À l'entrée des bureaux de la coopérative de Montagnac, dans l'Hérault, la Safer affiche les parcelles à la vente dans la commune. La plupart ne font que 30 ou 40 ares et, pourtant, elles trouveront preneur ! Cette dynamique facilite la vente ou la transmission des exploitations, parce que les repreneurs ont des perspectives d'agrandissement.
Elle est soutenue par une stratégie collective. « Si nous voulons maintenir notre potentiel et donner un avenir à notre coopérative, nous devons nous préoccuper du renouvellement des générations, explique Jean-Louis Reffle, le directeur. En 2006, après avoir analysé la situation avec l'Adasea, nous avons mis en place une palette d'actions destinées à aider nos adhérents à agrandir et à restructurer leurs exploitations. » Le personnel de la cave comme les administrateurs se sont mobilisés pour faire circuler l'information sur les parcelles à céder. « Notre technicien rencontre les adhérents deux ou trois ans avant la retraite, pour voir avec eux comment ils envisagent leur succession, ajoute Jean-Louis Reffle. Et il se tient aussi au courant des besoins en foncier des autres coopérateurs, plus jeunes. » La chambre d'agriculture et la Safer participent à ce travail d'animation foncière, informel mais permanent.
Des îlots adaptés aux nouvelles techniques
« Nous accordons aussi des avances de trésorerie à nos adhérents pour l'acquisition de petites parcelles, remboursables en cinq ans, poursuit le président. Cela leur permet de profiter des occasions d'achat sans avoir à monter tout un dossier à la banque pour 30 ares. » Cet engagement financier de la coopérative rassure par ailleurs les viticulteurs et les conforte dans leur volonté d'aller de l'avant. « Mon père cultivait 13 ha de vignes. J'ai pris son relais en 2006, raconte Laurent Jourdan, un jeune coopérateur. Avant cela, j'étais salarié agricole sur d'autres exploitations tout en commençant à acheter du foncier. Aujourd'hui, je cultive 21 ha de vignes. Si je n'avais pas réussi à m'agrandir, je n'aurais pas pu m'installer. »
Grâce à des achats et à des échanges, il a pu constituer des îlots plus faciles à travailler. « Autour d'une parcelle de 30 ares appartenant à mon père, j'ai pu regrouper 2 ha que j'ai replantés en syrah. » La coopérative l'a aidé à constituer les dossiers, qu'il s'agisse de la prise en charge d'une partie des frais notariés par le conseil général de l'Hérault (voir encadré) ou de la prime de restructuration.
Une dizaine de jeunes adhérents ont ainsi pu augmenter leurs surfaces ces dernières années. « Sur 350 coopérateurs, une soixantaine a moins de 40 ans. Ensemble, ils cultivent 60 % des surfaces engagées dans la coopérative », indique Jean-Louis Reffle.
Expérimenter
Sur ces exploitations bien structurées, il est possible de développer de nouvelles techniques de production. Cet hiver, Laurent Jourdan va replanter un îlot de 2 ha en chardonnay sur lequel il compte expérimenter la taille rase de précision. Avec deux voisins, ils vont s'équiper pour irriguer au goutte-à-goutte à partir d'une borne du réseau Bas Rhône Languedoc.
« Les méthodes évoluent, c'est bien », se réjouit Jean-Luc Jourdan, le père de Laurent, qui est heureux de voir que son fils a repris ses vignes et son métier. Malgré l'amélioration récente des cours et des rendements, la situation économique reste tendue. « Mais les jeunes sont mieux armés que nous ne l'étions », relève-t-il, plutôt confiant dans l'avenir.
Des aides à la mobilité foncière
Le conseil général de l'Hérault aide à regrouper les petites parcelles dispersées qui font moins d'un hectare. Il prend en charge 60 % des frais notariés quand il s'agit d'un achat et 80 % quand s'il s'agit d'un échange. « C'est une aide appréciable, rapporte Laurent Jourdan, un vigneron qui en a bénéficié. Dans les frais notariés, il y a une partie fixe qui ne dépend pas de la valeur de la parcelle. Pour une vigne de 3 ha qui vaut 30 000 €, par exemple, les frais se montent à 4 000 €. Mais pour une parcelle de 55 ares qui vaut 4 000 €, ils atteignent déjà 1 700 € ! »