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VIN

Ils stabilisent leurs vins avec des gommes de cellulose

Marine Balue - La vigne - n°240 - mars 2012 - page 42

Les gommes de cellulose, ou CMC, sont autorisées en Europe depuis 2009 pour la stabilisation tartrique des vins. Efficacité, respect des vins, économie d'énergie : trois caves confirment leur intérêt. Sur blancs et rosés essentiellement.

Le Point de vue de

« Beaucoup moins de risque de dissoudre de l'oxygène »

Claude Houbart, directeur de la cave de Labastide-de-Lévis (Tarn) © J.-C. GRELIER

Claude Houbart, directeur de la cave de Labastide-de-Lévis (Tarn) © J.-C. GRELIER

 © J.-C. GUTNER

© J.-C. GUTNER

« Nous avons commencé par tester les gommes de cellulose sur des vins blancs avant qu'elles soient autorisées. Les essais se sont révélés très positifs. Un an plus tard, nous les avons essayées sur des vins rosés et les résultats ont aussi été très satisfaisants. Depuis qu'elles ont été autorisées en 2009, nous avons donc généralisé les CMC à tous nos blancs et nos rosés, à savoir environ 25 000 hectolitres par an. Nous réalisons le traitement aux CMC avant l'embouteillage, juste après les filtrations classiques. Nous les employons à la dose conseillée par notre fournisseur, soit 10 g/hl. Leur manipulation est vraiment très simple et rapide. Elles permettent donc de gagner du temps par rapport au passage au froid. Et nous économisons pas mal d'énergie, puisqu'avec les CMC, le vin reste à température ambiante. L'autre avantage à supprimer la stabilisation à froid est qu'il y a beaucoup moins de risque de dissoudre de l'oxygène, puisque le vin n'est pas brassé à basse température. Nous craignions moins de le dépouiller. Depuis que nous stabilisons les vins aux CMC, nous n'avons jamais eu de problème de précipitation tartrique. Aucun de nos clients ne s'est plaint. Nous en sommes donc très satisfaits. En revanche, nous stabilisons toujours les rouges à froid, car les essais qui sont réalisés avec les gommes de cellulose ne donnent pas de bons résultats. Nous attendons que des solutions alternatives au froid voient le jour. Cela ne devrait pas trop tarder. »

Le Point de vue de

« Le vin n'est pas fragilisé, mais il faut faire deux poignettages »

David Bourdaire, vigneron à Pouillon (Marne) © J.-C. GUTNER

David Bourdaire, vigneron à Pouillon (Marne) © J.-C. GUTNER

« En 2007, j'ai réalisé un essai de stabilisation tartrique aux CMC sur quelques hectolitres de vin, en collaboration avec le Comité interprofessionnel des vins de Champagne. J'ai été convaincu à 100 %. Désormais, je les emploie sur toute ma gamme de champagnes. Je produis 850 hectolitres par an environ, en grande majorité des blancs. Fin janvier, j'incorpore les gommes de cellulose avant la phase de tirage, au moment de la mixtion (ajout des levures et de la liqueur de tirage). Cette étape comprend une petite agitation, ce qui permet de bien homogénéiser les gommes dans la cuve. J'utilise un produit sous forme liquide. Au départ j'ai essayé des CMC en poudre, à diluer, mais elles sont moins pratiques. Je mets une dose assez faible, de 5 g/hl. Le vin se clarifie ensuite en bouteille pendant l'élevage. Puis les résidus de gomme s'échappent au dégorgement avec les lies de levure. Avec ces produits, nous respectons beaucoup mieux le vin qu'avec une stabilisation tartrique à froid. Nous évitons de le faire descendre à -4°C et il n'est donc pas fragilisé. C'est l'avantage principal. De plus, le prix des CMC est plus intéressant et les économies d'énergie sont importantes : avant, au moment des tirages, ma facture d'électricité s'élevait à 2 000 euros sur un mois. Aujourd'hui, elle est revenue à un niveau normal. Le seul bémol est qu'avec les gommes, le dépôt de lies dans le goulot est un peu plus gras que sans les gommes. Après le dégorgement, cela laisse parfois un très léger voile, comme une trace sur le col de la bouteille. Pour éviter ce désagrément, nous sommes obligés de poignetter les bouteilles au moment du remuage (c'est-à-dire qu'on les agite d'un mouvement sec pour remettre en suspension le dépôt) avant de les charger dans les gyropalettes. Ce qui nous prend deux fois plus de temps qu'habituellement. Mais sur des bouteilles vertes, cette trace ne se voit quasiment pas… »

Le Point de vue de

« Nos assemblages sont beaucoup mieux respectés »

« Nous avons testé les gommes de cellulose dès leur lancement. Avant, nous stabilisions les vins blancs et rosés vis-à-vis des précipitations tartriques par passage au froid et avec un ensemencement à la crème de tartre. Mais le gros problème de ce traitement est qu'il modifiait fortement le profil des vins. Leur brassage à froid pouvait causer des problèmes d'oxydation et les vins ne se conservaient pas toujours bien dans le temps. Aujourd'hui, nous utilisons les CMC sur tous nos blancs et rosés conditionnés (4 millions de bouteilles environ). Le résultat est très bon : les vins sont stables et, surtout, il n'y a plus de différence à la dégustation avant et après le traitement. Nos assemblages sont beaucoup mieux respectés. C'est le plus gros avantage des CMC. Nous incorporons ces gommes après la filtration sur terres roses qui précède la mise en bouteille. Nous avons aussi essayé de les employer plus tôt, sur un lot de picpoul. Là, nous les avons mises avant la filtration sur terres blanches, ce qui permet une mise au propre du vin. Nous avons stocké cette cuve un an, puis nous l'avons filtrée sur terres roses et conditionnée. Le vin est resté stable. Donc, nous pouvons traiter aux CMC tous les vins que nous souhaitons vendre stables, conditionnés ou en vrac. L'utilisation du produit est très facile et plus rapide que la stabilisation à froid. Il est un peu visqueux, ce qui peut gêner son homogénéisation dans le vin, mais le fait de le mettre bien avant le tirage nous affranchit de tout problème. Les CMC sont assez chères, près de 0,50 euro/hl. Il faut donc bien valoriser le vin après. Enfin, nous ne les utilisons pas sur nos vins rouges, sur lesquels elles sont inefficaces. Nous stabilisons ceux-ci à l'acide métatartrique. »

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