De son propre aveu, elle « n'entrait pas dans le moule » d'une famille d'ingénieurs et de médecins. Née à Paris, Julie Balagny n'avait ni le goût, ni l'intérêt pour de telles études. En revanche, elle s'intéresse au vin en voyant son père « remonter des bouteilles de la cave. Et puis, c'est bête, le vin de messe m'a fascinée », dit-elle.
À 21 ans, elle s'inscrit à l'Afpa pour passer un BTS viti-œno. Puis elle part travailler dans un gros domaine à Perpignan (Pyrénées-Orientales), avant de passer sur une propriété en biodynamie à Nîmes (Gard). Là, elle apprend toutes les facettes du métier : conduite de la vigne, vinification et commercialisation. Après dix ans comme salariée, il lui restait à s'installer, ce qui n'est jamais évident lorsqu'on n'a pas de parenté dans la filière.
Certification bio en 2012
Le coup de main viendra d'Yvon Métras, vigneron réputé de Fleurie (Rhône), qu'elle rencontre lors d'une soirée chez Marcel Lapierre, un autre vigneron réputé, aujourd'hui décédé. « Je cherchais des vignes dans le Beaujolais ou dans le Jura, par goût pour leurs vins et la beauté des paysages. Yvon Métras a entendu parler d'une parcelle de 3,2 ha d'un seul tenant qui se libérait à Fleurie. Je l'ai reprise en fermage en 2009. »
Pas vraiment un cadeau : la parcelle est pentue, difficile à travailler. Elle y passe pourtant la charrue et la pioche pour la désherber sans herbicides et obtenir la certification bio en 2012.
Au départ, elle ne possède ni matériel, ni cuvage, mais son père spirituel l'aide : « Il m'a fourni les bennes pour mes premières vendanges et m'a prêté son cuvage ainsi que son frigo pour refroidir la vendange. Puis il m'a aidée à dénicher un pressoir en bois pour une bouchée de pain. »
Malgré les difficultés, Julie s'accroche. Sa persévérance finit par payer. La jeune femme vend toute sa production en bouteilles, dont une bonne part à l'export, sans réelle démarche commerciale. « J'en vis bien. Je remercie la vie tous les jours. Je récolte le fruit d'une démarche cohérente. Faire petit, faire bon, faire humain, c'est mon objectif, d'autant que, seule, je ne peux pas travailler plus que ces 3,2 ha. »
Elle se félicite aussi d'être au forfait fiscal (en dessous de 76 500 euros de chiffre d'affaires). « Cela me permet de ne pas payer trop d'impôts et de cotisations lorsqu'on récolte 12 hl/ha comme cette année ! Sinon, c'est la clé sous la porte. » Juste retour des choses, elle accueille des stagiaires qu'elle incite… « à débuter sur de petites exploitations ».
Ce que son protecteur lui apporte
« Yvon m'a beaucoup aidée, mais nous n'avons pas de lien financier. J'aurais eu beaucoup plus de mal à m'installer sans lui. Je n'avais jamais travaillé le gamay par exemple.
Alors il m'a conseillée pour la vinification, notamment pour la macération carbonique. Yvon, c'était aussi quelqu'un auprès de qui j'ai pu m'épancher dans les moments difficiles. Nous nous rendons toujours des services : il transporte ma vendange et je vendange chez lui. Nos rapports sont dans l'échange. Nous goûtons nos cuvées. Nous partageons nos impressions. Nous nous prenons le bec aussi. C'est archi-constructif ! »