposition aux produits phytos. Personne ne doit mourir à cause de son travail. Pas plus mon salarié que moi d'ailleurs, mais le sort des vignerons semble beaucoup moins intéresser les ministères de l'Agriculture et de la Santé. Que faire ? Réaliser tous les traitements moi-même ? Mais alors, comment occuper mon salarié ? Qui va vendre les bouteilles, renseigner le logiciel de traçabilité, recruter et gérer les saisonniers ? Pour l'instant, tout se passe très bien avec mon salarié. Réaliser des traitements est même son travail préféré. En sera-t-il de même quand il aura passé sa formation Certiphyto ? Tout dépendra de son contenu et de l'esprit des formateurs. Néanmoins, je pense que la profession se prépare des moments socialement difficiles, car on peut craindre un durcissement des relations au sujet des traitements. Il n'est pas exclu d'imaginer que des salariés refusent de monter sur un enjambeur.