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Magazine - Terroir & tradition

Du chêne au cognac : L'itinéraire d'une eau-de-vie

Myriam Guillemaud - La vigne - n°231 - mai 2001 - page 86

Véronique et François Moine ainsi que leur fils Gabriel font du cognac « avec des vignes, du temps et du bois ». C'est ce qu'ils expliquent à travers un circuit allant du mérandier à leurs chais, en passant par la tonnellerie.
Véronique Moine devant son alambic où elle explique la différence entre la chauffe et la bonne chauffe.

Véronique Moine devant son alambic où elle explique la différence entre la chauffe et la bonne chauffe.

Sept visiteurs norvégiens de passage en septembre 2007 ont laissé leur nom sur cette barrique. Un joli souvenir.

Sept visiteurs norvégiens de passage en septembre 2007 ont laissé leur nom sur cette barrique. Un joli souvenir.

Dans la tonnellerie des Fins bois à Sigogne (Charente), on apprend qu'il faut donner 2 800 coups de masse pour faire un fût.

Dans la tonnellerie des Fins bois à Sigogne (Charente), on apprend qu'il faut donner 2 800 coups de masse pour faire un fût.

Des échantillons de pineau des Charentes oubliés sur le rebord d'une fenêtre. PHOTOS M. GUILLEMAUD

Des échantillons de pineau des Charentes oubliés sur le rebord d'une fenêtre. PHOTOS M. GUILLEMAUD

Des billes de chêne empilées, des cubes de merrains prêts pour la tonnellerie et un peu plus loin, des fagots de bois de chauffage. Même si les vignes s'étendent partout autour, c'est ici, dans une merranderie de Foussignac, en Charente, que Véronique Moine démarre son circuit de visite. Un circuit qui mène naturellement au cognac.

L'idée de ce cheminement est venue à François Moine, le mari de Véronique, il y a une vingtaine d'années. Le but était d'expliquer le rôle primordial du bois dans le vieillissement des eaux-de-vie, de montrer les similitudes entre les odeurs de l'un et les saveurs des autres. De dire que, sans chêne, il n'y aurait pas de cognac.

Ce petit voyage se fait à la fois dans l'espace et dans le temps. Véronique évoque le sel qui remontait le fleuve Charente et le bois qui en descendait, puis Colbert et sa géniale idée de créer des forêts domaniales qui fournissent toujours les chênes de 150 à 300 ans nécessaires à la merranderie. Devant ses visiteurs, elle souligne la quantité de déchets que produit cette industrie : seulement 20 % des billes vont devenir des merrains, les planches qui serviront à fabriquer des fûts. Le reste – cœur, aubier ou bois au fil tordu – servira de bois de chauffage…

Puis le circuit fait halte à la tonnellerie des Fins bois de Sigogne, à quelques minutes en voiture. Elle appartient à Fabrice Gatard, lui-même fils de tonnelier. On passe avec Véronique le doigt sur la tranche des merrains, on observe le changement de leur couleur au fil des trois ans de séchage. Véronique attrape une douelle d'un fût à restaurer. Elle montre la pénétration de l'eau-de-vie dans le bois.

2 800 coups de masse

Dans le bruit assourdissant des coups de masses cerclant les tonneaux ou ajustant les douelles – il faut donner en moyenne 2 800 coups pour monter une barrique – elle fait humer l'odeur de la barrique tout juste sortie du brasero. « Retenez bien ces odeurs, vous les retrouverez quand nous serons à la propriété. » Elle rappelle que ce brûlage, qui s'appelle bousinage, va conférer au cognac son côté toasté et grillé. Les tonneliers s'activent, presque impassibles. On devine parfois un sourire de fierté devant les regards pantois des visiteurs face à leur travail, mélange de force et de dextérité.

Le circuit s'achève dans les chais de la famille Moine, situés à Chassors, à une dizaine de kilomètres à l'est de Cognac. Véronique verse dans des verres un fonds de brouillis, puis une « tête », un « cœur » de chauffe et un peu de « secondes ». Elle explique que le brouillis provient de la première distillation, que la tête, le cœur et les secondes coulent, dans cet ordre, de la seconde distillation. Les visiteurs y plongent leur nez et hument les odeurs.

Dernière halte derrière les murs noircis par les champignons qui se nourrissent de la part des anges. Les barriques empilées dans les chais abritent cognac et pineau. Certaines arborent des mots inscrits à la craie, comme « Clinton cigar and Cognac club ». Des clubs norvégiens, grands connaisseurs de l'eau-de-vie charentaise, ont été séduits par la visite et ont laissé une trace de leur passage.

Circuit du chêne : du 15 juin au 15 septembre, rendez-vous du lundi au jeudi à 14 heures devant l'office de tourisme de Jarnac (Charente). Sur rendez-vous le reste de l'année.

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